Le manque de soins inquiète à Natashquan

Par Vincent Rioux-Berrouard 7:00 AM - 19 octobre 2022
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CLSC de Natashquan. Photo CISSS de la Côte-Nord

Les ruptures de services s’enchaînent aux CLSC de Natashquan, depuis quelques mois maintenant. Des résidents et leurs familles s’inquiètent des conséquences que pourraient entraîner le fait de ne pas être soignés dans des délais normaux.

C’est notamment le cas pour Sophie Landry. Bien que cette Natashquanaise d’origine ne réside plus dans ce village de la Minganie, c’est plutôt pour ses parents, qui y sont toujours, qu’elle s’inquiète. Elle rappelle que la population est de plus en plus vieillissante à Natashquan et elle a l’impression que les risques de ne pas être soignés à temps augmentent avec le fait qu’il manque souvent une infirmière au CLSC.

Depuis la mi-août, le CLSC de Natashquan a été fermé à cinq reprises. Chaque fermeture dure quelques jours.

« Le fait que les fermetures s’accumulent, c’est vraiment inquiétant considérant qu’un CLSC devrait être un service de base. Tout le monde devrait y avoir accès, peu importe la situation géographique », souligne Mme Landry.

Elle ajoute qu’elle a l’impression que c’est l’ensemble des services des soins de santé qui se sont dégradés pour les résidents de Natashquan, dans les dernières années.

Son père, Pierre Landry, a eu besoin d’une ambulance l’été dernier. Il présentait des symptômes qui laissaient croire à une crise cardiaque. Sophie Landry a donc appelé le 911 pour obtenir l’assistance des ambulanciers.

« Au téléphone, on me disait que la situation était grave et qu’un transport était nécessaire, mais que la seule ambulance disponible était à Havre-Saint-Pierre. On nous a demandé d’attendre et ça a été deux longues heures terribles avant que les ambulanciers arrivent », raconte Sophie Landry.

Son père s’en est finalement bien tiré.

Par contre, cet épisode a forcé une réflexion au sein de la famille, à savoir s’il ne serait pas préférable pour ses parents de quitter ce petit village pour aller dans un endroit où les soins de santé seront à proximité.
L’inquiétude concernant les soins de santé à Natashquan est partagée par des résidents.

Pauline Dupuis, y habite depuis 40 ans. Pour elle, obtenir des soins est devenu plus difficile. Elle se rappelle qu’il y a déjà eu une époque où il y avait un infirmier qui était de garde 24h sur 24.

« Ça doit être inquiétant pour les personnes âgées, mais même si on est encore jeune comme moi, si on se blesse gravement, on a besoin de soins », dit Mme Dupuis.

Une autre résidente, Monique Hounsell, qui a passé toute sa vie à Natashquan, appuie les propos de Mme Dupuis sur le fait que les services semblent avoir diminué avec les années.

« C’est loin d’être idéale la situation du dispensaire, parce qu’il faut faire une demi-heure de route pour se rendre à un autre dispensaire. C’est inquiétant, c’est certain », dit-elle.

Réaction du CISSS

Concernant les coupures de services, le CISSS de la Côte-Nord rappelle que comme le reste du Québec, il doit composer avec une pénurie de personnel en soins infirmiers.

« Dans les CLSC (dispensaires), une ou deux infirmières offrent les services. Ainsi, lorsqu’une personne doit s’absenter parfois pour des raisons imprévues (ex. maladie), il est difficile de trouver une personne pour la remplacer », explique le porte-parole du CISSS de la Côte-Nord, Pascal Paradis.

L’organisation affirme tout de même effectuer des démarches pour trouver le personnel nécessaire et avoir recours à du personnel d’agence.

« Toutefois, il arrive que nous ne soyons pas en mesure de trouver les ressources pour assurer le service forçant la fermeture temporaire de l’installation. Dans ces circonstances, nous nous assurons qu’une infirmière d’un autre CLSC soit de garde et que la population puisse recevoir des services, au besoin, dans un CLSC d’une localité voisine », indique M. Paradis.

Le CISSS de la Côte-Nord espère que la mise en place d’un plan d’intervention conjoint avec le SIISNEQ favorisera l’attraction et la rétention de la main-d’œuvre en soins infirmiers. Les deux organisations travaillent à trouver des solutions qui passeraient notamment par la conciliation travail-famille.

Le problème du recrutement dans les CLSC de la Minganie, comme celui de Natashquan, est bien connu, selon la présidente du Syndicat des intervenantes et intervenants de la santé du Nord-Est québécois, Nathalie Savard. L’organisation travaille à la recherche de solutions avec le CISSS de la Côte-Nord.

« On discute avec le CISSS pour peut-être mettre en place des projets-pilotes qui probablement nous aideraient à attirer des gens à venir travailler dans ces secteurs », déclare Mme Savard.

Le maire de Natashquan, Henri Wapistan, n’a pas répondu à nos demandes d’entrevues.

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