Les détails de la poursuite de la STQ qui réclame 8,7 M$ à son fournisseur

Par Karianne Nepton-Philippe 5:00 PM - 19 septembre 2023 Initiative de journalisme local
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La STQ intente une poursuite en raison des nombreux bris coûteux du F.-A.-Gauthier, causés par un fournisseur. Photo archives

La fiabilité du F.- A.-Gauthier a été remise en question à maintes reprises depuis son arrivée aux quais de Matane, Baie-Comeau et Godbout. Huit ans plus tard, en 2023, voilà que la Société des traversiers du Québec (STQ) poursuit en justice son fournisseur Steerprop pour une somme de 8 734 468,50 $.

La STQ en a eu assez de tous les coûts engendrés par les problèmes avec « les biens vendus et les services déficients » du fournisseur, principalement pour les propulseurs azimutaux. 

« Le présent recours est intenté en vertu du droit civil du Québec pour des dommages attribuables à la négligence, à l’impéritie et aux manquements aux obligations légales de Steerprop à titre de fournisseur ou vendeur professionnel spécialisé et prestataire des services de réparations effectuées sur les propulseurs azimutaux du F.-A.-Gauthier », peut-on lire dans la poursuite déposée le 1er septembre.

Des arrêts répétés 

Le F.-A.-Gauthier est entré en service en 2015. Il est doté de deux propulseurs azimutaux de marque Steerprop, qui sont placés sous la coque, à l’arrière du navire.

Il est entré en cale sèche une première fois en 2019 en raison de bris des composantes internes des propulseurs. Dès 2020, l’équipage observe un transfert d’huile de lubrification du réservoir d’alimentation au réservoir de récupération du système de propulsion ainsi qu’un filet d’huile sur l’eau à l’arrière du navire.

De novembre 2020 à décembre 2021, le F.-A.-Gauthier est retourné deux fois en cale sèche, en plus d’arrêts répétés. La STQ affirme avoir été privée du service de traversier pendant plus de 190 jours. La première visite en cale sèche aura coûté à la STQ un montant de 3 531 736,64 $ et la deuxième, 2 754 328,05 $.

La STQ note qu’à chaque retour en mer du navire, il y avait toujours des problèmes de transfert d’huile. Après de nombreuses inspections du fournisseur, ce dernier n’a jamais réussi à trouver la cause du problème. 

« Improvisation »

C’est au mois d’août 2022 que tout à coup, le fournisseur change son fusil d’épaule. Ayant l’habitude décrire les transferts d’huile comme une anomalie, il affirme à ce moment qu’il s’agirait plutôt d’une caractéristique du système de lubrification, selon le rapport de la STQ. 

La société d’État y voit une « improvisation » de la part de Steerprop. « Les interventions de Steerprop ont donné lieu à une série d’essais infructueux et désorganisés de sa part, à l’occasion desquelles elle a entrepris des réparations, des modifications et des remplacements de pièces à un coût exorbitant, souvent à l’aveuglette », indique la STQ dans sa poursuite. 

Aujourd’hui, elle précise qu’il y a toujours des transferts d’huile entre les réservoirs d’alimentation d’huile et les réservoirs de récupération. Dans sa poursuite, la STQ déclare que Steerprop est « responsable des dommages », a « omit de divulguer qu’elle avait effectué des modifications aux propulseurs azimutaux en 2019 » et a « manqué à ses obligations à titre de fournisseur, de vendeur professionnel et réparateur ». 

La somme des travaux répétés est de 8 748 138,89 $ et à ce jour, « Steerprop refuse et/ou néglige de rembourser à la STQ les sommes qui lui sont réclamées ».  

Une saga coûteuse et interminable 

Le système de propulsion, alimenté au gaz naturel liquéfié, a commencé à causer des maux de tête aux dirigeants de la STQ seulement quelques mois après sa mise à l’eau. Le traversier a même eu droit à ce qu’on appelât la saga du F.-A. Gauthier pour faire référence à ses nombreux bris,

Au travers des années, de nombreux élus, décideurs et citoyens ont indiqué en avoir plus qu’assez des déboires du traversier, qui n’arrivait pas à jouer le rôle pour lequel il avait été acheté, au coût de 148 M$.

La STQ a englouti plus de 200 M$ dans la mésaventure du F.-A.-Gauthier qui a été construit au chantier naval italien Fincantieri. La vérificatrice générale du Québec avait d’ailleurs mentionné dans un rapport publié en 2020 que la STQ n’avait pas les compétences pour mener à bien la construction du navire.

Le navire, qui a été construit en Italie au coût de 170 M$, a été mis hors service durant 13 mois, de décembre 2018 à janvier 2020, ce qui a coûté 22 M$ aux contribuables. 

Avec Johannie Gaudreault 

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