Le Nord pour se rapprocher des Autochtones

Par Fanny Lévesque 14 septembre 2016
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Sept heures tapant, rendez-vous à la gare ferroviaire de transport Tshiuetin. Un petit groupe de vingtenaires attendent, un brin fébriles, le départ pour Schefferville. De là-bas, ils s’envoleront 250 kilomètres plus au haut, direction le camp innu Mushuau-nipi où ils espèrent trouver le nord.

Le nord oui, mais surtout se rapprocher de ceux qui l’habitent, les Autochtones. Les six jeunes séduits par l’aventure vivront une immersion totale dans la culture innue de Matimekush Lac-John en séjournant sur les terres ancestrales, le Nitassinan, en pleine toundra, près de la passe migratoire du caribou de la rivière George.

«On a tous super hâte quand on pense à ce qui s’en vient», s’exclame Anne-Sara Briand, étudiante en médecine, tout juste avant l’embarquement. Elle et une camarade débarquent de Montréal, une autre de Joliette. Guillaume Sirois, étudiant en droit, lui vient de Gatineau. Ils ont rejoint Cédric Gauthier et Jonathan St-Onge, Innus de la Côte-Nord.

«On cherche à les outiller, les sensibiliser à la fois sur les enjeux de la réconciliation et sur l’importance du territoire, de sa protection», explique Alice de Swarte, de la Société pour la Nature et les Parcs du Canada (SNAP), partenaire de la corporation du Mushuau-nipi, qui organise des séminaires jeunesse au camp traditionnel.

C’est également la SNAP qui sélectionne les participants, identifiés comme de «jeunes leaders». Les intéressés devaient convaincre les organisateurs de leur motivation et surtout, s’engager à devenir des ambassadeurs du changement. «L’idée, c’est qu’ils prennent des initiatives dans leur milieu ensuite», ajoute Mme de Swarte.

Ouvrir le dialogue

«C’est le dialogue interculturel que je cherche à approfondir», confie Catherine Desjardins, animatrice en francisation avec les immigrants et dont le père a des origines malécites. «Comment on peut faire pour être plus proches à travers nos différences? J’espère trouver des clés pour y arriver», poursuit-elle.

Le rapprochement entre les peuples sera d’ailleurs au centre de leur périple de six jours. «Ça va se faire beaucoup par expériences», résume Mme de Swarte, qui accompagne la délégation. Cueillette, pêche et préparation des repas selon le mode traditionnel sont au programme. Discussions autour «du rôle de chacun» et du partage sont aussi à prévoir.

Sur place, aînés et membres de la communauté de Matimekush Lac-John attendent l’arrivée des jeunes. La commissaire de l’enquête nationale sur les femmes autochtones disparues et assassinées au pays, Michèle Audette, une habituée de l’endroit, sera aussi du nombre pour échanger avec les participants.

Jonathan St-Onge de Mani-Utenam espère quant à lui, renforcer son attachement profond à sa culture. «C’est la première fois que je vais aller aussi loin dans le bois, mes ancêtres ont fait du portage là-bas, ça va m’aider. (La culture) se perd dans les communautés près des villes», déplore-t-il. «Je veux redonner le goût du bois à mes amis».

Une visite à la mine de Tata Steel Minerals Canada et des communautés de Matimekush Lac-John et de Kawawachikamach complèteront leur séjour nordique. «J’ai hâte de découvrir le mélange entre les modes de vie traditionnelle et moderne», exprime pour sa part, Patricia Ho-yi Wang, étudiante en communications.

À l’aube de leur immersion, les jeunes participants sont déjà bien au fait des réalités des Premières Nations. «On est conscient du gouffre qui existe, de ce que nos ancêtres ont pu faire», rappelle Anne-Sara Briand. «Mais avec tout ce qui ressort dans les médias, au niveau de la réconciliation par exemple, ça donne envie de faire un pas vers eux.»

Un pas qui s’emboite avant même le grand départ. Avant de monter dans le train, le hasard les mène à la rencontre du chef d’Ekuanitshit (Mingan), Jean-Charles Piétacho, qui part lui aussi pour Schefferville. «Vous viendrez goûter à du castor pendant le voyage», lance-t-il au groupe. Une invitation qui n’a pas tardé à se faire accepter…

 

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