Partir accoucher, et revenir les mains vides

Par Karine Lachance 7:15 AM - 15 octobre 2019
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Marilyn Dufresne et Catherine Boisvert se sont fait tatouer une pensée en l’honneur de leur petit Charles Henry, décédé tout juste avant sa naissance.

La venue d’un enfant est, pour la majorité des gens, la journée la plus belle de leur vie. Pour Catherine Boisvert et sa conjointe Marilyn Dufresne, ce moment supposé magique s’est avéré être leur pire cauchemar. Elles se relèvent tranquillement, comme elles le peuvent, du décès de leur enfant, à 38 semaines de grossesse.

Catherine et sa conjointe Marilyn adorent les enfants et rêvent d’une belle grande famille. En juillet 2018, elles ont eu le premier garçon William, qui est âgé d’un peu plus d’un an aujourd’hui. Grâce à lui, elles ont découvert ce véritable amour inconditionnel et indescriptible que seul un enfant peut faire vivre.

« On l’aime tellement, à un point tel qu’on se demande comment on va faire pour aimer un autre être humain autant que ça », partage Catherine Boisvert, qui est éducatrice en Centre de la petite enfance (CPE).

Rapidement, Catherine et Marilyn ont décidé d’avoir un deuxième enfant, et leur projet a fonctionné du premier coup. Mme Boisvert vivait une grossesse facile et heureuse, sans aucune complication apparente. À son échographie de 20 semaines, le petit Charles Henry semblait en bonne santé et rien ne laissait présager le drame qui allait se produire quelques temps après.

« Ma grossesse se déroulait parfaitement. Mes suivis avec le médecin se passaient très bien, ma hauteur utérine suivait sa courbe normale, rien ne semblait clocher », se rappelle la dame.

Le 21 juillet 2019, Catherine s’est présentée à la maternité de l’hôpital de Sept-Îles, car elle avait des contractions depuis quelques heures déjà. Elle était à 38 semaines de grossesse et était enfin sur le point de rencontrer ce petit être qui avait cohabité avec elle durant ces derniers mois.

Une fin inconcevable

Arrivée à la maternité, Catherine a été prise en charge par l’équipe d’infirmières et de médecins. Machinalement, et comme à l’habitude, ils ont installé la dame dans un lit pour écouter le cœur du bébé, mais ils ne le trouvaient pas. Plusieurs personnes ont tenté de trouver ce petit son, comparable à un cheval qui court dans les champs, mais en vain.

« Ils ont essayé plusieurs machines, pensant que les autres ne fonctionnaient pas. C’est une échographie qui a confirmé que le cœur de Charles Henry s’était arrêté », partage la dame avec beaucoup de tristesse.

Le petit homme de 38 semaines était décédé et Catherine devait tout de même le mettre au monde. Ce moment qui devrait être magique et merveilleux est devenu son pire cauchemar. La femme a accouché de son enfant décédé, détruite et complètement ravagée par les sentiments négatifs et l’anxiété.

« Ils nous ont donné le choix de voir notre enfant ou pas. Nous avons accepté de le voir et nous avons passé deux heures avec lui dans nos bras », se souvient-elle.

Le petit Charles Henry était magnifique, avait tous ses membres et avait cette pureté que seul un nouveau-né dégage, mais son cœur ne battait plus. Catherine et Marilyn ont eu leur enfant avec elles seulement deux heures, et elles ne le reprendront plus jamais dans leurs bras.

« C’est inconcevable et inacceptable. Il était si beau et parfait, je ne pouvais pas croire que je retournerais à la maison sans mon bébé », exprime la maman.

Le deuil d’un enfant est quelque chose de douloureux, d’inhumain, mais surtout, que personne ne voudrait avoir à vivre. Dès qu’il commence à grandir à l’intérieur du corps de la maman, la connexion et l’amour grandissent au fil des jours. Catherine passe par toute la gamme des émotions, se demandant qu’est-ce qu’elle a bien pu faire de mal pour que ce drame arrive. Elle n’en veut pas à personne, excepté à elle-même, repassant sa grossesse et son accouchement constamment dans sa tête.

« Pourquoi c’est arrivé? Pourquoi je ne me suis pas rendue compte qu’il ne bougeait plus? Qu’est-ce que j’aurais pu faire de plus? », se questionne Catherine sans arrêt.

Trouver une raison pour continuer de vivre

Lentement, Catherine et Marilyn recommencent à sourire à la vie. Elles le font surtout pour le petit William, qui lui est bien vivant et a besoin de ses deux mamans. Catherine adore la photo et a décidé de devenir photographe pour la fondation Portraits d’Étincelles, qui accompagne les parents vivant un deuil périnatal, en leur offrant gratuitement des photographies professionnelles de leur enfant.

« Je me dis que je pourrai peut-être apporter un peu de douceur à ces parents qui vivront la même chose que moi. Ce seront à jamais les seules photos qu’ils auront de leur enfant », ajoute-t-elle.

Catherine et Marilyn progressent, à leur rythme, à travers les étapes douloureuses du deuil. Une journée, elles sont en colère, l’autre, dans la culpabilité, mais elles continuent d’avancer, se donnant à nouveau le droit d’être heureuses et d’accomplir leurs rêves.

Le 15 octobre, c’est la Journée mondiale de sensibilisation au deuil périnatal. L’organisme À la Source de Sept-Îles tient à offrir un moment aux familles endeuillées, à la Chapelle du Vieux-Poste. Les personnes présentes pourront allumer une bougie, en l’honneur de ces petits anges partis beaucoup trop tôt. L’invitation est lancée pour 18 h.

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