Une ex-escorte septilienne témoigne pour sensibiliser

Par Marie-Eve Poulin 6:00 AM - 24 janvier 2024
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Josyanne Girard Duguay veut aider les jeunes femmes à ne pas tomber dans les pièges du proxénétisme. Photo courtoisie

Une Septilienne de 25 ans témoigne de son vécu dans le monde de la prostitution pour éviter que de jeunes femmes tombent dans les pièges des recruteurs (pimps), qui sont bien présents sur le territoire. 

C’est à l’âge de 18 ans que Josyanne Girard Duguay s’est lancée seule (sans pimp qui contrôle l’argent et la clientèle) dans le monde de la prostitution, en tant qu’escorte. Elle sortait alors de famille d’accueil et était sans ressource. « Malheureusement, quand on sort, on se retrouve seul », dit-elle. Dans cette période de vulnérabilité où tout allait mal dans sa vie, la prostitution lui a semblé être la solution pour survivre. 

À l’âge de 21 ans, après avoir craint pour sa vie plus d’une fois, elle a mis fin à cette vie dangereuse qui « l’a détruite ».

Josyanne Girard Duguay dit, au début, avoir été prise dans le piège de l’argent facile, à un moment où sa vie allait moins bien.

« Je disais toujours ce n’est pas grave, je suis correct. Jusqu’au moment où je me fasse faire des choses que je ne voulais pas. J’ai attendu jusqu’au bout de ma limite », dit-elle. « Ce que je veux expliquer aux autres, c’est que l’important, ce n’est pas l’argent. C’est votre corps. »

Dans les dernières semaines, Josyanne Girard Duguay a publié une vidéo sur ses réseaux sociaux pour raconter son histoire et sensibiliser les jeunes filles aux risques. 

Depuis, elle dit recevoir plusieurs témoignages de filles qui se font approcher par des « recruteurs ». Elle qualifie Sept-Îles de « petit Montréal-Nord ». 

Menaces de mort

Dès ses premiers instants dans le monde de la prostitution, elle dit avoir reçu une foule de menaces de mort, puisqu’elle se lançait seule, chose non appréciée des pimps qui ont le contrôle dans le domaine. 

« J’avais des appels de la prison de Donnacona et de gens à Sept-Îles qui provenaient d’ailleurs. Ils menaçaient de me prendre pour m’apporter à l’extérieur de la région et même de me tuer », raconte-t-elle.

Ils menacent aussi les familles et l’entourage. C’est quelque chose qu’elle ne réalisait pas sur le moment, mais qui était bien réel et dévastateur.

Lorsque tu es avec un client, tu deviens son jouet et impossible de dire non. 

« Même si tu ne veux pas le faire, ils vont te le faire pareil. Ce n’est pas un jeu, vraiment pas. »

Elle raconte avoir été particulièrement marquée par un client armé, lors d’une fin de semaine au Saguenay. 

« Si tu savais tout ce que j’ai vécu. Encore aujourd’hui, j’en rêve et j’en fais des crises de panique », souffle celle pour qui le rétablissement des blessures du passé est chose du quotidien. 

Pièges

Les pimps savent comment s’y prendre pour recruter. Les filles plus vulnérables ne se doutent pas du danger derrière le faux rêve qui leur est proposé. Une seule phrase séduit la jeune « et c’est fini, il est trop tard », elles sont prises au piège.

Selon elle, les lieux de recrutements sont surtout les bars et sur les réseaux sociaux. 

« Ils vont aller vers celles qui semblent aller le plus mal et leur faire croire qu’ils veulent les “sauver”, mais c’est tout à fait le contraire qui se passe. C’est épouvantable ! », dit-elle.

Une autre méthode répandue est la vente du rêve et de la popularité.

« Ils proposent de faire partie d’un vidéoclip et que le voyage sera payé. Mais on sait très bien ce qui se passe rendu là », explique Josyanne Girard Duguay, qui s’est souvent fait approcher de cette manière. Elle ajoute avoir reçu récemment des messages de filles ciblées avec ce stratagème à Sept-Îles et Port-Cartier. 

Un pimp peut aussi utiliser la technique de l’amour en se rapprochant de la fille. Ils sont manipulateurs et patients. Cette étape peut prendre du temps, car ils s’assurent que la jeune soit en amour avec eux, bien aveuglée. Ensuite, c’est là que ça dégringole. La fille doit travailler pour lui et faire ce qui lui est demandé.

« Quand tu es pris là-dedans, tu ne peux plus rien faire. » 

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