Le maire de Baie-Johan-Beetz se sent abandonné une deuxième fois par le gouvernement

Par Éditions Nordiques 13 août 2013
Temps de lecture :

Le maire de Baie-Johan-Beetz, localité qui a failli partir en fumée à la mi-juillet, accuse le Parti québécois de le laisser tomber une deuxième fois. Un peu plus d’un mois après la tragédie, Martin Côté n’a toujours pas eu d’explications sur l’intervention tardive de la Société de protection de la forêt contre le feu (SOPFEU). De plus, le maire constate l’étendue des dégâts et réalise qu’il ne peut rebâtir l’économie de son village seul.

Afin d’aider le village à se relever, le maire Côté a demandé à la première ministre Pauline Marois un plan de relance totalisant 1,2 million $. Au moment d’écrire ces lignes, Québec n’a toujours pas donné suite à la lettre, expédiée le 26 juillet et pour laquelle le maire n’aurait pas eu d’accusé de réception.

Depuis l’arrivée de Martin Côté à la mairie en 2005, le petit village de 97 âmes de la Minganie a démontré une volonté inégalée de se prendre en main. En 2011 ouvrait la coopérative de solidarité où les gens peuvent aller faire leur épicerie, mettre de l’essence, prendre un café, poster leur lettre et transiger avec les services municipaux. La réalisation de ce projet a mérité le prix Ruralia-Desjardins 2012 et une bourse de 25 000$.

Il y a quelques années, la municipalité décidait aussi d’investir dans l’aménagement de 20 kilomètres de sentiers pédestres afin d’attirer le tourisme. Ces sentiers étaient complétés et ils ont été brûlés par l’incendie qui aurait débuté par la manifestation de la foudre, le 6 juillet dernier. «C’est 200 000$ d’investissement qui ont disparus et qui généraient depuis quelques temps des retombées économiques», indique le maire. De plus, des discussions sérieuses se déroulaient entre différents intervenants de la région pour la création du parc régional du mont Watshishou, mais le territoire de ce dernier fait partie des 60 000 hectares de forêt brûlés.

Tout ça, c’est sans compter la perte de 16 à 24 emplois dans les trois pourvoiries touchées par le drame. De côté-là, le maire parle d’une perte monétaire de plusieurs millions de dollars. Les gens concernés n’ont toujours pas touché un chèque d’assurance-emploi au moment d’écrire ces lignes.

Attitude positive et énergie
M. Côté sollicite dans sa missive à Pauline Marois les services d’un agent de développement, qui serait présent durant trois ans et qui l’aiderait dans sa tâche de reconstruction. Ce dernier serait conjointement rémunéré par la municipalité et par le ministère des Affaires municipales. Le reste de la subvention servirait à financer la création d’entreprises.

Martin Côté explique dans sa lettre qu’il souhaite démarrer des entreprises de la même envergure et de la même qualité que la coopérative de solidarité sociale. «Si on réussit à mettre sur pied trois entreprises qui ont le même dynamisme, on est en voiture», dit-il textuellement à la première ministre. Puisque la municipalité n’a pas eu d’accusé réception de la lettre, elle conclut qu’elle est abandonnée une deuxième fois.

«Il y a eu une catastrophe économique et par nous-mêmes, on n’est pas capable de s’en sortir tout seul. La négligence, ce n’est pas les Baie-johannais qui l’ont commise, c’est le gouvernement. J’espère qu’ils se sentent responsables et qu’ils vont aider à rebâtir la vie économique du village. On a compensé les fermetures du dispensaire et de l’école, il nous arrive encore ça. La bonne volonté on l’a démontré, on va continuer de le faire, mais on a besoin d’aide. Si l’occupation du territoire veut dire quelque chose pour eux, qu’ils le démontre concrètement».

Les projets du maire
Le maire a plusieurs idées en tête pour relancer l’économie. «Comment est-ce que l’on pourrait se réapproprier la forêt? Les morilles de bois ont tendance à pousser dans une forêt brulée, est-ce qu’il n’y aurait pas moyen de commercialiser ce champignon prisé par les chefs?», lance-t-il d’abord.

Exploiter la mer en amassant des algues, développer le tourisme d’hiver avec la motoneige et des sentiers de ski de fond et de raquettes et développer également le tourisme d’été, entre autres, avec des excursions sur les îles granitiques du secteur, font aussi partie des autres scénarios du maire Côté.

La seule réponse que Martin Côté a reçue jusqu’à présent, c’est celle de la direction régionale du ministère des Ressources naturelles (MRN). La directrice, Linda Tremblay. a répondu en date du 1er août à la municipalité que le ministère était désolé de la situation et qu’il était en train d’étudier le dossier. Mme Tremblay rajoute aussi que le MRN répondra le plus rapidement possible à la municipalité. Cette dernière aurait verbalement tenté de rassurer le premier magistrat en lui disant que tous les villages québécois étaient protégés dans un rayon de 25 kilomètres.

«Ce n’est écrit dans aucune loi, ni aucun document, c’est de la bouillie pour les chats», s’indigne M. Côté, qui demande au gouvernement Marois d’arrêter d’accuser à tort la SOPFEU. «Avouez et assumez donc votre erreur, expliquez-nous ce qui s’est passé. Soyez assez honnêtes pour dire que vous l’avez échappé et que vous êtes chanceux qu’il n’y ait pas de morts». M. Côté considère qu’il a laissé assez de chances au gouvernement et qu’il a été bon prince jusqu’à présent. «Mais là, c’est le temps de brasser la cage».

La réponse du cabinet
Du côté du gouvernement Marois, les acteurs principaux sont actuellement en vacances. Seul un attaché politique au cabinet de la première ministre était en mesure de répondre. Julien Lampron confirme que la lettre du maire a été reçue en date du 26 juillet. Il dit que M. Côté aurait eu des accusés de réception vocaux, mais M. Lampron n’en précise pas la provenance. L’attaché politique explique que compte tenu de la période estivale, le délai de traitement est normal.

«Il faut prendre le temps d’étudier la demande», lance-t-il. À ce propos, il reste à coordonner l’information entre les ministères des Affaires municipales et des Ressources naturelles, selon M. Lampron. Ce dernier indique que Martin Côté n’a pas à se sentir rejeté. «On ne l’a pas mis à l’index, on ne l’abandonne pas une deuxième fois, on ne fait pas dans le psychodrame». M. Lampron n’est pas en mesure de dire quand le gouvernement répondra officiellement au maire de Baie-Johan-Beetz.

Photo : L’incendie forestier a laissé aux alentours de Baie-Johan-Beetz un air de désolation. Le maire de l’endroit, Martin Côté, réclame l’aide de Québec afin que le village puisse se relever de cette catastrophe.

Partager cet article