La Baie d’Hudson cherche à se protéger de ses créanciers

Par Tara Deschamps, La Presse Canadienne 8:43 PM - 7 mars 2025
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Le magasin phare de La Baie d'Hudson est visible à Toronto, le jeudi 27 février 2020. LA PRESSE CANADIENNE/Frank Gunn

Le plus ancien détaillant canadien, La Baie d’Hudson, a déposé une demande de protection contre ses créanciers et a l’intention de restructurer son entreprise.

L’entreprise de grands magasins, qui a vu le jour en 1670, a annoncé cette décision vendredi soir, affirmant qu’elle était confrontée à des pressions importantes, notamment une baisse des dépenses de consommation, des tensions commerciales entre les États-Unis et le Canada et une baisse de l’achalandage dans les magasins du centre-ville après la pandémie.

«Bien que très difficile, il s’agit d’une étape nécessaire pour renforcer nos bases et garantir que nous restons une partie importante du paysage de la vente au détail au Canada, malgré les défis sectoriels qui ont forcé d’autres détaillants à quitter le marché», a déclaré Liz Rodbell, présidente et directrice générale de La Baie d’Hudson, dans un communiqué de presse. 

«Aujourd’hui plus que jamais, il est essentiel que les entreprises canadiennes soient protégées et positionnées pour réussir», a-t-elle ajouté.

L’empreinte imposante de l’entreprise s’étend sur 80 magasins La Baie d’Hudson qui vendent de tout, des vêtements et articles ménagers aux cosmétiques et aux meubles.

Par le biais d’un accord de licence, elle possède également trois magasins Saks Fifth Avenue et 13 magasins Saks Off 5th au Canada, qui continueront de fonctionner.

Saks Global, qui possède des magasins Saks aux États-Unis ainsi que des magasins Neiman Marcus et Bergdorf Goodman, n’est pas liée au dossier de protection contre ses créanciers.

La Baie d’Hudson a indiqué qu’elle étudiait plusieurs options stratégiques pour renforcer ses activités et a précisé qu’elle ne ferait aucune promesse, mais qu’elle s’engageait à préserver les emplois dans la mesure du possible.

En détérioration

L’entreprise a passé les dernières années dans un état de détérioration, après avoir fermé plusieurs magasins et procédé à plusieurs vagues de licenciements, invoquant des vents contraires difficiles.

En orchestrant les coupes précédentes, elle a cité des «vents contraires difficiles» qui ont rendu nécessaires la réduction de ses effectifs et le retrait d’un réaménagement de magasin au centre commercial Oakridge Park, à Vancouver.

La régression de La Baie d’Hudson était évidente dans tous les étages du grand magasin.

Lorsque son magasin phare de la rue Queen Ouest, à Toronto, a fermé son marché d’alimentation, il a rempli les comptoirs et les vitrines d’une gamme croissante de produits Zellers au lieu de réaménager l’aile. 

Plus récemment encore, l’épicier Pusateri’s et le fournisseur de café Nescafé ont décampé, vidant encore davantage le magasin, laissé dans un état de délabrement avancé, avec des escaliers mécaniques souvent brisés et de nombreux rayons en manque d’attention. 

La Baie d’Hudson a apporté quelques modifications à sa gamme de produits l’année dernière, en faisant venir la marque pour enfants Cat & Jack de Target et en rapatriant les bannières de vêtements pour femmes Ann Taylor et Loft au Canada. Pourtant, certains ont estimé que les changements ne fonctionnaient pas. 

«J’ai fait une visite juste pour voir ce qui se passait et je n’ai rien entendu, avait expliqué Liza Amlani, cofondatrice du Retail Strategy Group, à La Presse Canadienne l’été dernier. Il n’y avait personne. Il y a eu des démarques excessives, des gammes de produits en abondance, ce qui me dit que soit l’équipe d’achat (ou) l’équipe de planification ne savent pas ce que recherche le client canadien.»

Les commentaires de Mme Amlani surviennent alors que la société mère de La Baie d’Hudson, HBC, a connu une lueur d’espoir l’été dernier en achetant Neiman Marcus et sa bannière Bergdorf Goodman pour 2,65 milliards $ US.

Le plan de HBC était de combiner les grands magasins de luxe avec les chaînes Saks Fifth Avenue et Saks Off 5th qu’elle possédait déjà dans une nouvelle entité appelée Saks Global.

Dans le cadre de la transaction, le géant du commerce électronique Amazon et le géant des logiciels Salesforce devaient devenir investisseurs dans Saks Global.

Certains employés de Neiman Marcus ont été licenciés la semaine dernière, alors que HBC se préparait à consolider ses espaces de bureaux aux États-Unis et à supprimer le magasin phare de la bannière à Dallas.

Pendant ce temps, son concurrent canadien le plus proche, Simons, est en croissance avec un plan d’expansion de 75 millions $. La chaîne de grands magasins, qui a ouvert ses portes il y a 185 ans, ouvrira des succursales dans les centres commerciaux Yorkdale et Eaton Centre à Toronto, où La Baie d’Hudson est depuis longtemps un locataire principal, plus tard cette année. 

Des critiques

L’architecte de la majeure partie de l’histoire moderne de HBC est Richard Baker, un magnat américain de l’immobilier dont la National Realty and Development Corp. Equity Partners a acheté La Baie d’Hudson en 2008 à la veuve de l’homme d’affaires de Caroline du Sud Jerry Zucker pour 1,1 milliard $. 

M. Baker a introduit la société en bourse en 2012, mais a fait marche arrière par le biais d’une offre publique d’achat qui a dû être édulcorée à deux reprises avant que les actionnaires ne l’acceptent début 2020, avant les confinements liés à la pandémie de COVID-19. 

À l’approche du vote de privatisation, M. Baker a été critiqué pour la chute des actions de HBC alors qu’il était à la barre et pour ne pas avoir mieux utilisé les biens immobiliers de l’entreprise, qui comprennent plusieurs emplacements prisés dans des quartiers commerciaux à fort trafic. 

Après l’approbation de la privatisation, il a reconnu qu’il restait du travail à faire et a déclaré que cela commencerait par un nouveau site web pour La Baie d’Hudson.

«Il faudra des capitaux patients et une vision à long terme pour exploiter pleinement le potentiel de HBC à l’intersection de l’immobilier et du commerce de détail», avait-il avancé en mars 2020.

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