Du lichen de la Côte-Nord pour nourrir les caribous de la Gaspésie

Le lichen récolté est étendu derrière l’ancienne Quincaillerie J.M. Rioux sur la 1re Avenue à Forestville. Photo Johannie Gaudreault
L’abondance du lichen sur la Côte-Nord est utilisée pour alimenter les caribous retenus en captivité en Gaspésie. C’est la première fois que cette ressource est récoltée dans la région à cette fin.
Le ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs (MELCCFP) a octroyé un contrat à l’entreprise Boréal Sylva de Saint-Augustin-de-Desmaures en mai, après la publication d’un appel d’offres à l’hiver 2024.
Le mandat de la compagnie consiste notamment en des travaux de caractérisation de sites, de récolte, d’emballage et de livraison de lichens qui se dérouleront jusqu’à la fin de l’automne. Le coût du contrat s’élève à 169 500 $.
« La récolte de lichen destiné à alimenter les caribous en enclos a lieu chaque été depuis leur mise en captivité, mais il s’agit de la première année de récolte sur la Côte-Nord », divulgue Ève Morin Desrosiers, conseillère en communication au MELCCFP.
Auparavant la cueillette se déroulait en Gaspésie, dans le Nord-du-Québec et au Saguenay–Lac-Saint-Jean. « Cette année, le lichen est uniquement récolté dans le secteur de Forestville pour les caribous de la Gaspésie », précise la porte-parole.
Pour leur santé
Ce projet de récolte est nécessaire puisque les enclos, bien que boisés, ne contiennent pas de lichen terricole. Cependant, ces végétaux représentent plus de 30 % de la diète annuelle des caribous en nature et jusqu’à 50 % de leur diète en hiver, selon Mme Morin Desrosiers.
« Dans l’optique d’une remise en liberté des caribous, il est donc important de maintenir une diète la plus similaire possible à celle en nature. Les lichens n’étant pas des végétaux commercialisés, la seule avenue est alors leur récolte en nature », explique-t-elle.
Vu que les sites lichéniques en Gaspésie n’ont pas un potentiel suffisant pour soutenir une cueillette durant plusieurs années, les récoltes ont donc lieu sur la Côte-Nord ou dans le Nord-du-Québec, des régions où le lichen est abondant et où des sites à bon potentiel lichénique ont été identifiés.
« La récolte est planifiée pour également laisser un temps suffisant à la régénération dans une perspective d’aménagement durable », assure la conseillère en communication.
Le lichen n’a pas toujours été la nourriture favorite des caribous. Il est une source de fibres longues indispensable au bon fonctionnement de leur rumen.
« En biologie, on parle de co-évolution : les caribous se sont adaptés à digérer ces végétaux, les seuls disponibles en hiver pour les caribous de la toundra notamment. Les caribous sont d’ailleurs parmi les seuls animaux de la planète capable de digérer les lichens », fait savoir Ève Morin Desrosiers.
Pas d’impact sur nos caribous
Les sites à lichens présents dans l’habitat du caribou de la Côte-Nord sont d’office retirés de la planification de récolte afin de ne pas impacter les caribous de la région.
« Les lichens ne sont pas consommés par des animaux autres que les caribous, sauf peut-être les bœufs musqués, mais ils remplissent divers services écosystémiques, rappelle la porte-parole. C’est pourquoi la récolte suit un protocole strict avec des pourcentages de récolte autorisés dans chaque site, qui ne peuvent excéder 30 à 40 % du site. »
D’ailleurs, les endroits de récolte ne sont pas choisis au hasard, ils sont préidentifiés par une analyse cartographique et validés sur le terrain par l’entreprise ayant obtenu le contrat.
Ensuite, une caractérisation est réalisée (mesures et photographies) afin de déterminer le potentiel en lichens du site. Finalement, le ou les sites qui seront récoltés dans l’année sont sélectionnés, selon la quantité de lichens requise.
« Le lichen est cueilli manuellement selon un protocole donné. Une fois ramassé, il est mis à sécher sur des tamis étagés afin d’aboutir au degré de séchage souhaité pour sa conservation à long terme. Ensuite, il est ensaché pour être transporté jusqu’au site des enclos », relate Mme Morin Desrosiers.
Mesure temporaire
Les caribous de la Gaspésie ne demeureront pas en captivité ad vitam aeternam. La mise en enclos est « une mesure temporaire destinée à la protection des populations isolées de caribous en situation de grande précarité », souligne la conseillère en communication.
Cette dernière précise qu’il n’y a aucun plan de déplacement des caribous sur la Côte-Nord. Cette option n’est pas envisagée.
Actuellement, on retrouve 19 caribous dans une installation de garde en captivité et une portion demeure en liberté.
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