Un Septilien 32 ans au volant de son autobus jaune
Pierre Lebel conduit fièrement son autobus depuis plus de 32 ans. Photo courtoisie
Être chauffeur d’autobus ne se résume pas à s’asseoir derrière le volant et à déposer les enfants à l’école. Le métier, qui n’est pas toujours reconnu à sa juste valeur, apporte un lot de responsabilités et peu sont capables d’exercer ce travail.
Pierre Lebel conduit des autobus depuis plus de 32 ans. L’écouter raconter l’évolution de son métier et les nombreuses anecdotes qui s’y rapportent nous fait comprendre sa passion pour son travail et qu’il faut vraiment l’aimer pour pouvoir l’exercer.
« Des fois, il y en a qui disent que j’ai un beau métier et qu’ils aimeraient le faire aussi. Y’en a qui sont capables de chauffer des autobus, mais ils ne sont pas capables de gérer les jeunes », dit-il.
« Des copains l’ont essayé un mois ou deux, ils ont aimé l’emploi, mais ne sont pas capables de gérer les jeunes à bord. Quand les jeunes sont agités, ils n’arrivent plus à se concentrer sur le trafic et tout faire en même temps. »
Reconnaissance
Les employés qui ont fait la grève du transport scolaire, dans les dernières semaines, demandaient une hausse salariale en raison du coût de la vie, mais aussi, pour que la profession soit reconnue à sa juste valeur. Les employés doivent avoir bien plus qu’un permis de conduire. Les formations de tout genre s’additionnent (intimidation et autres outils d’intervention), il faut un cours de métier unique de 15 h renouvelable aux trois ans, une formation RCR, les rencontres avec le transporteur et le centre de service scolaire (gestion de trajets, gestion des cas difficiles, etc.) sont aussi à mettre à l’horaire.
Sans oublier l’énorme responsabilité d’assurer la sécurité des passagers jour après jour.
Un métier qui a bien changé
L’évolution dans le monde du transport, Pierre Lebel connaît bien ça. Qu’on parle des changements au niveau des véhicules ou des responsabilités du métier, il a un lot d’anecdotes à raconter. Les temps ont bien changé.
« Avant, on nous donnait les clés avec un circuit et c’était à la va-comme-je-te-pousse. Un jour, tu arrivais à l’envers, ce n’était pas grave. Demain, tu arriveras à l’endroit. Aujourd’hui, les restrictions sont beaucoup plus nombreuses », dit M Lebel.
Dans ses débuts, les autobus étaient manuels, ce qui était assez épuisant à conduire comparativement aux véhicules automatiques qu’ils utilisent aujourd’hui.
L’arrivée des moyens de communication facilite aussi leur travail.
« S’il arrivait un pépin, ou une panne mécanique, tu attendais sur le bord du chemin jusqu’à ce qu’on te cherche, parce que tu n’étais pas à l’école à l’heure prévue », raconte-t-il.
Depuis la tragédie d’octobre 1997 survenue aux Éboulements, où 44 personnes ont perdu la vie dans un accident d’autobus, des tâches se sont ajoutées à leur journée de travail.
À la suite des recommandations du coroner, la loi 430 a été mise en place et exige entre autres que les conducteurs d’autobus effectuent une ronde de sécurité tous les jours, afin de déceler toute défectuosité le plus rapidement possible et d’empêcher l’utilisation du véhicule si son état est jugé susceptible de causer un accident, ou une panne.
Un système de sécurité a aussi été mis en place pour éviter que des enfants soient oubliés dans l’autobus. Dès qu’un panneau d’arrêt lumineux s’ouvre sur l’autobus, indiquant l’embarquement d’enfants, le système s’enclenche automatiquement. Avant d’éteindre le moteur du véhicule, le conducteur doit se rendre à l’arrière en s’assurant que tous les bancs sont bien vides, pour ensuite appuyer sur un bouton, sinon, une alarme sonore retentit.
L’immigration et la maternelle quatre ans font aussi partie de la nouvelle réalité du métier. Les jeunes élèves qui arrivent d’un autre pays ne parlent pas toujours bien la langue et ont aussi besoin d’un sentiment de sécurité dans leur nouvel environnement.
Même chose pour les petits de quatre ans qui ont besoin d’un peu plus de sécurité. Ils doivent donc tous être déposés directement à domicile et s’assurer que quelqu’un les attend à la maison. S’il n’y a personne, ils doivent rester dans l’autobus et le conducteur avise le service de transport qui contactera le parent.
« Les petits de quatre ans sont fatigués à la fin de la journée et peuvent s’endormir. Il faut s’assurer qu’ils débarquent à leur arrêt. Il faut aussi les aider à monter l’escalier, parce qu’ils ont de la difficulté », dit-il.
Tranche de vie
Le soir d’Halloween 2002 restera à jamais gravé dans la mémoire de Pierre Lebel. En se rendant à un arrêt, un semi-remorque arrivant de la rue Jolliet a omis son arrêt obligatoire et est entré en collision avec le centre de l’autobus. Tous les passagers ont été transportés à l’hôpital de manière préventive, mais aucun n’a été blessé grièvement. M. Lebel a été projeté dans l’escalier et s’en est sorti avec de nombreuses ecchymoses.
« C’est assez spécial se faire frapper dans le côté de l’autobus par un 36 roues. Mettons que cette fois-là, ça m’a frappé ! », dit-il.
« Ça fait quand même une vingtaine d’années de ça et je m’en souviens encore et j’ai encore des flash de ça parfois », dit-il.
Son arrêt de travail n’a duré que trois jours.
« Les gens me disaient : vas-tu être capable ? Tu n’as pas peur de figer et d’avoir peur de recommencer à travailler ? », raconte-t-il.
« J’ai décidé de retourner au travail. J’avais des bleus partout sur le corps. »
Un souvenir qu’il espère être le seul qu’il vivra jusqu’à la fin de sa carrière.
Sur une note plus positive, il adore les expériences, en dehors du transport scolaire, qui le sortent de la routine habituelle.
Les deux semaines des Jeux du Québec font partie de ses beaux souvenirs. Le transport des croisiéristes lui a aussi permis de rencontrer des gens en provenance de divers pays.
« Ça change le mal de place et c’est plaisant d’avoir une nouvelle clientèle. »
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