Un Septilien bat son chien et son âge lui évite la prison

Par Alexandre Caputo 6:00 AM - 1 juin 2023 Initiative de journalisme local
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Claude Normand a été reconnu coupable d’avoir causé de la souffrance sans nécessité à sa chienne, Honey. Photo iStock

« Vous devriez prendre le chemin des cellules, mais dû à votre âge, je ne le ferai pas. » Le juge Berthelot ne pouvait pas être plus clair en s’adressant à Claude Normand, 81 ans, alors qu’il venait de le reconnaître coupable d’avoir causé de la douleur ou de la souffrance à un animal sans nécessité.

Le retraité a subi son procès, mardi, au palais de justice de Sept-Îles.

Les faits reprochés à Claude Normand se sont déroulés entre mai et juin 2022. Les plaignantes, deux femmes de Sept-Îles passionnées des animaux, ont livré de poignants témoignages concernant les agissements de l’accusé envers son jeune berger allemand, Honey.

« Le 16 mai [2022], j’ai vu le monsieur [Normand] qui marchait sur Dequen avec son berger allemand. Rendue au stop Dequen et Napoléon, la chienne a tiré un peu sur la laisse », a raconté Isabelle Roussy, lors de son témoignage. « C’est là que le monsieur a plaqué la chienne au sol et lui a donné trois coups de pied dans les flancs ; la chienne criait et faisait des sons stridents », a-t-elle poursuivi, la gorge nouée.

Mme Roussy a mentionné avoir aussitôt contacté la SPCA Côte-Nord, mais elle aurait eu comme réponse qu’aucune intervention ne serait effectuée, faute de preuves.

Des « méthodes arriérées »

La voisine de Claude Normand, Vicky Henley, s’est également présentée sur le banc des témoins.

« Lorsque la chienne était dehors et qu’elle jappait, monsieur Normand était hors de lui et devenait tout rouge », a-t-elle décrit. « Dès que la chienne le voyait, elle s’écrasait. »

Mme Henley, qui est propriétaire du service de biocrémation Aquanimaux, a raconté au juge Berthelot avoir déjà aperçu le prévenu lever sa chienne de terre en la tenant par la laisse, avant de la frapper dans les côtes avec sa main libre.

« Ce sont des méthodes arriérées qui n’ont plus de raison d’être dans la société d’aujourd’hui », a lancé à l’accusé le juge Berthelot, en rendant sa décision.

La SPCA est finalement intervenue le 7 juin, après un signalement de Mme Henley, qui rapportait avoir vu Honey coincée dans la voiture de Claude Normand pendant une bonne trentaine de minutes. Puis, lorsqu’on lui a ouvert le hayon et qu’elle a voulu sauter à l’extérieur de l’habitacle, Normand l’a agrippée par le collet avant de la frapper au visage, à poing fermé, environ cinq fois.

Honey a été récupérée par la SPCA et confiée à une famille d’accueil, où elle réside toujours. 

Suite à cet événement, des conditions d’interdit de contact avec les plaignantes ont été émises à l’accusé, qui ne les pas respectées. 

Une parole contre l’autre

Puisqu’aucune preuve matérielle n’a pu être produite, le juge Berthelot devait trancher en jugeant de la crédibilité des témoignages livrés. Ce dernier a été sans équivoque en rendant son verdict.

« Je ne crois pas au témoignage de l’accusé », a-t-il affirmé. « Il s’agit d’un témoignage invraisemblable », mentionne-t-il, en pointant l’incongruité de plusieurs aspects de la version des faits de Claude Normand, qui plaidait, entre autres, se souvenir exactement où il était et ce qu’il faisait les 14,15 et 16 mai 2022.

La femme du malfaiteur s’est exprimée en sa faveur devant le juge, décrivant son mari comme un amoureux des animaux et en insistant sur le fait que Honey était heureuse à leurs côtés.

Son témoignage a été qualifié de « complaisant » par le juge Berthelot.

« On a l’impression que la témoin a appris son texte par cœur, un texte qui semble avoir été préparé d’avance par le couple », a-t-il tranché. 

Un gros ramassis de mensonges

Claude Normand continuait de plaider son innocence à sa sortie du palais de justice, mardi après-midi. 

« Je suis brimé sur un méchant temps », a-t-il affirmé, quelques minutes après avoir reçu son verdict. « C’est un gros ramassis de mensonges ce qu’elles [les plaignantes] ont raconté. Elles n’étaient pas censées être sous serment pour témoigner ? », s’est-il indigné. 

L’avocate de l’accusé, Me Claudia Marois, se disait également déçue du dénouement dans ce dossier, tout en précisant qu’aucun élément ne pourrait permettre de porter la cause en appel.

Malgré un verdict de culpabilité pour ses gestes envers sa chienne, ainsi que pour le non-respect de ses conditions, Claude Normand pourra conserver sa liberté. Il sera cependant soumis à une probation de 12 mois et il lui sera interdit d’être en contact avec un animal, quel qu’il soit, pendant une période de deux ans. Il devra également verser 1000 $ à la SPCA Côte-Nord.

Mme Roussy, une des deux plaignantes au dossier, avait du mal à contenir ses émotions en apprenant la décision du juge.

« Je pleure de soulagement », a-t-elle commenté. « Enfin, la cruauté envers les animaux est reconnue, ce sont des êtres vivants comme nous, dotés de sensibilité et d’émotions, nous [les humains] sommes trop souvent méchants avec eux. »

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