Baleine échouée aux Îles de Mai : tuée suite à une collision ?

Par Jean-Christophe Beaulieu 19 septembre 2018
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Le 11 septembre, ce rorqual a été retrouvé dans la Baie des Îles de Mai.

Les trois dernières années ont été exceptionnelles pour l’observation de baleines dans la région. Mais avec la circulation importante des navires, les risques de collision s‘accentuent, selon l’observateur de mammifères marins Jacques Gélineau. Il croit que c’est ce qui s’est produit le 11 septembre, alors qu’un rorqual a été retrouvé dans la Baie des Îles de Mai.

Depuis 2016, les baleines semblent être en bon nombre dans la région de Sept-Îles et Port-Cartier. C’est ce que le chercheur Jacques Gélineau, associé pour l’été aux Croisières du capitaine, a observé.

«D’après les recherches que j’ai faites en mer, ils se nourrissent principalement d’euphoside (krill). C’est la base de leur alimentation et c’est une espèce très présente dans la région», note-t-il.

Diplômé de l’École des pêches du Québec comme observateur de mammifères marins, Jacques Gélineau est associé à la Station de recherche des Îles de Mingan depuis 1988. C’est d’ailleurs lui qui est à l’origine de la base de données des mammifères marins pour la région, depuis 1997.

«La distribution des animaux change et chaque espèce a sa propre façon de pêcher. Les petits rorquals vont coller le long de la côte pour chasser le capelan. Les rorquals communs et à bosses, eux, se retrouvent entre six et dix milles de la côte en juin. L’automne, il y a une éclosion du plancton. Les baleines en profitent et se retrouvent plus près de la côte», explique-t-il.

Heurté par un navire ?

La forte densité d’activité maritime pourrait toutefois être à l’origine de certaines carcasses retrouvées sur les berges. Concernant celle du rorqual commun retrouvée aux Îles de Mai, il indique avoir observé «trois lacérations distancées à peu près également». De près de deux pieds de long, les blessures pourraient avoir été causées par des pales de gros navires.

«Ce n’est pas nouveau de voir des animaux qui se font tuer par collisions. Les blessures par pales de propulseurs sont habituellement mortelles. Avec l’augmentation de tonnage d’ArcelorMittal et le nombre de bateaux qui passe ici, ce n’est pas étonnant que ça arrive. En plus, la région est gorgée de baleines en ce moment.»

Coordination des acteurs locaux

Les Îles de Mai sont près du couloir de navigation que les bateaux d’Arcelor, IOC et Alouette empruntent. Avec les données qu’il compile depuis trois ans, Jacques Gélineau croit avoir une solution pour amenuiser les risques de collision. Il soutient que d’aménager des zones volontaires de réduction de vitesse, un peu comme pour la baleine noire, serait l’idéal.

«Mais de le faire dans les zones très précises. Ça serait plus efficace pour la productivité d’une compagnie, que de se faire imposer des zones mur à mur. Ça permettrait aux entreprises qui voudraient s’engager dans le processus de donner des ordres de direction aux bateaux qui pénètrent dans telle ou telle zone», avance-t-il.

Le Port de Sept-Îles «sensible»

Le Port de Sept-Îles se dit également sensible aux mammifères marins. Selon le PDG, Pierre D. Gagnon, les recherches de Jacques Gélineau ont une valeur importante à ce niveau.

«Ça permet de nous renseigner sur nos écosystèmes et ce sont des données importantes pour nous éclairer sur les mesures à adopter pour préserver les mammifères marins. Si des informations indiquent qu’il commence à y avoir plus de baleines, il va falloir poser des gestes», convient-il.

Sur la côte ouest, à Vancouver, des mesures de contrôle de vitesse ont d’ailleurs été déployées pour protéger le rorqual. M. Gagnon dit vouloir aller dans le même sens.

«On a eu des discussions avec Pêches et Océans Canada pour se doter d’une gestion au niveau du ralentissement des navires, d’une démarche volontaire pour que les risques de collisions soient minimisés», affirme le PDG du Port de Sept-Îles.

Pour Jacques Gélineau, c’est un plan coordonné avec tous les acteurs qui devrait être mis en place.

«Je crois qu’en collaboration avec les minières, l’aluminerie et le Port, on devrait faire un plan coordonné. On a toutes les données nécessaires et on serait en mesure de faire une gestion responsable de la circulation des grands navires.»

 

 

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