Un billet d’avion trop cher pour le CISSS

Par Marie-Eve Poulin 6:00 AM - 16 août 2022
Temps de lecture :

Mélanie Jean dit se battre non seulement pour elle, mais pour tous ceux qui vivent la même réalité. Photo courtoisie

Mélanie Jean, 40 ans, résidente de Port-Cartier, a reçu un diagnostic d’hypercholestérolémie familiale vers l’âge de deux ans. Pour recevoir ses traitements, elle doit se rendre à Québec aux deux semaines. Son traitement d’une durée de deux heures et demie se résulte en deux jours à l’extérieur de la région et par le fait même, trois jours sans pouvoir travailler en raison du manque au niveau de la desserte aérienne.

Alors qu’elle n’avait que deux ans, Mélanie Jean se rendait à Montréal en autobus avec sa mère aux deux ou trois mois où elle était suivie par des médecins. Comme ceux-ci ne faisaient qu’étudier son cas, sa mère a pris la décision de l’inscrire vers l’âge de six ans à un programme de traitement qui se voulait révolutionnaire au CHUL de Québec.

Sa demande acceptée, elle prend donc l’avion aux deux semaines et parfois aux dix jours pour recevoir ses traitements à Québec.

À ce moment le Centre de réadaptation l’Émergent avait accepté de payer les frais considérant que c’était beaucoup de longs déplacements sur la route, surtout avec un enfant.

Maintenant adulte, elle doit jongler avec la perte de salaire, des horaires de vols qui ne conviennent pas à ses besoins et des frais considérables pour ses séjours à l’extérieur.

Soins hors de la région

« Pour moi il est hors de question que je quitte la Côte-Nord. Je l’aime ma place, je suis installée ici. J’ai une maison, un bloc appartements, un emploi que j’aime », dit Mélanie Jean.

Elle ajoute que son conjoint aussi a un bon emploi chez ArcelorMittal et que des emplois comme celui-ci ne se trouvent pas partout.

« Je trouve que ce n’est pas à moi de payer parce que le gouvernement n’est pas capable de m’offrir les soins dont j’ai besoin dans ma région », dit-elle avec conviction.

« Je ne devrais pas avoir besoin de me battre pour avoir des horaires de vols qui sont plus adaptés pour la réalité des gens de la Côte-Nord », ajoute-t-elle.

Mme Jean explique qu’il est impossible pour elle, avec l’offre actuelle de vols, de faire un aller-retour dans la même journée. Elle doit passer deux nuits à Québec par traitement soit quatre nuits par mois, ce qui occasionne beaucoup de dépenses.

« La solution est de payer des montants réalistes pour les gens qui doivent se déplacer pour leur santé, étant donné que c’est le gouvernement qui fait qu’on n’a pas les soins en région », estime Mme Jean.

« Deuxièmement, c’est d’acheter des billets d’avion avec des horaires qui font du sens avec les gens qui voyagent », ajoute-t-elle.

Mélanie Jean dit se battre non seulement pour elle, mais pour tous ceux qui vivent la même réalité.

Accommodements

Le Centre intégré de santé et de services sociaux de la Côte-Nord (CISSS) offre des compensations de 12,75 $ par jour pour les repas et de 50 $ par nuit d’hébergement, lors de ses déplacements à Québec. Mme Jean croit qu’avec l’augmentation du coût de la vie, ces montants offerts ne sont pas représentatifs de la réalité et devraient être ajustés.

« Tous ces frais, ça fait un trou dans un portefeuille », dit-elle.

Pour l’hébergement, Mme Jean a négocié un tarif avec une connaissance qui travaille dans un hôtel, mais ce tarif reste toutefois dispendieux.

Des accommodements lui avaient été proposés, tels que de séjourner à l’hôtellerie de l’Université Laval.

« Je ne pense pas que les ministres qui voyagent dormiraient là-dedans », dit-elle.

Elle avait aussi trouvé un horaire de vols avec PAL Airlines, qui lui permettait de dormir une seule nuit à Québec. Cet horaire convenait parfaitement et tout allait à merveille, jusqu’au jour où elle se voit refuser le remboursement de son billet d’avion.

« Le CISSS ne veut plus payer pour le billet d’avion parce qu’ils disent qu’il est trop cher », dit-elle découragée.

« Je crois que le moment serait venu pour que le gouvernement et les compagnies s’assoient pour regarder ce qu’ils peuvent faire pour accommoder les gens de la Côte-Nord côté horaire de la desserte aérienne. Il faut des horaires qui ont de l’allure et des prix qui ont du bon sens », conclut-elle.

Lorraine Richard déplore la situation

La Députée de Duplessis Lorraine Richard est très mécontente de la réponse du CISSS envers Mélanie Jean et compte continuer de se battre pour une desserte aérienne fiable, sécuritaire et à coûts abordables.

Lorraine Richard multiplie les appels au cabinet du ministre Dubé et tente de faire comprendre que la situation est inacceptable.

« De répondre cela à Mme Jean d’un c’est inadmissible de la part du CISSS et ça démontre que le ministère de la Santé ne croit pas au 500 $ et que leur politique de transport aérien de M. Bonardel n’est même pas accessible pour nos usagers qui ont besoin de soins à l’extérieur de la région » déplore-t-elle.

CISSS

Du côté du CISSS, on nous réfère au programme de transport et hébergement (Guide et procédures d’analyse des dossiers) qui stipule entre autres : « Avion : Le déplacement par avion est remboursé à 100 % sur prescription médicale justifiant l’utilisation de ce mode de transport en tenant compte des limitations fonctionnelles de la personne. Pour les régions où il n’y a pas d’accès routier, le transport par avion est accepté d’office. Toutefois, l’établissement se réserve le droit de choisir, au moindre coût, le transporteur aérien. (Les réservations sont effectuées par l’établissement) », peut-on lire en page 18 du document.

Les usagers sont invités à entrer en contact avec les responsables du programme transport et hébergement s’ils sont insatisfaits de ce qui leur est proposé. Des pistes de solutions seront alors évaluées en fonction de la disponibilité des services offerts (transporteurs, hébergement, etc).

Partager cet article