Industrie minière: À l’aube de la révolution 4.0

Par Fanny Lévesque 11 février 2017
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Le président-directeur général de l’Institut national des mines du Québec, Robert Marquis, a présenté une conférence à Sept-Îles sur l’arrivée de la révolution 4.0 dans le secteur minier.

La révolution industrielle 4.0 est à nos portes, croit le président-directeur général de l’Institut national des mines du Québec (INMQ), Robert Marquis. «On ne parle pas d’une bébelle que veut (vous) vendre un fournisseur», illustre-t-il. «On parle d’un changement fondamental, qui va demander d’établir de nouvelles pratiques.»

Invité de la Chambre de commerce de Sept-Îles mardi, le PDG a fait le topo des avancées technologiques qui bouleversent le monde minier traditionnel. Des mines autonomes, des centres de contrôle à distance, de la collecte de données en temps réel, des camions sans chauffeur, la «quatrième révolution» ne semble pas avoir de limites.

«L’objectif est toujours d’accroitre la productivité, de réduire les risques. Ce que sous-entend la mine du futur, c’est d’augmenter la profitabilité», indique-t-il. Et ce sont les Australiens «les leaders» dans le domaine pour l’heure. En 2015, Rio Tinto avait déjà trois mines de fer complètement autonomes sur le continent australien, cite M. Marquis.

«Tous leurs équipements mobiles autonomes, en opération 24 heures par jour, sept jours par semaine, sont opérés à partir d’un centre de contrôle, où il y avait à ce moment-là, 400 employés, situé à 1000 kilomètres de la zone minière», poursuit-il. «Sur une même mine, il y avait sept foreuses complètement autonomes».

Rio Tinto opère 15 mines de fer en Australie pour produire quelque 250 millions de tonnes par année, ce qui n’est d’aucune commune mesure avec ses activités au Québec. C’est ArcelorMittal qui produit le plus de fer dans la province, mais sa production est en grande partie destinée à alimenter ses propres aciéries. «On ne peut pas le comparer à Vale par exemple, c’est plus un métallurgiste plutôt qu’un producteur de fer. On ne compare pas des pommes avec des oranges», souligne-t-il.

«Allumés» dans le secteur aurifère

C’est chez les producteurs aurifères que la province, qui compte entre 10 et 12 mines d’or, pour la plupart souterraines, pourrait se démarquer, selon M. Marquis. «(Les producteurs d’or) sont allumés dans le domaine parce que l’extraction est en profondeur. Il n’y a pas de mine au Canada plus profonde que trois kilomètres. Ce n’est parce qu’il n’y plus de minerai en dessous (…) Amener un travailleur à trois kilomètres de profondeur (…) ce n’est pas rentable», explique le PDG.

Mais l’arrivée d’équipements autonomes pourrait permettre d’aller plus creux. Comme elle pourrait aussi permettre de refaire revivre d’anciens gisements miniers. «On le sait qu’il y a des mines qui ont été fermées, pas parce qu’il ne restait plus de minerai, mais parce qu’on était allé au bout de nos techniques de l’époque», soulève M. Marquis.

La société Falco Ressources cherche même à rouvrir la mine Horne, «la mine fondatrice de l’Abitibi», exploitée pendant 70 ans, d’ici 2020. «Je vous garantis que ça va être la mine la plus automatisée ça (…) C’est demain alors oui, ça (la révolution) va venir au Québec, pas juste en Australie», affirme-t-il.

Des défis pour l’emploi

Selon l’INMQ, de 30à 50% des emplois actuels de l’industrie «seraient automatisés» d’ici 10 à 20 ans. «On va avoir des emplois qui vont se mettre à changer, à évoluer. Des professions vont se transformer, d’autres vont disparaitre, mais il va en avoir des nouvelles aussi», d’où l’importance pour le milieu de l’éducation de rester à l’affût, dit-il, citant notamment que le Cégep de Sept-Îles est avant-gardiste dans le domaine.

«Le premier qui m’a parlé du concept 4.0, c’est Donald Bherer (directeur général)», concède-t-il. «Il faut maintenir cette synergie entre l’éducation et l’entreprise. «Faut se mettre en mode changement à Sept-Îles. Vous avez un port de mer qui va rester, des acquis considérables, un savoir-faire, mais redressez-vous les manches parce que ça va bouger.»

Est-ce que la mine du futur sera synonyme de pertes d’emploi? «À une mine donnée oui, estime M. Marquis. Mais si je prolonge la durée de vie d’une mine de 20 ans, est-ce que je ne viens pas de maintenir 500 ou 800 emplois? (…) Si on se met à ouvrir des mines à des endroits où on n’aurait pas pu avant, alors on ne parlera pas de pertes, mais de gains. On ne sait pas».

Chose certaine, le PDG est d’avis que le Québec doit se mettre en mode action, entre autres, en formation pour accueillir la révolution 4.0 parce que le défi est humain derrière la technologie, dit-il. «Vous aurez beau avoir des équipements performants, si vos employés ne veulent pas les utiliser, ça va rester une mine bien équipée, mais mal utilisée. C’est le nerf de la guerre».

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