Un lendemain de veille difficile

Par Réjean Porlier 4:00 PM - 13 octobre 2022
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Malgré ce qu’on nous annonçait comme une formalité pour la CAQ et qui s’est plutôt avéré être un raz-de-marée…sauf à Montréal, plusieurs éléments de la soirée électorale méritent qu’on s’y arrête. Il y a ce que les chefs en ont dit, alors que tour à tour ils discouraient de façon triomphale et il y a cette réalité qui le lendemain les rattrapait.

Un seul avait réellement de quoi pavoiser à la sortie de l’élection et c’est François Legault qui, s’il avait tenu ce discours inspiré plus tôt dans la campagne, aurait raflé sans le moindre doute, une centaine de comtés.

Tout à coup inclusif et rassembleur, il tenait des propos face aux immigrés qui détonnaient d’une campagne médiocre où malhabilement, il brisait des ponts avec ceux-ci. Malgré qu’il discourût sur la priorité que doit être l’éducation, personne ne s’en étonnera, le mot d’ordre était plutôt l’économie, répétant à qui voulait l’entendre son éternel refrain sur la création de la richesse.

Et cette richesse passera vraisemblablement par de grands chantiers pour augmenter la capacité énergétique du Québec. Pour que ses projets de barrages soient mieux acceptés, il jouera la carte du partenariat avec les autochtones, histoire de dédouaner ses grandes ambitions sur le Nitassinan.

Lorsqu’on parle d’inclure davantage le privé dans les grandes missions de l’état, il faudra rester vigilant sur le partage de cette nouvelle richesse ainsi créée. Qui se sera réellement enrichi et l’universalité aux soins de santé et à l’éducation sera-t-elle préservée ou assisterons-nous à l’élargissement du fossé entre les classes?

Là où il y a de la richesse, ils s’en trouvent pour la convoiter.

Je ne peux passer sous silence que cette vague caquiste a aussi emportée avec elle les deux comtés de la Côte-Nord et de façon sans équivoque.

Mes félicitations aux deux nouveaux députés qui, malgré qu’ils soient du côté du pouvoir, auront fort à faire pour que soit entendue la voix de la Côte-Nord, alors que chaque membre de cette énorme délégation caquiste voudra d’abord faire entendre ses propres enjeux.

Une chose est sûre, nous serons à même de constater l’impact de ce changement. On nous a tellement répété l’effet paralysant d’une représentation dans l’opposition, l’avenir nous appartient désormais… à suivre!

Moi, ce qui attirera mon attention au cours des prochains quatre ans, ce sera la mise en place ou non d’une stratégie sérieuse et rigoureuse pour renverser la tendance démographique inquiétante des dernières années. Une création de richesse qui miserait sur l’exploitation des ressources naturelles de la Côte-Nord et qui continuerait de faire la promotion du « fly-in/fly-out » signifierait pour ma part une déconnexion des enjeux nord-côtiers et l’agonie programmée de notre région.

Maintenant au pouvoir, à quand le pont et l’achèvement de la 138? Sortirons-nous enfin de ces interminables études? Pour ce qui est de l’aviation où le Premier Ministre nie toujours l’existence d’un sérieux problème et ne voit pas l’importance d’une saine concurrence, comme partout ailleurs, aussi bien s’y résigner, la solution ne viendra pas de Québec, du moins, pas tant que les familles des ministres ne vivront pas ce que nos familles vivent continuellement… l’abandon!

Au lendemain de l’élection, le réveil a sans doute été plus brutal, voire douloureux pour les quatre autres chefs de parti.

QS a appris à la dure que le Québec n’était pas prêt à souffrir pour passer à l’ère des changements climatiques. En période électorale, l’imaginaire prend beaucoup de place et François Legault a bien joué la carte du populiste en opposant création de la richesse et ce qu’il appelait la « taxe orange » de QS. Personne n’est contre la vertu, mais le portefeuille gagne toujours.

Paul St-Pierre Plamondon qui de loin a été celui que les québécois auraient hissé au rang de chef d’état, n’a pas sauvé les meubles, il a sauvé sa peau et vu son équipe plonger à trois députés. Catastrophique pour un parti qui a marqué le Québec et l’a fait sortir de la grande noirceur. Nul doute que le 3 octobre, il avait l’impression d’y replonger, même à 15% du vote.

La fin de parcours maladroite de l’équipe Legault/Boulet a permis à Dominique Anglade, elle, de sauver les meubles et éviter le pire à ce parti moribond qui a perdu contact avec le Québec francophone.

Quant à Éric Duhaime et ses troupes conservatrices qui auront réussi à fédérer 13% de la grogne québécoise, ils se réveillent tout de même sans un seul député à l’Assemblée Nationale, de quoi jubiler?

À moins d’une performance épouvantable au cours des prochaines quatre années, il y a de fortes chances que le scénario du 3 octobre dernier se répète à quelques reprises si le mode de scrutin demeure le même, alors pourquoi la CAQ changerait-elle une formule gagnante?

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