Une classe d’été sur les réalités autochtones

Par Jacob Buisson 2:29 PM - 25 juillet 2024 Initiative de journalisme local
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Photo Érika Laurendeau Echavarria

Les étudiants en journalisme et Ken Rock, directeur général de la Société de développement économique de Uashat mak Mani-utenam, en avant au centre.

Douze étudiants et étudiantes en journalisme passent deux semaines à Sept-Îles et Uashat mak Mani-utenam, pour en apprendre plus sur les enjeux autochtones, avec plusieurs personnes de renom.

“ Aujourd’hui, on parle du développement économique, hier on parlait de l’enquête sur les femmes et filles autochtones disparues et assassinées. La première journée [lundi], on avait la lieutenante-gouverneure du Québec et ancienne Cheffe de Gaspegiag [Manon Jeannotte] ”, a relaté Tomy Tanguay, un des membres de la classe en journalisme, rencontré mercredi dernier.

Ce jour-là, Ken Rock, directeur général de la Société de développement économique de Uashat mak Mani-utenam, expliquait la situation économique de sa communauté. 

Jeudi, Ghislain Picard, chef de l’Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador, parle d’autonomie gouvernementale et de relation entre les Premières Nations et les gouvernements. 

Et ça continuera comme ça jusqu’au 3 août, pour la classe qui est composée de personnes issues de l’UQAM et du cégep de Jonquière. Elle recevra aussi des enseignements sur la médecine traditionnelle, les pensionnats autochtones, la santé mentale en communauté et la connexion spirituelle à la rivière Moisie.

Manque de connaissances

Leur enseignant, Guy Bois, était, jusqu’à récemment chef de pupitre à l’Espace autochtone de Radio-Canada. Il a participé à la création de cette branche de Radio-Canada en 2016, car il était “ le moins pire en termes de connaissances sur les autochtones ”, dénote-t-il en riant. Il a déjà fait des reportages chez les Innus et les Atikamekw.

Il a pu constater le manque de connaissances sur les enjeux autochtones, chez plusieurs journalistes.

“ Je recevais des journalistes établies qui mélangeaient Innus et Inuit et qui ne savaient même pas qu’il y avait onze nations autochtones au Québec”, a-t-il dit.  

Ainsi, l’école d’été a pour objectif de “ mieux desservir les populations autochtones, mais aussi, l’ensemble de la population du Québec, parce que les enjeux autochtones touchent l’ensemble de la société québécoise ”, souligne-t-il.

Il donne en exemple de l’électricité. Qu’elle soit de source hydraulique ou éolienne, ses infrastructures sont sur des territoires autochtones.

“ Il n’y a plus une seule compagnie qui entre [dans le territoire] sans leur consentement. Ça ne veut pas dire que les Autochtones sont contre le développement économique. Ils veulent juste lancer le message : on est chez nous, on veut être maîtres chez nous”, illustre Guy Bois. “ Ça ressemble drôlement à la souveraineté-association de René Lévesque ”, mentionne-t-il. 

L’enseignant veut rétablir les faits sur l’histoire coloniale au Québec, pour faire comprendre les réactions actuelles des nations autochtones. “ Qu’est-ce que fait le colonialisme ? D’abord, il s’empare de ton territoire. Puis, il t’expulse. Ensuite, il ajoute l’appareil idéologique : écoles, curés, pensionnats ”, signale M. Bois. 

Enseigner leurs réalités

Avant de l’expliquer à toute la population, l’enseignant se concentre sur les futurs journalistes. À l’école d’été, « on est ici pour apprendre à mieux faire notre métier. […] La méconnaissance du milieu journalistique des enjeux autochtones faisait en sorte qu’on se réfugiait tout le temps dans une couverture de faits divers », souligne Guy Bois, qui a 40 ans d’expérience en journalisme. « Très souvent, des Autochtones me disaient : allez-vous arrêter de faire des reportages sur les Autochtones ? Vous n’êtes pas capables de faire des reportages avec les Autochtones ».

La Commission de vérité et réconciliation a appelé les universités à adapter leurs programmes, pour enseigner les réalités autochtones. L’UQAM entame ce chemin vers le rapprochement des peuples. 

M. Bois ne veut pas prendre tout le mérite pour l’initiative. « Le maître d’œuvre de cette école d’été, c’est l’Institut Tshakapesh ».

L’Institut a comme objectif de préserver et de faire rayonner le patrimoine culturel innu.