Laurence Lupin vous salue bien

Par Laurence Dupin 2:00 PM - 6 avril 2021
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Le lupin est aussi une fleur. Photo : Pixabay.

Je suis d’origine française, ça je vous l’avais déjà dit… Mon nom de famille est donc très peu courant au Canada. Les seuls autres Dupin que je connaisse habitent Toronto et il s’agit de ma sœur et de ses enfants. Résultat…

Pendant les trois années et demie que j’ai passé à Toronto, on m’a appelé Monsieur puisque Lawrence est un prénom de garçon en anglais. Depuis mon arrivée sur la Côte-Nord, j’ai retrouvé mon genre, mais je me suis transformée en Gentleman cambrioleur… En effet, Dupin est devenu Lupin.

Pour quelqu’un qui a dévoré tous les romans de Maurice Leblanc mettant en vedette un certain Arsène Lupin, c’est quand même flatteur. Je vous rassure, je ne compte pas m’introduire dans vos maisons pour vous délester de vos biens les plus précieux…

En écrivant ces lignes, une chanson me trotte dans la tête: «C’est le plus grand des voleurs, oui, mais c’est un gentleman, il s’empare de vos valeurs, sans vous menacer d’une arme…» Chanson de Jacques Dutronc qui a été le générique d’une série télévisée avec Georges Descrières.

Si j’étais prétentieuse, je dirais: une fleur parmi les fleurs puisque le lupin en est une, mais cela me mettrait plus que mal à l’aise.

Dernière nouveauté on m’a aussi appelé Maupin (ce qui m’a aussi tout de suite fait penser à un roman intitulé La petite Maupin). Mais c’est aussi un célèbre écrivain américain du nom d’Armistead Jones Maupin Jr.

Je n’ose imaginer ce que cela donnerait si je portais le nom de famille que mon père avait à sa naissance.
En effet, né en Afrique du Nord, sous le nom de Bokbzah (même moi je ne suis pas sûre de l’orthographe), il est devenu un Dupin dans les années 1950.

Et pour la petite histoire, il s’agit tout simplement du nom de code de mon grand-père pendant la Seconde Guerre mondiale, alors qu’il avait pour mission de surveiller l’Afrikakorps (bataillon allemand de Romel) qui sévissait en Afrique du Nord.

Lorsque vous faites vos études de journalisme, on vous répète assez souvent de faire attention à bien orthographier les noms des personnes que vous citez. Au fil du temps, cela devient un réflexe, même si le nom est simple vous le faites épeler par la personne à qui vous parlez.

Aujourd’hui Laurence Dupin, Lupin, Maupin vous salue bien. Pourquoi? Parce que pendant des mois, je me suis posé la question de savoir si j’allais rester ou partir. Avec la pandémie, même si la Côte-Nord est belle je me suis retrouvée enfermée ici loin de ma famille qu’elle soit en France ou à Toronto, et de mes amis.

Il y a même eu une période où le gouvernement français a interdit à ses ressortissants habitant hors de l’Union européenne de pouvoir rentrer sur le territoire (ce qui m’a bien entendu mise  dans une colère noire…). Cette décision a été déclarée inconstitutionnelle.

J’ai donc finalement pris la décision de rentrer en France et je m’envolerai de Sept-Îles le 3 mai prochain après avoir rempli un nombre incalculable de papiers, passé mon test PCR obligatoire, etc.

Je garderai de bons souvenirs de la Côte-Nord: la gentillesse des gens, la beauté des paysages… Mais tant qu’à être enfermée, je préfère l’être non loin des miens.

Cette pandémie aura changé les perspectives de bien des gens et en aura obligé plus d’un à prendre des décisions qu’ils n’auraient sans doute pas prises en temps normal. Même si la vaccination suit son cours, le temps paraît trop long lorsque l’on est loin des siens.

Je ne regrette rien. J’ai rencontré ici des gens extraordinaires, chaleureux, accueillants, prêts à aider. J’y ai exercé un travail qui me plaît dans une bonne ambiance.

Je reviendrai peut-être un jour jouer les touristes lorsque toute cette crise sera terminée, mais ce ne sera pas tout de suite et même si j’aime l’hiver, ce ne sera pas en hiver!

Une chose est sûre dorénavant lorsqu’on me parlera du Canada, je ferai comprendre aux Français qu’il n’y a pas que Montréal, Québec ou Ottawa. Qu’il faut qu’ils poussent jusqu’à Charlevoix, Tadoussac, la Manicouagan, Sept-Îles, la Minganie… Autant de secteurs dont je n’avais jamais entendu parler lors de mes études à Montréal et qui sont bien plus beaux et reposants que ces grandes villes étourdissantes.

Je vous salue donc. Je suis encore là pour quelques semaines mais le temps va passer bien vite. Trop vite et à la fois pas assez.

À une autre fois!

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