La menace de bris de service plane toujours sur des CPE de la Côte-Nord
Photo Pixabay
Le CPE de Longue-Pointe-de-Mingan est désespérément à la recherche d’une éducatrice et pourrait se retrouver dans l’obligation de fermer ses portes à un groupe d’enfants.
« Des CV d’éducatrices qualifiées, ça fait 10 ans que je n’en ai pas vu », souffle Nadia Ziat, directrice générale des CPE de Havre-Saint-Pierre et de Longue-Pointe-de-Mingan.
Les rentrées se suivent et se ressemblent au CPE Aux Mille surprises. Pour bien desservir l’installation de Longue-Pointe-de-Mingan, il faut cinq éducatrices. La semaine dernière, il en manquait deux.
Certaines journées, il a fallu demander aux parents qui le pouvaient de garder leurs enfants avec eux, car il n’y avait pas suffisamment d’éducatrices pour ouvrir les trois groupes que compte le CPE.
« Une chance que les parents sont très compréhensifs, j’ai eu beaucoup d’absences, ce qui a permis d’offrir le service pour ceux qui ne pouvaient pas s’absenter », a indiqué Mme Ziat.
Depuis, une embauche a été effectuée, mais il manque toujours une perle rare pour assurer le bon fonctionnement des lieux.
L’an dernier, à pareille date, le CPE était confronté à la même réalité. Il recherchait du personnel, craignant de ne pas pouvoir offrir le service aux 21 enfants fréquentant l’établissement.
Manque de reconnaissance
Si on a amplement parlé de la situation critique des enseignants au Québec dans les derniers jours, le cas des éducatrices en CPE a fait couler, lui, bien peu d’encre.
« Oubliés, ça fait longtemps que nous sommes oubliés je dirais. Je ne pense pas que dans la société, on donne à la profession d’éducatrice la place qui lui revient », déplore la gestionnaire. « Le monde continue de voir en une éducatrice une simple gardienne et ne comprend pas nécessairement les revendications qu’il y a en arrière », poursuit-elle.
Dans la dernière année, le CPE avait réussi à embaucher trois nouvelles personnes, mais elles ont déclaré forfait.
« Il y en a qui s’essaye et qui voit que le bon côté des choses : on joue avec les enfants. Mais ce n’est pas que ça. Quand elles comprennent les enjeux, la charge de travail, les exigences, c’est une autre affaire. »
L’aspect région éloignée ajoute un défi supplémentaire au contexte de recrutement, selon Mme Ziat.
Les salaires d’éducatrices ne sont pas assez costauds pour compétitionner avec les gros employeurs avoisinants.
Le CPE a notamment perdu des employés au détriment des écoles.
« Depuis quelques années, je me sens comme un tremplin vers le réseau scolaire », illustre Mme Ziat. « Elles [les éducatrices] rentrent chez nous, se forment, on met de l’énergie à leur apprendre la profession, mais ça fly ensuite pour le réseau scolaire. Je n’en veux pas aux écoles, mais elles sont chanceuses, elles ont de meilleures conditions. »
Pour aider à faire face à cette réalité, les CPE de la Côte-Nord demandent depuis longtemps d’avoir droit à un statut spécial, qui permettrait de donner des primes d’éloignement aux éducatrices.
« J’aimerais qu’on ait le même traitement que le réseau scolaire et qu’on reçoive les primes d’éloignement, ça ferait une grande différence dans le recrutement, j’en suis certaine », dit Mme Ziat.
Heures réduites
Pour l’instant, le CPE Aux Milles surprises doit réduire ses heures d’ouverture.
« La situation est très fragile, j’y vais à la semaine », dit Nadia Ziat.
Plutôt que d’ouvrir de 7 h à 18 h, du lundi au vendredi, l’installation ouvre de 7 h 30 à 17 h. Cette modification à l’horaire peut représenter un bon casse-tête pour les parents de Longue-Pointe-de-Mingan qui travaillent à Havre-Saint-Pierre et qui doivent faire environ 40 minutes de route matin et soir, souligne Mme Ziat.
La situation du CPE qui compte un groupe de poupons et deux multiâges est critique.
« Dès qu’une personne s’absente pour une raison quelconque, oui, le spectre du bris de service est très proche », dit la directrice.
De plus en plus fréquent
Cet hiver, le CPE La Giroflée de Forestville craignait aussi devoir fermer un groupe, en raison du manque de personnel. Le CPE metuetau de Uashat a également été confronté à la même problématique dernièrement.
« Ça se voit de plus en plus dans la région », confirme pour sa part, Odette Lavigne, directrice du Regroupement des CPE de la Côte-Nord.
Elle espère que le projet de service de remplacement d’éducatrices sur la Côte-Nord, qui a obtenu un financement de 50 000 $ de Québec dans les dernières semaines, viendra soulager la situation.
Il vise à mettre sur pied une liste d’éducatrices provenant de partout au Québec, qui pourraient être appelées à venir en renfort dans la région. Leurs frais de déplacements et de logements seraient couverts.
« Les gens qu’on avait à recruter ici, on les a recrutés », souligne-t-elle.
Mme Lavigne espère que le projet pourra démarrer d’ici janvier.
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