Hausse de la violence au Pénitencier de Port-Cartier
Plusieurs agressions sont survenues au Pénitencier de Port-Cartier depuis l'abolition de la détention.
Deux agressions physiques en moins de cinq jours sont survenues la semaine dernière, au Pénitencier de Port-Cartier. Les victimes : des employés. Sous le couvert de l’anonymat, des personnes dénoncent le niveau de violence qui semble s’accroître à l’intérieur des murs, même entre détenus.
Le 25 mars, un membre du personnel est victime d’un coup de poing au visage, une attaque non ciblée de la part d’un détenu. Mercredi dernier, un autre employé de l’établissement se fait frapper, sans avertissement. Cette fois, le détenu a posé un acte vraisemblablement prémédité.
« Il n’y a plus de conséquence à leurs gestes », déplore une de nos sources. Qu’une simple petite amende, ou un peu de temps en isolement. « Les délinquants sont placés dans un secteur différent, après ça, ils sont transférés d’établissement. Tout le monde se lance la balle. Le personnel est mis à risque. Les détenus ont moins de retenue depuis », ajoute cette source, en faisant référence à l’abolition de la loi C-83.
Nos sources sont unanimes. Le niveau de violence a drastiquement augmenté à l’intérieur des murs du Pénitencier de Port-Cartier. On rapporte que plusieurs détenus se sont fait battre par des codétenus avec des pics et des slashers, une arme artisanale faite de lames de rasoirs collées grâce à un bout de plastique fondu.
« Ça brasse comme jamais de ce temps-là », raconte un agent correctionnel, qui ajoute que d’autres employés ont aussi subi des agressions dans les derniers mois et qu’ils ne sont pas encore de retour au travail. « Les détenus le disent : il n’y a plus de conséquence aux gestes. Ça va juste empirer », affirme-t-il. Certains détenus ne veulent plus sortir de leurs rangées pour les activités, « ils ont peur ». « Une des personnes soutient que l’abolition de la détention change la donne. » Le personnel est épuisé. Les détenus ont plus de droits. »
Une des sources indiquent que les employés doivent gérer les problématiques liées aux drones, avec très peu de moyens. « La drogue, les cellulaires ainsi que des armes entrent dans nos établissements fédéraux et mettent beaucoup de stress sur tout le monde. Ce n’est qu’une question de temps avant qu’un drame ne se produise et que l’irréparable survienne. »
« Les détenus gèrent les prisons »
Le président régional du Syndicat des agents correctionnels du Canada (UCCO – SACC CSN), Mike Bolduc, est catégorique. La hausse des agressions dans les pénitenciers est causée par l’abolition de détention.
« La cause de l’augmentation, c’est qu’il n’y a plus de conséquence comme avant », assure-t-il, avec le changement de détention vers l’aire de déplacement restreint. Il impute aussi le manque de personnel. Les employés sont brûlés, fatigués. Il y en a qui tombe en post-traumatique.
Il va aussi loin en disant que ce sont les détenus qui gèrent les prisons. « Avec tous les jugements et lois, les détenu font ce qu’ils veulent et nous sommes toujours suivi à la loupe par la direction sur chaque intervention qu’un agent correctionnel va faire. C’est rendu à ce point-là! C’est notre quotidien. On a une épée de Damoclès au-dessus de la tête. »
M. Bolduc soutient que le personnel au Pénitencier de Port-Cartier n’est pris au sérieux. « Le président local n’est pas écouté par la direction, même s’il fait tout en son pouvoir. La moindre des affaires, ce serait la sécurité du personnel. »
Le président régional aimerait que des fouilles soient faites à l’intérieur des murs pour trouver toutes armes et produits possibles.
« On est dans une bataille constante. »
Il martèle une fois de plus qu’il faut protéger le personnel, que les agents sont fatigués, écoeurés et tannés. Le comité de rétention doit donner un coup de main pour Port-Cartier.
« Il y a des gens qui rentrent à reculons. Je lève mon chapeau à ceux qui vont au travail. La direction locale doit prendre ça en main. »
De son côté, le Service correctionnel du Canada (SCC) a décliné notre demande d’entrevue, mais a tenu à apporter quelques éléments d’informations, précisant prendre très au sérieux ses responsabilités et ses obligations, entre autres pour le bien-être des délinquants dont il a la charge.
« La sécurité et la sûreté de nos établissements, de notre personnel, des détenus et du public sont une priorité. Nous déployons des efforts en ce sens en nous appuyant sur le Modèle d’engagement et d’intervention, un modèle fondé sur le risque et axée sur la personne qui aide le personnel à mettre en œuvre des stratégies d’engagement et d’intervention afin de l’aider à prévenir les incidents, à y réagir et à les régler au moyen de l’intervention la plus sûre et la plus raisonnable possible. »
Il indique que la violence n’est pas tolérée dans ses établissements. « Les personnes impliquées dans des incidents violents sont passibles de mesures disciplinaires et, dans certains cas, d’accusations criminelles. Le SCC examine tous les incidents de violence dans le but de prévenir ce genre de situations et d’en réduire la fréquence. »
Au sujet des unités d’intervention structurée (UIS), le SCC précise qu’elles ne sont pas punitives. Les détenus peuvent y être transférés quand leur présence au sein de la population régulière met en danger sa propre sécurité, celle d’une autre personne ou encore celle du pénitencier, ou compromet le déroulement d’une enquête et qu’il n’y a aucune autre solution raisonnable au transfert vers l’UIS.
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