La flamme s’est éteinte pour Jean-Charles Piétacho

Par Éditions Nordiques 1 novembre 2011
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Une page d’histoire se tourne à Ekuanitshit (Mingan). Chef du Conseil des Innus de Ekuanitshit depuis 1991, après une quinzaine d’années à la direction générale, Jean-Charles Piétacho présente sa démission. Une récente pétition exigeant de voir les rapports financiers et 5000$ à tous les membres a été la goutte qui a fait déborder le verre.

Le Chef de Ekuanitshit préparait déjà son départ, lui qui ne croyait pas se représenter aux prochaines élections prévues dans deux ans, mais les récents évènements ont littéralement éteint sa flamme, soutient-il. «Je suis triste, mais serein. J’ai le sentiment du devoir accompli. C’est la décision de ma vie.» Jean-Charles Piétacho précise qu’il n’en tient pas rigueur aux signataires de la pétition. Selon lui, les initiateurs promettaient de belles choses et les induisaient en erreur. Mais la blessure demeure profonde.

«Il y a tout un historique derrière ma démission, explique M. Piétacho. J’avais déjà eu des intentions de quitter il y a cinq ans. En 2003, ils avaient bloqué l’accès aux bureaux du conseil pendant que je participais à une cérémonie pour mon père à Québec. J’avais dû revenir d’urgence. Il faut respecter les institutions.» Cette fois-là, c’était aussi pour avoir un accès aux états financiers. On accusait aussi le conseil de favoritisme. Le Chef affirme avoir mis en place des protocoles nécessaires. Les récents évènements ont, pour lui, fait déborder le vase.

Un non catégorique
La pétition déposée au Conseil demande de voir les rapports financiers de la communauté et 5000$ pour tous les membres. Jean-Charles Piétacho ne comprend pas les demandes de ses concitoyens. «Ils pensent qu’on fait des profits mirobolants avec nos entreprises. Et l’entente avec Hydro-Québec, c’est une société parallèle qui gère ça et tout a été donné. Les entreprises sont gérées par la Société de gestion Ekuanitshinnuat (SGE). Les états financiers ont été présentés en mars 2011, ils ont été diffusés dans le journal et sont disponibles.»

Toutefois, pour le Chef, il y a une question de principe qui prévaut. «Même si on avait des millions, il faut investir et développer. On ne peut pas toujours donner de l’argent. Un des jeunes hommes qui a participé à la manifestation en 2003 a même dit aux gens de retourner aux études ou d’aller travailler pour avoir de l’argent.» L’actuel Chef a accepté de présenter les livres, le 10 novembre prochain, mais refuse de verser les 5000$ aux 550 membres de la communauté. «J’offre plutôt ma démission.»

Cœur toujours à Mingan
Techniquement, rien n’est prévu dans la constitution du Conseil des Innus de Ekuanitshit pour la démission du Chef. «Légalement, je suis Chef jusqu’aux prochaines élections dans deux ans. Je vais faire le minimum, mais mon cœur n’y est plus.» Même scénario pour le vice-Chef, Bernard Lafontaine, qui a également présenté sa démission par solidarité.

Jean-Claude Piétacho confie partir la tête haute, particulièrement fier du développement de la communauté, des infrastructures mises en place, de la mobilisation pour une paix sociale, de la prévention du suicide, du développement d’entreprise comme celle d’hélicoptères. «On a fait de grandes choses pour une communauté de 550 personnes.»

Si la flamme politique est bel et bien éteinte, son cœur demeure à Mingan. «Je vais demeurer à Ekuanitshit et je vais continuer à travailler pour que la communauté soit un modèle. Je vais être disponible pour les prochains élus s’ils ont des questions, s’ils veulent des conseils. Mais je vais mettre moins d’énergie et penser plus à moi. C’est le temps de passer le flambeau, même si le mien est éteint…»

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