Denys Arcand recrute à Uashat

Par Alexandre Caputo 3:52 PM - 8 novembre 2022 Initiative de journalisme local
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Réal Junior Leblanc en compagnie de Denys Arcand. Photo courtoisie

Après avoir fait pleurer la femme de Denys Arcand avec son plus récent film, un Innu de Uashat vient de passer deux mois en stage avec le réalisateur québécois oscarisé.

C’est la directrice générale de Wapikoni Mobile, Véronique Rankin, qui a présenté le court-métrage L’enfance déracinée, de Réal Junior Leblanc, à Mme Denise Robert, productrice et compagne de M. Arcand. À cette époque, elle était à la recherche d’un stagiaire pour la production d’une nouvelle œuvre de fiction.

Ce projet, qui met la table pour la prochaine réalisation du cinéaste sur les pensionnats autochtones, a profondément touché Mme Robert.

« Mme Robert a beaucoup pleuré en regardant ce projet », mentionne le réalisateur de 39 ans. « Elle a reconnu le sérieux et l’émotion que je mets sur mon travail, en plus d’avoir beaucoup de vécu à partager », explique-t-il.

« Je suis parti de ma communauté à 16 ans, j’étais très influençable et je voulais m’éloigner des problèmes que ça pouvait me causer », partage-t-il, en avouant avoir déjà eu des problèmes d’alcool et de toxicomanie.

Le natif de Uashat mak Mani-utenam a dû s’adapter à son nouvel environnement, lui qui était loin d’être habitué au traitement de vedette qu’on lui réservait.

« Je partageais un chauffeur privé avec des comédiens que j’ai admiré toute ma vie, on s’occupait de mes repas, même de mon café! », dit-il, en avouant s’être senti mal à l’aise les premières journées.

Réal Junior Leblanc a donc passé deux mois intenses à apprendre des meilleurs.

Ce fut une expérience aussi enrichissante qu’impressionnante, selon lui.

« J’ai tellement appris! », se réjouit-il. « Denys m’a beaucoup conseillé, tant sur les relations avec les comédiens que sur des points techniques comme les prises de vues lors du tournage d’une fiction », précise-t-il.

En plus d’avoir eu la chance d’échanger avec ses idoles et d’apprendre d’un maître de la réalisation, Réal Junior a également pu se familiariser avec les différents corps de métier se trouvant sur un plateau de tournage.

« J’étais habitué à des plateaux de cinq ou six personnes. Là, nous étions près de 80, des gens occupaient des postes que je ne connaissais même pas », explique-t-il.

Une « mission »

Le prochain court-métrage du réalisateur aura pour thème les enfants disparus victimes des pensionnats.

Le projet, attendu pour janvier, mettra à l’avant-plan des communautés autochtones de partout au pays.

« Je vais commencer à Vancouver pour terminer à Uashat mak Mani-utenam », précise-t-il. « Je veux changer le monde à ma façon et donner une voix aux communautés », ajoute-t-il.

Il y a fort à parier que ce projet connaîtra du succès, puisqu’en plus de son talent et de sa passion, Réal Junior a su se faire apprécier de ses collègues lors de son stage, alors qu’il a amené sa touche humoristique sur le plateau.

« C’était trop sérieux à mon goût ce plateau-là » plaisante-t-il. « Mes collègues m’ont apprécié, je parlais avec tout le monde, je m’intéressais à tout. Je me suis fait de très bons contacts pour mon prochain projet », se réjouit-il, sans vendre la mèche sur ses futures collaborations.

Des débuts modestes

C’est par pur hasard que le réalisateur innu a fait ses premiers pas en cinéma, alors que l’organisme Wapikoni Mobile, qui s’implique dans le développement de contenu audiovisuel avec les membres des Premiers Peuples, est débarqué à Uashat mak Mani-utenam, en 2010.

« Il n’y avait pas beaucoup de travail sur la communauté à ce moment-là », explique-t-il. « J’ai donc accepté un emploi comme coordonnateur terrain pour Wapikoni Mobile. Je guidais les équipes de réalisation sur la communauté et je leur présentais les membres importants. »

De fil en aiguille, Réal Junior Leblanc a commencé à s’impliquer dans la réalisation de courts-métrages, jusqu’à ce qu’on lui offre l’opportunité de créer sa propre œuvre, gracieuseté de Mme Rankin.

Il n’a pas laissé passer l’opportunité. Son premier projet, Nanameshkueu, Tremblement de terre en français, fut sélectionné au Festival Présence autochtone de Montréal, en 2011.

Les œuvres de Réal Junior Leblanc sont disponibles sur Youtube et Vimeo.

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