Le manque de civisme met l’industrie de la motoneige en péril

Par Steeve Paradis 2:00 PM - 23 février 2021
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Il est maintenant urgent pour les motoneigistes de respecter les sentiers balisés et les terrains privés, prévient la Fédération des clubs de motoneigistes du Québec. C’est l’avenir de l’industrie qui est en jeu.

On dit souvent que tous les membres d’un groupe doivent payer les pots cassés entraînés par le comportement délinquant de certains. C’est exactement ce qui risque de se passer dans l’industrie de la motoneige, si les choses ne s’améliorent pas rapidement.

À chaque année, les médias rapportent des sorties publiques de propriétaires de terres privées ou d’agriculteurs, qui se plaignent des motoneigistes qui circulent hors-piste, sans égard pour ce qui se trouve sous la neige. Cette année, avec le manque de neige, c’est encore pire.

« Les motoneigistes qui sortent des sentiers peuvent passer dans des bleuetières ou des plantations d’arbres et brisent les plants en raison du manque de neige », a lancé, dans un cri du cœur, l’administrateur régional de la Fédération des clubs de motoneigistes du Québec (FCMQ), Daniel Jean.

« Ces comportements mettent toute une industrie en péril. La motoneige, ça représente 10 M$ en retombées économiques sur la Côte-Nord. Et en plus, si on brise des plants de bleuets ou des têtes de sapin, ça met d’autres emplois à risque », a-t-il ajouté.

M. Jean fait valoir qu’au Québec, plus de 50 % des 33 000 kilomètres de sentiers de motoneige se trouvent sur des terrains privés. Si ces propriétaires décident de retirer les droits de passage sur leurs terres, l’industrie de la motoneige en sera lourdement affectée.

« À l’UPA (Union des producteurs agricoles), ils ne sont pas contents et si ça continue comme ça, ils vont nous retirer nos droits d’accès. Il faut remettre rapidement les pendules à l’heure. Motoneigistes, restez dans les sentiers », enchaîne le porte-parole.

Voilà pourquoi la FCMQ et l’UPA mènent présentement une campagne conjointe de sensibilisation sur l’importance de respecter les terres de ceux et celles qui permettent la pratique de la motoneige.

Compromettre la relation

« Les agriculteurs qui accordent un droit de passage sur leurs terres le font pour rendre service à la communauté. Ils contribuent aussi, du même coup, au développement économique. Le fait que de plus en plus de motoneigistes ne respectent pas les sentiers et circulent sur les terres sans autorisation pourrait toutefois compromettre leur bonne relation avec les clubs de motoneiges, ce qui rendrait beaucoup plus difficile la pratique de ce loisir », a d’ailleurs prévenu le président général de l’UPA, Marcel Groleau, sur le site web de l’organisme.

« En fait, l’UPA nous a carrément avertis », répète Daniel Jean, dont l’organisation représente 5 000 motoneigistes et 14 clubs sur la Côte-Nord. « Si on perd les droits de passage sur les terres privées, ce serait carrément catastrophique pour notre industrie. »

Dans la région, il y a peut-être moins de terrains privés que dans d’autres endroits au Québec, mais il y en a tout de même et ils sont indispensables pour accéder à certains secteurs. « Dans la Manicouagan, par exemple, on doit passer sur des terrains privés pour se rendre à Pointe-Lebel ou à Pointe-aux-Outardes », a-t-il soutenu.

D’ailleurs, il y a à peine un mois, la municipalité de Pointe-aux-Outardes a fait une sortie publique pour rappeler aux motoneigistes l’importance du civisme et le respect des sentiers balisés, car les débordements devenaient un peu trop fréquents.

Plusieurs patrouilleurs

Daniel Jean, qui au passage refuse d’accuser une catégorie ou l’autre de motoneigistes, indique que la FCMQ « a des patrouilleurs en masse dans les sentiers, mais ils ne peuvent pas être partout à la fois. Et surtout, ils ne voient pas ceux qui sont hors-piste car ils restent dans la trail ».

Rappelons justement que le manque de civisme a déjà entraîné la perte d’un important sentier de motoneige, soit le tronçon de la poste Trans-Québec 3 qui passait sur le territoire de Pessamit. La communauté innue a mis fin au droit de passage, car elle recevait de plus en plus de plaintes de ses membres à propos du comportement délinquant de certains motoneigistes.

Reconnaissant que Pessamit est tout à fait dans son droit de prendre une telle décision, Daniel Jean fait valoir que la pandémie modère un peu les effets négatifs de cette fermeture, qui pourrait être encore plus nuisible en temps normal.

« La COVID fait comme aider un peu dans ce dossier. Ça ne crie pas trop du côté des motoneigistes car de toute façon, on ne peut pas circuler d’une région à l’autre », conclut-il.

Soulignons en terminant que la FCMQ étudie présentement un sentier qui contournerait la communauté de Pessamit. Elle a d’ailleurs fait une demande financière en ce sens auprès du ministère des Transports.