Enquête nationale sur les femmes autochtones : Michèle Audette songe à démissionner

Par Mathieu Morasse 5 juin 2018
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Enquête nationale sur les femmes autochtones

Michèle Audette.

La Commissaire Michèle Audette remet en question sa participation à l’Enquête nationale sur les femmes autochtones. Sa déclaration fait suite à la décision du gouvernement fédéral de prolonger le mandat de l’enquête de seulement 6 mois, plutôt que de deux ans tel que demandé.

La commission d’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées (FFADA) a pour mandat de se pencher sur les causes systémiques de toutes les formes de violence à l’égard des femmes et des filles autochtones. Elle doit en faire rapport au gouvernement fédéral.

La ministre fédérale des Affaires autochtones et du Nord Canada, Carolyn Bennett, a annoncé mardi sa décision de prolonger l’enquête de 6 mois. Les commissaires avaient demandé une prolongation de deux ans. La date limite pour le dépôt du rapport final, qui était fixée au 1er novembre 2018, a été reportée au 30 avril 2019.

La commissaire en chef, Marion Buller, est assistée par trois commissaires. Michèle Audette, originaire de Mani-Utenam, est l’une d’entre elles. Les quatre commissaires ont exprimé leur «profonde déception» façon à la décision de la ministre.

Michèle Audette a aussi publié une courte déclaration personnelle dans laquelle elle dit être «habitée par un sentiment d’incompréhension et de profonde déception».

«Mes pensées sont tournées vers les membres des familles, les survivantes de violence et les esprits des êtres chers alors que je considère que le Gouvernement du Canada vient de les laisser tomber une fois de plus…», peut-on y lire.

«Je m’accorde les prochaines semaines pour réfléchir, analyser la décision, émettre mon opinion personnelle et valider ma future participation aux travaux de l’Enquête nationale», a-t-elle ajouté.

Chercher l’équilibre

Dans leur demande de prolongation datée du 6 mars, les commissaires demandaient également une rallonge budgétaire pouvant aller jusqu’à 50 M$. Ils estimaient cette demande nécessaire pour effectuer une «collecte de données exhaustives et approfondies essentielles à la réalisation de [leur] mandat».

Dans sa décision, Carolyn Bennett indique que le report de la date de présentation du rapport final permettra aux commissaires de prolonger les audiences jusqu’en décembre 2018.

«Cette démarche tient compte du fait que d’autres survivantes et membres de familles souhaitent raconter leur vécu, tout en reconnaissant le caractère urgent, pour le gouvernement, que revêt la présentation de recommandations concrètes par la Commission», a justifié la ministre.

Les commissaires estiment plutôt que la décision de la ministre «nuira à la cause».

«Lorsque nous avons demandé une prolongation de deux ans, nous cherchions un équilibre entre l’urgence de remédier à cette tragédie et la nécessité de faire le travail correctement. L’annonce d’aujourd’hui nous porte à croire que des considérations politiques l’ont emporté […]», a déclaré la commissaire en chef Buller.

«Le nouvel échéancier limite fortement la capacité de l’Enquête nationale de collaborer adéquatement avec les femmes et les filles autochtones […]. L’Enquête nationale ne sera pas en mesure de mener des audiences institutionnelles ou des audiences d’experts et de Gardiens du savoir régionales, qui auraient permis une analyse régionale de ces enjeux», a affirmé la commissaire Qajaq Robinson.

Le commissaire Brian Eyofson fait remarquer que le mandat est «très vaste» en ce qu’il concerne les services policiers, les systèmes de justice et les services sociaux.

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