Routes d’Artistes fête dix ans de musique nomade grâce à Sept-Îles

Alice Young 9:36 AM - 10 juin 2025
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L'autrice-compositrice-interprète Sandra Contour à l'auberge Le Tangon le 29 mai 2025. Photo Fany Rousse

Est-ce que Route d’Artistes aurait existé s’il n’y avait pas eu ces trois spectacles à Sept-Îles en 2008? « Non, je ne pense pas. J’ai vu l’impact que ça a eu sur le public et sur l’artiste », confie la fondatrice Fany Rousse, qui a souligné les dix ans du projet à l’auberge Le Tangon, fin mai.

Août 2008. Fany Rousse travaille à l’auberge de jeunesse Le Tangon aux côtés de l’ancienne propriétaire Brigitte Lemay. Son amie musicienne Ève Cournoyer vient de recevoir un refus de financement public pour son album. Pour l’aider à retrouver un peu de sous, la jeune femme originaire de Joliette organise une mini tournée à Sept-Îles.

Sans expérience, mais avec beaucoup d’audace, elle coordonne trois soirées musicales au Edgar, au Pub St-Marc et au Tangon. 

« Ils ne la connaissaient pas beaucoup, mais les gens ont vraiment aimé Ève. Elle a vendu plein d’albums », raconte Fany Rousse.

Les Septiliens en ont redemandé : « C’est quand que tu fais venir d’autres artistes ? »

Sans même s’en rendre compte, elle venait de tester la formule de Route d’Artistes : faire découvrir des artistes émergents méconnus aux régions du Québec, dans des décors intimistes et chaleureux.

Inspirée par cet exil sur la Côte-Nord, Ève Cournoyer a ensuite écrit la chanson Sept-Îles qui louange la lenteur et la solidarité du territoire avec poésie.

« Fany m’invite à fuir Montréal/ Découvrir le lointain littoral », y chante-t-elle. 

L’autrice-compositrice-interprète Sandra Cotour a repris cette ode, le 29 mai dernier, lors de sa performance à l’auberge Le Tangon, dans le cadre du circuit Route d’Artistes 2025. Le public du salon s’est ajouté au refrain dans un élan de nostalgie collective. » C’était super touchant, je les ai écoutés avec les yeux pleins d’eau », confie la directrice du diffuseur nomade.

En 2012, Ève Cournoyer s’est enlevé la vie à Montréal, quelques jours après la sortie de son quatrième album. C’est dans les années qui suivirent son décès que la mélomane s’est officiellement lancée sur la route du Québec, avec de nouveaux artistes émergents chaque année.

Au total, Fany Rousse aura fait découvrir plus d’une vingtaine d’artistes dans des salles modestes, mais propices à la connexion humaine. Saratoga, Jérôme Cinquante, Émile Bourgeault, nombreux sont ceux qui ont connu la 138 grâce à elle.

« Pour moi, ça a autant de sens de faire un spectacle devant 35 personnes, que devant 5000 », affirme-t-elle.

Fany Rousse salue les Septiliens qui prennent le « risque » de s’asseoir devant la relève musicale chaque année. « À Sept-Îles, on est hyper bien accueillis. Les gens me font confiance. Même s’ils ne connaissent pas les artistes, ils viennent tout le temps. »

L’année dernière, elle s’est rendu jusqu’à Magpie avec le jeune musicien Émile Bourgeault. Après le spectacle à l’église Saint-Octave, les Nord-Côtiers ont demandé de garder la salle ouverte pour « mettre de la musique et danser ».

« Ils avaient besoin de se rassembler et d’avoir un événement culturel », raconte-t-elle, en insistant sur le mot « besoin ».

Pour la suite, Route d’Artistes mène une campagne de sociofinancement pour inclure davantage et gratuitement les aînées du Québec dans ses événements.

« [J’ai aimé] le sentiment d’être loin, mais d’être proche en même temps de la nature, du vrai », se souvient Fany Rousse, à propos de l’époque où elle habitait à Sept-Îles.

Fany Rousse (en bas à gauche) accompagnée de Michel-Olivier Gasse et Chantal Archambault du groupe Saratoga, de Brigitte Lemay et de Catherine Arsenault en 2015 à l’auberge Le Tangon. Photo Fany Rousse