Les Fermières veulent accepter les hommes

Par Marie-Eve Poulin 6:00 AM - 10 novembre 2022
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Des hommes veulent intégrer le Cercle des fermières de Sept-Îles, mais les règles provinciales empêchent leur venue dans le groupe qui célèbre ses 80 ans d’existence et qui souhaiterait évoluer.

À l’ère où les stéréotypes genrés tombent pour laisser place à l’ouverture et l’inclusion, l’adaptation aux nouvelles normes ne semble toutefois pas avoir suivi son cours dans toutes les sphères de la société.
Le Cercle des Fermières qui est la plus grande association féminine québécoise avec plus de 30 000 membres refuse toujours l’intégration des hommes parmi les leurs. Mais, fait un peu contradictoire, les hommes sont acceptés uniquement pour venir réparer le matériel utilisé par les fermières. Ils ne peuvent cependant pas participer aux activités en tant que membre.

La directrice locale, Ginette Giffard, ne comprend pas pourquoi le provincial ne fait pas preuve d’ouverture.

« Je me le demande bien, parce que moi, ça ne me dérangerait pas que des hommes viennent tisser », dit-elle.

« C’est dommage parce que les hommes travaillent très bien. Mais les règles étant ce qu’elles sont, ils ne peuvent pas être membres.»

Sept-Îles fait malgré tout preuve de ‘’souplesse’’ et a déjà accepté un homme qui venait régulièrement tisser avec sa femme.

Mme Giffard se demande pourquoi les règles sont les mêmes que lors de la création de l’association au Québec, en 1915.

« Avec les années, ça aurait dû changer. Mais celles en charge au niveau provincial ne veulent rien savoir », dit-elle, visiblement dans l’incompréhension face à ce refus.

Mme Giffard compte bien poser la question aux autres membres afin de tâter le pouls sur la possibilité d’accepter les hommes parmi les fermières.

Les origines

À la base, la création de l’association était à l’époque où les hommes partaient travailler sur les chantiers et que les femmes restaient à la maison pour s’occuper de la famille.

Elles devaient connaître les méthodes pour coudre des vêtements, fabriquer les couvertures et plein d’autres petites choses nécessaires au fonctionnement quotidien de la maisonnée. Le Cercle des Fermières permettait aussi de briser l’isolement des femmes.

Elle est consciente que la société qui a grandement évolué depuis ne correspond plus au portrait de cette époque et croit que les règles devraient suivre ce changement.

Les femmes se taisent…

L’enseignante à l’Université du Québec à Montréal (UQAM), Yolande Cohen, qui se spécialise en histoire et études féministes, est l’auteure d’un ouvrage portant sur le Cercle des Fermières. Elle a accepté de partager son opinion sur la place des hommes dans les associations féminines.

Yolande Cohen explique que la question de la non-mixité a longuement été débattue par les groupes de femmes, depuis que le féminisme est apparu.

Le principe de la non-mixité a pour objectif de permettre aux femmes d’avoir un espace spécialement dédié à leurs préoccupations et à leur prise de parole.

Elle croit que tant que les femmes ressentent le besoin d’avoir ces espaces non mixtes, c’est le témoignage de la difficulté d’avoir des rapports plus égalitaires avec les hommes, et plus sereins.

« Je respecte tout à fait cette règle, et trouve que lorsque des hommes interviennent, les femmes se taisent la plupart du temps », dit-elle.

« Alors tant que c’est le cas, gardons ces espaces pour les femmes. Quand elles pourront s’exprimer plus librement, alors peut-être pourrons-nous commencer à envisager des espaces mixtes, qui sont par ailleurs le quotidien de toutes les femmes », conclut-elle.

Des femmes chez les Lions

Le Club des Lions créé en 1916 aux États-Unis a interdit pendant près de 70 ans l’acceptation de femmes parmi ses rangs. Plus précisément entre 1919 et 1987.

Du côté de Sept-Îles, Thérèse Laplante a fait son entrée dans l’organisation comme première femme, il y a plus de 25 ans, et ce, à la demande des hommes.

Elle effectue des tâches de type administratives et aime beaucoup participer aux activités de l’organisation.

Présentement, une douzaine de femmes font partie du Club Lions de Sept-Îles.

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