Un projet de navire ravitailleur d’ammoniac vert à Sept-Îles

Par Vincent Rioux-Berrouard 1:30 PM - 26 février 2024
Temps de lecture :

Simulation visuelle du navire ravitailleur de TEAL dans la baie de Sept-Îles. Photo courtoisie

Ayant déjà dans ses plans de construire une usine d’hydrogène et d’ammoniac vert à Sept-Îles, TEAL Chimie & Énergie inc. veut aussi offrir un service de ravitaillement pour les navires.

L’entreprise veut avoir un navire ravitailleur qui aurait pour quai d’attache Sept-Îles. Il parcourait le fleuve Saint-Laurent entre Gaspé et Montréal, pour fournir en ammoniac vert les navires. Le ravitaillement se ferait sur le fleuve directement. Cela permettrait d’éviter les frais encourus lorsqu’un navire est à quai et rendrait l’option plus intéressante pour certains armateurs. 

Jonathan Martel, président et directeur général de TEAL, affirme que cette idée s’inscrit dans un contexte d’effort mondial pour la réduction des gaz à effets de serre.

Le secteur du transport maritime est concerné. La plupart des navires utilisent du combustible lourd comme du bunker. Le tout est très polluant en CO2. Présentement, de plus en plus d’armateurs font des changements, pour rendre leurs flottes moins polluantes.

« On voit vraiment une accélération des annonces et des initiatives des joueurs de l’industrie maritime pour des navires avec des moteurs qui pourraient fonctionner à l’ammoniac (…) Donc, on veut envoyer comme signal qu’on a un projet dans le Saint-Laurent et qu’on va pouvoir les ravitailler », affirme M. Martel.

Il ajoute que la voie maritime du Saint-Laurent est un couloir où il y a beaucoup de trafic. Cela rend le site de Sept-Îles très intéressant pour ce type de projet.

« La baie de Sept-Îles offre un havre protégé des intempéries pour les navires.  Donc un navire pourrait venir se ravitailler dans un endroit sécuritaire comme la baie, donc c’est intéressant », dit-il.

Selon les professeurs émérites Claude Comtois et Brian Slack, de l’Université de Montréal, qui mènent l’étude Corridor maritime vert, il y a un potentiel de marché important pour l’alimentation en carburant vert des navires empruntant le Saint-Laurent. Un volume de près de 200 000 tonnes de combustibles pétroliers est actuellement vendu annuellement aux armateurs, lors de leur passage au Québec.

Photo courtoisie

Le bloc d’énergie

Pour que le projet de navire ravitailleur puisse aller de l’avant, il faut bien sûr que l’usine d’hydrogène et d’ammoniac vert, annoncée en 2022, soit mise en place. C’est dans le secteur de Pointe-Noire que Teal veut s’installer.

Pour que cela puisse se produire, l’entreprise doit obtenir un bloc d’énergie de la part d’Hydro-Québec. En 2022, elle souhaitait acquérir de la part de la société d’État une alimentation de 550 MW. À la suite de discussions, on a fait savoir à l’entreprise qu’une telle quantité d’énergie n’était pas envisageable pour Hydro-Québec. TEAL est retournée à la table à dessin pour trouver une solution.

La demande a été réduite auprès de la société d’État à 40 MW ferme. Jonathan Martel affirme que l’usine d’hydrogène doit toujours être en fonction, ce qui explique cette demande. Pour combler le manque à gagner, l’entreprise veut aller vers l’autoproduction pour 400 MW. Cette production est le double du projet éolien Apuiat. L’énergie éolienne et l’énergie solaire sont présentement envisagées.

Le projet d’usine est évalué à 1,5 milliard et le navire ravitailleur à environ 120 millions. Pour ce qui est du parc éolien et/ou solaire qui devrait être à proximité de Sept-Îles, le coût est encore à évaluer, mais il s’agit de plusieurs centaines de millions, si ce n’est pas dans le milliard de dollars.

Pour l’échéancier du projet, un début de construction est souhaité pour 2027 et le lancement des opérations pour la fin 2028, ou début 2029. Bien que ce projet puisse sembler encore loin, M. Martel indique que d’un point de vue industriel, il s’agit d’un très court délai.

Plusieurs gros projets à Sept-Îles

Le projet de TEAL n’est pas le seul qui s’intéresse à Sept-Îles comme destination potentielle. Il y a déjà H2 Green Steel, avec son aciérie verte, ainsi que Métaux Torngat qui veut installer une raffinerie pour traiter les terres rares à Sept-Îles. Cette accumulation de projets majeurs pour la ville de Sept-Îles ne compromet pas l’usine d’hydrogène et d’ammoniac vert, croit Jonathan Martel.

« On pense qu’il y a de la place pour tous ses projets », commente-t-il. Il ajoute qu’il s’agit de projets différents et qu’il n’y a pas de compétitions entre eux.

Pour lui, une usine d’hydrogène vert à Sept-Îles a du sens. La présence d’usines, liées à l’industrie minière sur la Côte-Nord, qui se servent de bunker lourd et qui pourraient se servir d’hydrogène vert pour réduire leurs émissions justifie le tout.

Partager cet article