Thérapie de couple

Par Emy-Jane Déry 5:00 AM - 6 octobre 2023
Temps de lecture :

Un parc ciblé pour faire des stationnements, les 50 ans du décès du Dr Camille-Marcoux, une enquête ne recommande pas de fouille sur le site de l’ancien pensionnat de Maliotenam, le maire de Sept-Îles démissionne, 29 médecins recherchés sur la Côte-Nord, le lac des Rapides surveillé, 75 emplois créés à Port-Cartier… Je pourrais continuer longtemps. 

Quand je feuillette les archives de nos journaux, je suis presque émotive. Je vois ces histoires qui parlent de vous, de notre milieu, de nos enjeux. Il y a nos joies, nos déceptions, nos malheurs et nos réussites comme Nord-Côtiers, comme Nation innue, comme Septiliens, Baie-Comois, Cayens… Ça défile sous mes yeux. 

Je suis récemment allée fouiller dans les vieux journaux aux Archives nationales de Sept-Îles. Je tournais les pages jaunies du défunt journal L’Avenir de Sept-Îles, à la recherche des événements concernant le Dr Camille-Marcoux. C’était dans le cadre de mes papiers sur les 50 ans de son décès. Ça m’a rappelé l’importance de nos journaux dans le quotidien pour savoir et comprendre, mais aussi, pour se souvenir et préserver notre mémoire collective. 

Je ne vous apprends rien en vous disant que les médias ne l’ont pas facile par les temps qui courent.

Un géant mondial, avec lequel nous entretenions une relation de couple malsaine, vient de nous quitter.

Un géant mondial, avec lequel nous entretenions une relation de couple malsaine, vient de nous quitter. Il nous a mis à la porte, sans prévenir, nous laissant seuls avec le triste constat qu’au fil des années, nous avions mis de côté notre indépendance et notre autonomie pour devenir de plus en plus tributaire de ce partenaire, qui apparaissait si séduisant. Sans qu’on s’en rende compte, il a tissé sa toile et il est devenu le principal porteur de notre voix vers le monde. 

Ce n’est pas rien. 

Il faut maintenant se reconstruire. Regarder de l’avant et « refaire notre vie » avec de nouveaux outils. Il faut apprendre de cette relation toxique et ne pas répéter nos erreurs. 

En ces temps difficiles, notre grand-maman « papier », cette grande alliée qui nous a bercés depuis la naissance, est malade. Elle peine à se déplacer pour porter notre voix. Heureusement, elle a encore plusieurs amis qui sont là pour la soutenir et qui lui restent fidèles, mais on s’inquiète pour elle. On sait qu’elle n’est pas éternelle… et ça fait mal d’y penser.

« Les médias constituent le “quatrième pouvoir”, et agissent comme “chiens de garde de la démocratie”. Leur pluralisme et leur indépendance sont des indicateurs de la santé démocratique d’une société », a dit l’Institut du Nouveau Monde (INM), dans un exercice de dialogue sur le rôle des médias dans la démocratie canadienne.  

Un indicateur de la santé démocratique d’une société… ce n’est pas rien.

Alors quand j’entends ou lis des commentaires injustes, voire méprisants sur le travail des journalistes ou sur celui les médias en général, je suis exaspérée. Le messager à le dos large. Ça a toujours été. Mais on ne s’habitue pas vraiment à ces commentaires généralement basés sur l’ignorance. 

Comme directrice de l’information du seul hebdomadaire couvrant de Pentecôte à Natashquan, je profite donc de cette Semaine nationale des journaux (3 au 9 octobre) pour sensibiliser à notre rôle. 

Non, nous ne cherchons pas à faire sensation. Croyez-moi, ce n’est pas nécessaire d’en ajouter pour être intéressants. Non, nous n’inventons pas des histoires. Croyez-moi, on manque de bras pour toutes les raconter. Non, nous ne diffusons pas des informations sans les vérifier. Croyez-moi, nous avons une éthique de travail pas mal plus complexe que les commentaires sur les réseaux sociaux. 

Oui, nous travaillons tous les jours à débusquer des angles inattendus pour raconter les événements. Oui, nous posons des questions à propos de vos services publics, nous demandons des comptes à vos élus, nous mettons en valeur les projets culturels de chez nous, nous suivons les carrières sportives des talents de la région, nous sommes sur le terrain quand le feu brûle, nous partageons les histoires de ceux qui appellent à l’aide, de ceux qui innovent, de ceux qui entreprennent. 

Oui oui et encore oui. Coupable. « Les maudits médias ». 

Je comprends que c’est parfois confrontant de lire la réalité noire sur blanc. Que parfois, elle est moins belle qu’on le voudrait. Mais que voulez-vous, on ne peut pas la rendre à l’avantage de tous, on a une éthique à suivre 😉 

Bref, lisez-nous, informez-vous, enflammez-vous, nourrissez vos conversations avec nos histoires. C’est là toute notre raison d’être. 

Mais au bout de la ligne, ne tenez pas vos médias pour acquis. N’oubliez pas d’entretenir la relation. Dites-lui que vous l’aimez, en vous abonnant à son infolettre. Achetez-lui de l’espace publicitaire pour l’encourager à continuer. Et si vous vous êtes rendus jusqu’à cette phrase, vous êtes déjà dans le coup, et je vous en remercie ! 

Partager cet article