Pavillon Richelieu : des courriels consultés par le CISSS sans motifs sérieux

Par Charlotte Paquet 3:40 PM - 27 mars 2023
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Le Centre intégré de santé et de services sociaux de la Côte-Nord n'avait pas le droit de consulter les courriels d'employés du pavillon Richelieu à Baie-Comeau, conclut le Tribunal administratif.

Le Centre intégré de santé et de services sociaux (CISSS) de la Côte-Nord n’avait pas le droit de consulter des courriels d’employés à leur insu, vient de confirmer le Tribunal d’arbitrage dans le dossier de deux lanceuses d’alertes du Centre de réadaptation pour les jeunes en difficulté d’adaptation Richelieu, plus connu sous le nom de pavillon Richelieu à Baie-Comeau.

Dans une décision rendue le 23 mars, Me Jean-Yves Brière, avocat-arbitre, donne raison à l’Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux (APTS), qui considérait que ces courriels ne pouvaient être déposés en preuve par l’employeur dans le cadre de l’audition de griefs liés a la suspension des deux travailleuses, car ils avaient été obtenus par une fouille illégale.

« Le Tribunal admet d’emblée qu’un employeur public tel un CISSS, qui œuvre dans le réseau de la santé et des services sociaux, dispose d’un motif rationnel de s’assurer que son personnel ne divulgue aucune information confidentielle concernant les usagers; Cependant, le Tribunal estime que l’Employeur n’avait pas de motifs sérieux et raisonnables qui le justifiaient d’avoir accès aux courriels de ces salariés », écrit Me Brière.

Selon lui, un soupçon ou une appréhension ne constituent pas un motif sérieux et raisonnable.

Représentante nationale de l’APTS pour la Côte-Nord, Maude Fréchette salue la décision du Tribunal administratif.

Du côté de l’APTS, on se réjouit évidemment. « C’est un pas de plus pour la reconnaissance des droits de dénoncer et pour la protection des lanceurs d’alerte. On est extrêmement satisfait de la première décision interlocutoire », indique la représentante nationale du syndicat pour la Côte-Nord, Maude Fréchette.

« L’arbitre est venu dire que la preuve est irrecevable donc le dévoilement de l’identité des sources journalistiques est protégé par le fait même », poursuit Mme Fréchette.

Un article du Devoir

Rappelons que toute cette histoire trouve son origine dans un article du Devoir publié le 25 mars 2021 et dans lequel deux lanceuses d’alerte témoignaient de la réalité de la surpopulation et des lacunes de l’aide aux jeunes hébergés au pavillon Richelieu.

Le CISSS a dénoncé ce « portrait inexact, faux et incomplet de la situation » dont la source se trouvait « dans la transmission d’informations qui ont été obtenues en contravention des obligations de loyauté et de confidentialité de personnes salariées », peut-on lire dans la décision. Selon l’organisation, l’article alarmait faussement la population.

L’employeur a alors procédé à la fouille de boîtes courriel de certains salariés et dans la plupart des cas, il s’agissait de courriels échangés entre les salariés et leur syndicat. Comme il souhaitait mettre en preuve les courriels lors de l’audition du grief, le syndicat s’y est vigoureusement opposé, sauf dans un cas.

Invité à réagir, le CISSS répond prendre actuellement connaissance de la décision, qui est en analyse à l’interne. ” Dans les circonstances, nous n’avons pas de commentaires à formuler pour le moment.  Après avoir effectué cette analyse, nous vous informerons si nous souhaitons réagir”, écrit son porte-parole, Pascal Paradis, dans un courriel.