Le salaire viable à Sept-Îles est de 18,84$/heure, selon une étude

Par Jean-Christophe Beaulieu 12 avril 2018
Temps de lecture :

L’exposition #Sept-Îles représente le fruit d’une démarche de création spontanée entreprise par quatre septiliens d’adoption.

C’est à Sept-Îles que le coût de la vie est le plus élevé parmi sept municipalités incluses dans une étude sur le salaire viable. La situation très particulière de la région en fait l’endroit où le revenu nécessaire pour avoir une qualité de vie décente est le plus élevé, et ce, autant pour une personne seule, un parent monoparental, ou un couple avec deux enfants. 

L’Institut de recherche et d’informations socioéconomiques (IRIS) a lancé jeudi une étude visant à éclairer les politiques publiques de lutte à la pauvreté et à l’exclusion économique.

«On a construit un indicateur qui tente de calculer le coût d’un panier de consommation et de voir à partir de quand une personne n’est plus pauvre», explique le chercheur Philippe Hurteau.

Ainsi, c’est lorsqu’un individu peut se permettre de faire des choix et qu’il a une certaine marge de manœuvre que l’on peut dire qu’il n’est plus pauvre.

Le but étant de «sortir de la pauvreté», les indicateurs utilisés actuellement, comme la mesure du panier de consommation (MPC), ne calculent toutefois que le coût pour couvrir les besoins de base. Or, selon M. Hurteau, combler les besoins de base ne sort pas de la pauvreté, cela ne fait que sortir un individu d’une situation de déficit humain criant.

«Quand le gouvernement s’appuie sur ce genre d’indicateur, il crée une confusion. Dans les faits, une personne qui est sortie de la pauvreté pourra se payer des cours universitaires pour un retour aux études, des vacances en famille, une sortie au resto par mois. Elle pourra se permettre d’avoir des loisirs et d’épargner», explique-t-il.

Sept-Îles loin derrière

Selon l’IRIS, le revenu viable moyen s’élève à 26 574 $. Il a été calculé pour sept municipalités québécoises, selon trois types de ménages. Sept-Îles se démarque des six autres villes à l’étude. Dans les trois cas types (voir tableau), vivre dans la municipalité nord-côtière requiert un revenu substantiellement plus élevé qu’ailleurs.

*Source : IRIS

Selon M. Hurteau, cela s’explique d’abord par les coûts d’alimentation.

«3 767 $ par année pour une personne, c’est donc le plus élevé. C’est 500 $ de plus qu’à Montréal. C’est beaucoup pour tous les gens à faible revenu.»

L’autre élément consiste en les coûts de transports. Sept-Îles n’ayant pas de réseau de transport en commun, on voit les coûts bondir par rapport aux autres municipalités. L’accès à un tel réseau permet une économie très importante selon le chercheur.

«Une passe de transport est environ de 1000$ annuellement. Les coûts pour entretenir une voiture sont plutôt autour de 6 500$. Quand l’option est disponible et valable, une personne à faible revenu devient moins pauvre si elle demeure dans n’importe quelle autre ville sous étude qu’à Sept-Îles», souligne le chercheur.

Un réseau de transport en commun au centre-ville viendrait certainement amoindrir la situation, mais Philippe Hurteau convient que l’éloignement complique un peu plus les choses.

Le caractère cyclique des emplois d’une municipalité peut aussi avoir une incidence sur le coût de la vie, mentionne-t-il. Dans les secteurs où les emplois sont assez stables, l’effet ne se fait pas sentir normalement. Certaines villes en période de boom minier, étant donné les afflux d’employés importants dans un court laps de temps, verront le coût de leur loyer augmenter très rapidement.

25% des travailleurs en situation de pauvreté

L’étude que publie l’IRIS fait suite au Plan d’action gouvernemental pour l’inclusion économique et la participation sociale 2017-2023 annoncé en décembre.

«Le Plan ne sortira pas les gens de la pauvreté, il va seulement bonifier l’aide social pour les personnes qui ont des contraintes sévères à l’emploi. Elles vont toutefois demeurer dans la pauvreté», affirme M. Hurteau.

Ceux qui gagnent le salaire minimum, ou à peine plus, sont aussi en situation de pauvreté, selon le responsable de l’étude. Il indique que le quart des employés québécois gagnent moins qu’un revenu viable actuellement.

«Ce n’est pas anecdotique comme situation. Et on dit aux gens : vous voulez sortir de la pauvreté ? Allez travailler! Mais il faut organiser le marché du travail pour qu’une personne en emploi se sorte effectivement de la pauvreté, ce qui n’est pas le cas présentement.»

Peu d’outils peuvent permettre de régler le problème, estime-t-il. M. Hurteau convient donc qu’une augmentation «importante et rapide» du salaire minimum est nécessaire pour changer les structures de rémunération du marché du travail.

Partager cet article