Domaine Côte du Nord: Les raisins de la passion!

Par Émélie Bernier 5:00 AM - 4 octobre 2024 Initiative de journalisme local
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La famille unie derrière le Domaine Côte du Nord n’a pas froid aux yeux! Heureusement, car il faut de l’audace pour cultiver du raisin au nord du 49e parallèle.

Abondantes, les grappes de raisins attendent patiemment d’être cueillies dans le grand pré du Domaine Côte du Nord de Ragueneau. Les vendanges débutent et la récolte s’annonce prometteuse, grâce, entre autres, à un mois de septembre particulièrement ensoleillé et clément.

« Ç’a été une belle saison, assez chaude dans l’ensemble. Ici, la saison est plus courte de 6 semaines par rapport à Rougemont, c’est un défi ! Je le répète souvent, c’est pas un marathon, c’est un sprint! »

Outre quelques difficultés dans le raisin de table en raison de maladies fongiques, la saison est un succès. « Dans le raisin de cuve, ç’a été très bien », résume Adam Desbiens, apprenti vigneron. 

Ce dernier est tombé sous le charme de la production vinicole lors d’un séjour en France. 

« J’ai vécu la crise forestière en 2008-2009. Après ça, je suis retourné à l’école en administration des affaires. L’horticulture, la nature, la ferme, ça me parlait déjà beaucoup et je cherchais vers quoi aller. Quand j’ai visité les jardins de Versailles, à Paris, je suis tombé sur un petit vignoble très rustique. Je me suis dit ‘’c’est ben hot, j’aimerais ça faire ça’’ », lance-t-il. 

Durant les 5 premières années, aidé par son père, il a implanté une importante quantité de cépages sur la terre familiale pour trouver ceux qui supporteraient l’hiver nord-côtier. La sélection, visiblement, a porté fruit.   

Des transformations à venir

L’an dernier, Adam et sa conjointe sont devenus officiellement propriétaires de la ferme paternelle d’Adam. Les bâtiments feront l’objet d’une transformation assez radicale. L’écurie sera transformée en boutique. La résidence abritera le chai, la cuverie et un entrepôt.

Pour l’instant, puisque la production n’est pas commercialisée, tous les essais, et erreurs, ont lieu dans leur cuisine.

Une clôture électrique tient les gourmands quadrupèdes à l’écart des raisins.

La récolte 2024 servira à faire encore davantage de tests. « Je suis allé faire une formation en vinification pour parfaire mon art. On travaille des microcuvées de 23 litres pour voir jusqu’où on peut aller, les saveurs, les assemblages possibles. Quand on va avoir les équipements et les permis, on sera prêt », lance-t-il, confiant.

L’obtention du permis n’est pas chose simple. « Il faut être établi au même endroit que la production de raisin et transformer minimalement 50 % de notre production. Il y a l’aspect sanitaire de la cuverie, les règles de la Régie des alcools, celles du MAPAQ, les cahiers de charge… On produit une fois par an, il n’y a pas de marge d’erreur », constate Adam Desbiens. 

Adam Desbiens et sa famille.

Heureusement, la production de raisin va bien. Les sceptiques seront confondus! « On a plus de 7 000 vignes et, l’an prochain, on s’attend à avoir d’excellents rendements», se réjouit le vigneron en devenir. À terme, il aimerait atteindre le chiffre magique de 15 000 vignes.

Mille plants de cassis donneront suffisamment de fruits pour la production d’un vin de cassis.  

Cet automne, la famille et les amis seront conviés à vendanger. Les parrains et marraines, et quelques chanceux, auront accès à des « paniers découverte » débordant de grappes de raisins. « Dans nos paniers, on va mettre quelques variétés pour que les gens puissent déguster les saveurs et imaginer vers quoi les vins vont aller. »

Adam Desbiens se permet de rêver au jour où il pourra vivre de sa passion et accueillir les visiteurs dans son vignoble en plus de vendre de l’excellent vin produit au nord du 49e parallèle.

« J’ai 48 ans, j’aimerais ça en vivre en jour. Ma blonde me suit, toute la famille me suit! On a 4 enfants qui donnent un coup de main, tout le monde y trouve son compte. C’est un projet familial », mentionne-t-il, visiblement ravi d’avoir pu fédérer son clan autour de son rêve à embouteiller…

Parrain, marraine

(EB) Lorsqu’on arpente les allées de vignes croulant sous les grappes colorées, de petites étiquettes bleues attirent le regard. On peut y lire les noms des « parrains » et « marraines » des pieds de vigne, un moyen original qu’a trouvé Adam pour aller chercher du soutien auprès de sa communauté pour son projet un peu fou. 

« On a une centaine de parrains et marraines et chacune a une vigne à son nom. On va leur offrir des primeurs, des dégustations… J’ai travaillé en économie sociale et je cherchais à faire une forme de sociofinancement. Les entrepreneurs aussi peuvent nous parrainer. Le soutien des parrains et marraines a permis d’agrandir la production. »

Il aimerait mettre en marché ses premières bouteilles « le plus tôt possible », mais demeure prudent avec l’échéancier.« On travaille avec ID Manicouagan. Il faut d’abord faire l’aménagement du chai et de la cuverie, ce sont de bonnes dépenses. Tous les ans, je me mets des objectifs, mais ce n’est pas facile d’aller chercher du financement, le nerf de la guerre, pour faire pousser de la vigne sur la Côte-Nord ! C’est une chose qui est peu commune », rigole-t-il.