Qui dit vrai ? – Chronique de Réjean Porlier

Par Réjean Porlier 11:45 AM - 9 septembre 2024
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L'ex-ministre caquiste, Pierre Fitzgibbon.

Rappelez-vous de Sophie Brochu qui quittait notre société d’État en disant : pas question qu’Hydro-Québec devienne le Dollorama du Québec en faisant référence aux grandes ambitions du premier ministre Legault. Cette grande dame, d’une intégrité sans équivoque avait vraisemblablement compris qu’entre le discours et la réalité, il y avait tout un fossé qu’elle n’était pas prête à franchir.

Et voilà que le numéro 2 du gouvernement caquiste quitte à son tour. Ce n’est pas que le super ministre Pierre Fitzgibbon n’était pas branché sur les ambitions de François Legault : c’est qu’il mettait au grand jour les conséquences de ces choix.

J’ai beau ne pas aimer Pierre Fitzgibbon pour avoir déjà goûté à sa condescendance outrageuse dans le dossier de l’aviation, alors que vraisemblablement il protégeait les intérêts d’Air Canada, je ne peux pas lui reprocher d’être un hypocrite.

J’ai beau ne pas aimer Pierre Fitzgibbon pour avoir déjà goûté à sa condescendance outrageuse dans le dossier de l’aviation, alors que vraisemblablement il protégeait les intérêts d’Air Canada, je ne peux pas lui reprocher d’être un hypocrite. Ce gaillard disait ce qui était bon à entendre et ce qui ne l’était pas, ne cachant rien de ses intentions et c’est ce qui lui aura valu de s’être fait montrer la porte.

Pendant que François Legault fait des pirouettes intellectuelles pour nous convaincre que de doubler la production énergétique du Québec ne fera qu’enrichir les Québécois, son super ministre annonçait publiquement la supercherie : il y a forcément des gens qui vont payer la facture et ce seront les Québécois. es. Attendez-vous au choc tarifaire qui va nécessairement se produire. Et le premier ministre d’en rajouter « les compagnies vont se battre pour pouvoir jouir de notre énergie propre », laissant entendre que ces nouvelles compagnies devenues accros à l’énergie propre du Québec allaient absorber à elles seules ces dizaines de milliards $.

Il était évident que M. Legault n’arrivait pas à convaincre Pierre Fitzgibbon d’endosser la tromperie et il n’était pas question de traîner plus longtemps cette dichotomie dans le discours caquiste. S’il y a une chose que François Legault nous a apprise, c’est qu’en politique, il est possible de dire une chose et son contraire, mais pas en même temps et rarement un premier ministre se limoge-t-il lui-même… alors… exit Fitzgibbon !

Sans doute est-ce la seule chose que Sophie Brochu et Pierre Fitzgibbon ont en commun : il n’est pas question de laisser entendre qu’on vend des oranges si on vend des citrons.

Pas facile à suivre la grande histoire d’Hydro-Québec, mais les choses deviennent plus claires lorsqu’on s’en donne un peu la peine. D’abord ce moment charnière et déterminant de l’histoire, alors que René Lévesque, ministre sous Jean Lesage, prépare la nationalisation de l’hydroélectricité. Prenez quelques minutes pour comprendre, Wikipédia résume bien la chose. 

Maîtres chez nous ! L’énergie, cet outil de développement fondamental entre les mains du peuple québécois. Ce trésor qui nous rapporte depuis énormément de richesse collective n’a cessé de faire saliver nombre d’intérêts privés. Au fil du temps, ils se sont acoquinés à des gouvernements moins vertueux et ont amorcé le retour à la privatisation. Les Libéraux ont été les premiers, mais pas les seuls, avec l’avenue des petites centrales privées. Des petites percées insidieuses qui, comme pour la santé, nous ont conduits au système à deux vitesses que nous connaissons aujourd’hui et qui accélère le traitement des gens plus fortunés.

Avant même d’être premier ministre, François Legault laissait entendre qu’Hydro-Québec était devenue trop grosse et salivait à l’idée de la privatiser. Il n’y a pas de formule miracle : doubler la production d’électricité passe nécessairement par l’explosion des tarifs ou… par la vente de feu… qui à son tour, conduira à l’explosion des tarifs. Oubliez la subtilité des petits barrages, le PM s’offre la grande porte, alors qu’il fera adopter, sans doute sous bâillon, son projet de Loi pour permettre la vente d’électricité par des entreprises privées. 

Imaginez à quel point il tient à ce projet de loi ; il vient d’en limoger son créateur et principal allié devenu gênant. Et c’est ce que François Legault nous propose : un néolibéralisme débridé et des milliards $$$ pour camoufler notre dépossession.

Pas besoin d’être un grand génie pour comprendre que tous ces milliards $$$, c’est de notre poche qu’ils vont partir, d’une façon ou d’une autre…