Hausse du prix du diesel : les camionneurs artisans gagnent leur cause

Par Johannie Gaudreault 12:00 PM - 31 mai 2022
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Le président et la directrice de Transporteurs en vrac en Haute-Côte-Nord, Marcel Dumont et Manon Pedneault, sont ravis du pourcentage qui sera attribué aux camionneurs pour la surcharge de carburant.

Après avoir manifesté partout dans la province le 9 mai en raison de la hausse des prix du diesel, les camionneurs artisans ont obtenu gain de cause auprès du gouvernement provincial. La compensation pour le carburant sera revue à la hausse et devrait s’élever autour de 22 % pour le mois de juin.

Pour le président des Transporteurs en vrac de la Haute-Côte-Nord et l’administrateur au conseil d’administration de l’Association Nationale des Camionneurs Artisans (ANCAI), Marcel Dumont, « il fallait que la situation change sinon c’était la grève générale des camionneurs artisans », dévoile-t-il au Journal Haute-Côte-Nord.

Les prix du carburant ont doublé comparativement à l’an dernier, selon M. Dumont qui est camionneur depuis une quarantaine d’années.

« L’an passé, pour une journée normale de huit heures, ça coûtait 250 $ d’essence et aujourd’hui, on est rendu à 500 $ », se désole le propriétaire de Transport Marcel Dumont, établit à Colombier.

À titre d’exemple, pour faire le plein de son camion 10 roues, M. Dumont doit débourser une somme d’environ 1 200 $ alors qu’habituellement, « ça coûtait dans les 600 $ ».

L’inflation ne s’arrête pas là puisque d’autres dépenses ont aussi été revues à la hausse pour les camionneurs.

« On enregistre une augmentation de 30 % pour les pièces quand on doit réparer notre camion et pour les pneus. Quand on va au garage, c’est 105 $ de l’heure », précise Marcel Dumont, ajoutant que les coûts des assurances ne se sont pas trop élevés.

Le pourcentage de la surcharge de carburant devrait être officialisé dans les jours à venir.

« Ce n’est pas confirmé encore, on attend la documentation officielle du gouvernement, mais c’est ce qui a été entendu, soit 22 % pour le mois de juin, à moins que le prix de l’essence redescende. Pour mai, le taux a été fixé à 17,59 % », fait savoir la directrice du sous-poste de Transporteurs en vrac pour la Haute-Côte-Nord, Manon Pedneault.

Notons que la surcharge de carburant est ajoutée au taux horaire fixe permettant d’établir la rémunération des camionneurs artisans. Celle-ci est établie par le ministère des Transports du Québec (MTQ) qui a d’ailleurs dû ajuster sa méthode de calcul.

« Avant, le ministère fixait son pourcentage selon le prix de l’essence à la rampe de chargement située à Montréal. Cette méthode-là datait de longtemps et n’était pas équitable pour tout le monde. Maintenant, le taux est déterminé d’après la moyenne du prix du diesel à la pompe au Québec », explique M. Dumont qui prend ce changement comme un gain important.

Au niveau du taux horaire octroyé aux camionneurs, il n’a pas bougé depuis deux ans. L’ANCAI est présentement en négociation pour le revoir à la hausse également.

Manque de relève

Ces améliorations des conditions salariales des camionneurs indépendants ne peuvent qu’aider l’industrie qui est aussi affectée par la pénurie de main-d’œuvre.

« Quand tu sais que tu vas rouler à perte, ce n’est pas tentant de continuer dans le domaine, encore moins de te lancer dans l’industrie », souligne le président des Transporteurs en vrac, qui possède un camion à benne.

D’ailleurs, la relève se fait de plus en plus rare et les camionneurs sont de plus en plus nombreux à quitter le navire. Chez Transporteurs en vrac à Forestville, de décembre à mai, le nombre de camionneurs est passé de 39 à 33.

« J’ai six camionneurs qui ont décidé de quitter, soit pour partir ailleurs ou pour changer de domaine. Les derniers départs avaient tous un lien avec le prix de l’essence », commente Mme Pedneault.

Le coût pour l’acquisition d’un camion neuf n’est pas négligeable non plus et l’inflation ne l’a pas épargné. Selon Marcel Dumont, « un jeune qui veut s’acheter un camion, il doit avoir un 30 000 $ à 40 000 $ de lousse pour combler les premiers mois d’essence et il doit prévoir 300 000 $ pour l’achat du camion, un autre 50 000 $ d’augmentation ».

Début de saison retardé

En Haute-Côte-Nord, les camionneurs ne sont qu’actifs six mois par année. Avec la fin de la période du dégel, la saison est maintenant commencée.

« Je reçois beaucoup d’appels pour savoir quand on va commencer et les taux de la surcharge de carburant. Je m’attends à ce que la saison commence en juin ou juillet en raison de la grève des ingénieurs du MTQ », divulgue la directrice.

Rappelons que le MTQ doit octroyer 50 % de ses contrats de transport en vrac aux camionneurs artisans. « C’est notre plus important donneur d’ouvrage, mais on effectue des contrats aussi pour les municipalités, Hydro-Québec, ou des privés », ajoute Manon Pedneault qui a effectué le métier de camionneuse pendant une quinzaine d’années.

Pour le moment, aucune autre manifestation n’est prévue par l’ANCAI puisque le gouvernement s’est rangé du côté des camionneurs.

« Il nous reste qu’à attendre l’officialisation des pourcentages et la poursuite des négociations pour le taux horaire. Si ça bloque, on reprendra nos mobilisations », de conclure Marcel Dumont, qui opérera son camion jusqu’à ce que sa santé le lui permette.

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