Chronique de Réjean Porlier ǀ Histoire de pont

Par Réjean Porlier 5:00 AM - 5 mai 2025 ex-maire de Sept-Îles
Temps de lecture :

Photo archives

Dans l’espace d’environ un mois, deux évènements ont marqué l’actualité et on devrait s’assurer qu’ils résonnent bien fort dans la tête des Nord-Côtiers, histoire de bien se préparer pour la suite des choses.

Le 26 mars dernier à l’Assemblée nationale, une résolution déposée sans préavis par le député Péquiste Joël Arseneault et portant sur la construction d’un pont pour relier Tadoussac à Baie-Sainte-Catherine a été adoptée à l’unanimité. Elle se lisait comme suit : « Que l’Assemblée nationale reconnaisse que la Côte-Nord est géographiquement enclavée et que la construction d’un pont est nécessaire pour son désenclavement ».  

Le terme à l’unanimité a toutes les raisons d’être écrit en gras et si cette résolution est symbolique, elle fait en sorte que les grands débats sur la pertinence, ou non, de sortir la Côte-Nord de son enclavement doivent prendre fin. À partir de maintenant, la seule question, concernant le pont, qui doit être portée par notre région, celle de Charlevoix et tous nos porte-voix, est : quand l’appel de projets sera-t-il lancé ?

En fait, le député péquiste demandait de rendre publics les résultats de l’étude d’opportunité lancée par le gouvernement en mars 2020 (sic ! Il y a 5 ans de cela). Entendons-nous bien ; cette étude est la dernière d’une longue série et il n’est pas question qu’on nous suggère ne serait-ce que par un moment d’égarement, qu’il en faille une autre, car je serai le premier à réclamer que toute la Côte-Nord monte à Québec. L’épisode des études pour gagner du temps… c’est terminé !

L’autre évènement, il se déroulait le 29 avril dernier, alors que la ministre des Transports, Geneviève Guilbault, dévoilait publiquement les grandes lignes de l’étude d’opportunité remise au gouvernement : choix du tracé, coût du projet évalué à 4,2 milliards $. Si quelques-uns l’ont sûrement pensé, personne de la classe politique n’a osé dire que c’était trop d’argent pour la Côte-Nord. La ministre a même qualifié le projet de « bon projet ».

Est-ce que la Coalition Union 138 serait parvenue, à force de pédagogie auprès des élus, à leur faire accepter l’idée qu’un désenclavement de la Côte-Nord, c’est bon pour tout le Québec ?

Attention de ne pas prendre pour acquise cette sympathie soudaine pour un enjeu que la région porte depuis de nombreuses décennies. Il vient de s’écouler 5 ans pour simplement compléter les études. Mais prenons-le pour ce que c’est : un signe encourageant et l’aboutissement d’une étape importante. Fini les études ! D’autant plus que cette dernière aura ratissé on ne peut plus large, touchant l’ensemble des aspects techniques du projet, mais s’intéressant aussi aux impacts socioéconomiques de celui-ci.

Des impacts positifs souhaités par l’ensemble des Nord-Côtiers, mais plus sensibles pour les habitants de Tadoussac et Baie-Sainte-Catherine. Il a toujours été question, pour le comité de liaison, que les préoccupations de ces deux municipalités soient prises en compte, d’où sans doute le choix de trajet. 

J’entends d’ici les critiques de mon ami Pierre Breton de la Société du Pont sur le Saguenay, qui doit une fois de plus ruminer l’histoire dans sa tête. Pierre, qui a visité de nombreux ouvrages dans le monde pour s’en inspirer et documenter intelligemment chacune de ses interventions publiques. Comment ne pas comprendre sa crainte de voir l’histoire se répéter, alors que les coûts très élevés résultent de mauvais choix d’emplacement ?

Ce débat, il faut l’éviter. Sans quoi, le gouvernement aura encore une fois son prétexte pour tout mettre sur pause. Nous n’avons pas ce luxe et ce temps. Plus que jamais, il faut faire front commun pour exiger ce désenclavement trop de fois promis. D’autant plus que le gouvernement fédéral a dit vouloir investir massivement dans les infrastructures, comme c’est le cas à chacune des crises économiques qui se profilent. Il nous appartient de saisir cette opportunité, mais pour cela, il faut faire la démonstration d’un consensus régional fort et déterminé. De plus, il est une carte qui à mon avis n’a pas été suffisamment mise de l’avant et pour laquelle le gouvernement fédéral a une grande sensibilité : celle des Bélugas et de leur habitat trop bruyant à l’embouchure du Saguenay.

Une espèce qu’il faut protéger, non ? Le pont fait partie de la solution.

S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires