Une première cuvée d’amaretto à Chute-aux-Outardes

Par Charlotte Paquet 3:00 PM - 15 novembre 2022
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Jean-Simon Hovington, Éric Belzile, Robert Tremblay, Yannick Bourgeois et Jean-Philippe Ouellet avaient raison de sourire, jeudi matin, avec la fabrication de leur première cuvée d’amaretto au sorbier d’Amérique, une petite cuvée bonne pour 500 litres ou 750 bouteilles.

Jeudi matin, à la distillerie Québec North Shore à Chute-aux-Outardes, on a sablé le champagne à coups de gorgées d’amaretto à l’occasion de la toute première cuvée du goûteux et unique liquide ambré fait de sorbier d’Amérique, plus connu du nom de cormier.

Quatre longues années après les balbutiements du projet, Jean-Philippe Ouellet, Jean-Simon Hovington et Robert Tremblay, les trois associés du départ, et Yannick Bourgeois et Éric Belzile, qui se sont greffés au trio l’an passé, ont sorti de l’une de leurs deux cuves 500 litres d’Amy, du nom de l’épouse du colonel Robert Rutherford McCormick, fondateur de la Québec North Shore Paper. C’est donc 750 bouteilles qui seront disponibles.

« On se sent euphoriques. C’est un rêve qui chemine », souligne Robert Tremblay, distillateur en chef. « On est vraiment heureux. On est enthousiastes et on voit aussi qu’on a le vent dans les voiles, il y a une belle réponse au niveau de la population », renchérit Jean-Simon Hovington.

Cette belle réponse, elle s’est concrétisée par la vente rapide de 250 ensembles-cadeaux pour Noël comprenant une carte donnant droit à une bouteille d’amaretto et des objets promotionnels aux couleurs de la distillerie.

Dans les faits, la distillerie attend l’approbation de la Société des alcools du Québec (SAQ), une formalité, pour pouvoir vendre son produit. Sa boutique devrait être prête pour le 15 décembre, mais l’aval pourrait venir après, au plus tard le 20 janvier 2023.

Dès l’approbation, la fabrication de l’amaretto se fera à grande échelle, c’est-à-dire 5 000 bouteilles par cuvée. Les associés ont l’intention de créer une demande au Québec afin d’être dans le plus grand nombre possible de SAQ.

« C’est un produit unique aux notes que tu n’auras jamais goûté de ta vie ailleurs. C’est vraiment un dessert. C’est un dessert nord-côtier sous forme d’alcool », lance M. Ouellet, en faisant référence à la liqueur à 27 % de taux d’alcool.

L’unique sorbier

La distillerie Québec North Shore se démarque effectivement dans le monde entier avec son amaretto au sorbier d’Amérique. Les recherches réalisées par Jean-Philippe Ouellet lui ont permis de découvrir un seul pays, l’Autriche, où le fruit rouge est utilisé pour produire un alcool, soit un schnaps.

« Ce qui est intéressant avec ça, c’est de créer une valeur à un fruit qu’on a en énorme quantité sur la Côte-Nord, auquel personne ne touche, on est capable de créer quelque chose d’excellent avec ça, on crée une valeur à ça, une demande », fait remarquer Jean-Simon Hovington.

D’ici l’été prochain, la distillerie doit produire une vodka du nom de Volka, un clin d’œil amusant à la déformation du mot vodka par plusieurs personnes. « On va leur donner raison », s’esclaffe M. Ouellet.
Les compères espèrent sortir leurs deux rhums à temps pour la période de la chasse 2023, soit rhum aux camerises et un autre aux épices boréales. Ils seront cependant exempts de sorbier, tout comme leur vodka.

Le petit fruit se retrouvera toutefois dans le whisky de glace qui devrait être sur le marché dans cinq ans. L’expression de glace fait référence au fait que le sorbier est cueilli après une première gelée. Tout comme les deux rhums, ce whisky passera par une salle de vieillissement aménagée dans l’ancienne centrale Outardes 1.

Près de 1 M$

Le projet de la distillerie Québec North Shore représente un budget de près de 1 M$. Les cinq partenaires ont investi 250 000 $ de leurs poches et plusieurs bailleurs de fonds y ont contribué. On peut penser à la corporation Innovation et Développement Manicouagan et à la Société du Plan Nord, entre autres.

Le Centre d’expérimentation et de développement en forêt boréale du cégep de Baie-Comeau est également un partenaire de premier plan aux promoteurs.

Le CEDFOB, un précieux partenaire

La distillerie Québec North Shore a trouvé un allié crucial dans le Centre d’expérimentation et de développement en forêt boréale (CEDFOB) du cégep de Baie-Comeau, par l’entremise de sa filière de valorisation des petits fruits nordiques de la Côte-Nord.

Le chercheur Gabriel Fortin, du Centre d’expérimentation et de développement en forêt boréal du cégep de Baie-Comeau, a participé de très près à la création de la recette d’amaretto et des autres alcools dans la mire de la distillerie Québec North Shore.

« Ça fait deux ans et demi qu’on travaille ensemble à les accompagner, à élaborer la recette », explique le chercheur Gabriel Fortin, sur place à la distillerie de Chute-aux-Outardes pour la première cuvée d’amaretto, jeudi, afin de s’assurer que tout se passe bien.

Depuis l’arrivée du CEDFOB dans l’aventure, des innombrables tests ont été réalisés aux laboratoires du cégep avec des nanocuvées, parfois même de 100 ml à peine. « Depuis deux ans et demi, pratiquement chaque semaine, on se rencontre, on discute de ce qu’on veut, de l’alignement pour les produits. Ensuite, nous de notre côté, on s’en va en laboratoire. On fait des macérations, on fait vieillir, on fait des filtrations », souligne M. Fortin.

Des dégustations sont ensuite organisées afin d’évaluer les produits. « On peaufine les recettes. (…) On a travaillé sur le whisky, on a travaillé sur l’amaretto, on a travaillé sur les rhums, on a travaillé sur les vodkas », poursuit le chercheur.

Si la recette de l’amaretto est « cannée », celles des rhums et de la vodka sont également prêtes. « Le whisky, on a bien travaillé dessus, mais il reste du travail à faire », concède l’homme.

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