25 avril 2024
Lettre adressée à M. François Bonnardel, Ministre des Transports du Québec
Il y a près de deux ans de cela, lorsque vous mettiez en place le comité d’urgence pour travailler à une stratégie pour relancer l’aviation au Québec et calmer ceux qui criaient plus fort, les Maires, propriétaires de leur aéroport, lesquels se retrouvaient dans des situations financières difficiles suite à la pandémie, j’ai fait maintes représentations auprès de votre cabinet afin de ne pas exclure la coop en devenir, TREQ, de vos réflexions.
Dès le début, mes ex-collègues qui siégeaient au comité me laissaient entendre cette volonté ferme du gouvernement de travailler uniquement avec les joueurs existants. Mes représentations ont finalement porté fruit et votre expert-conseil, M. Jacques Roy, accepta de rencontrer les gens de la coop. Ceux-ci m’ont raconté qu’à cette rencontre le discours de M. Roy se résumait à ceci :
« Il n’y a pas suffisamment d’achalandage au Québec pour justifier l’ajout de nouveaux joueurs et l’utilisation de plus gros avions…point! »
Celui-ci était complètement fermé à l’idée d’explorer tout le potentiel jusque-là ignoré au Québec, dont le tourisme et tel un comptable, il préférait travailler avec les chiffres du passé, garant d’un avenir… tout aussi médiocre! (…)
Là où le bât blesse particulièrement M. le Ministre, c’est que lors de votre annonce quant aux billets à 500$ pour tout le monde, devenus pas pour tout le monde et redevenus pour tout le monde, vous avez justifié ce programme en insistant sur deux éléments qui m’ont passablement surpris : une réduction du coût de billets devant conduire à une augmentation de l’achalandage et la volonté claire de travailler sur le potentiel touristique. Bref, vous repreniez les arguments de TREQ, ridiculisés par votre expert-conseil, M. Roy, qui ne croyait pas un instant en cette possibilité d’augmenter substantiellement la clientèle aérienne au Québec.
Donc, votre gouvernement a levé le nez sur une proposition de TREQ d’augmenter le volume des appareils, de diminuer le coût des billets sous les 500$, sans surenchère pour les billets de dernière minute, sans subvention du gouvernement, mais plutôt choisi de subventionner l’industrie à la hauteur de quelques 255 millions $ sur cinq ans, en espérant que les compagnies existantes allaient ajuster l’offre et surtout… les prix… Vous êtes croyant M. le Ministre? Aveuglement croyant?
Pour quelle raison les entreprises existantes essaieraient-elles de s’asservir de ces généreuses subventions qui deviendront la norme? Parce qu’elles feront trop de profit et se sentiront une responsabilité de redonner à la communauté? Difficile de ne pas mettre en perspective les 4 millions $ demandés en prêt par la coop versus les 255 millions $ octroyés en subvention. Quel était le risque, sinon que le projet prenne son envol et ne fasse que des gagnants, y compris et surtout le gouvernement. 4 millions $ sur une première phase de 26 millions $. Comment votre collègue Fitzgibbon pouvait-il prétendre publiquement que le gouvernement prenait tous les risques alors que vous en distribuerez 255 millions $ sans la moindre garantie de résultat. C’est ce qu’on appelle tout un paradoxe non? Le genre de paradoxe qui mène au désabusement de la population face à la politique.
(…) Avant longtemps, je vous prédis qu’on vous demandera d’augmenter les subventions d’un système demeuré contre-productif.
S’il est vrai que vous souhaitez réellement donner un nouveau souffle à l’aviation au Québec, je vous suggère fortement de sortir des sentiers battus et rebattus et d’envisager l’embauche d’un nouvel expert-conseil prêt à regarder en dehors de la boîte, à considérer de nouveaux paradigmes et envisager de nouveaux joueurs… car tout ça est non seulement possible, mais nécessaire et à notre portée! C’est ce que j’appellerais avoir de la vision plutôt que d’essayer d’être élu… à tout prix!
Réjean Porlier, ex-Maire de Sept-Îles
