Le département de la maternité tenu à bout de bras par les infirmières

Par Emy-Jane Déry 7:30 AM - 22 septembre 2021
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Le centre mère-enfant de Sept-Îles est un lieu de grande joie. Les travailleuses de la santé y voient naître la vie au quotidien. Or, la pénurie de personnel frappe fort au deuxième étage de l’hôpital. Des infirmières du département, actuellement en congé, ont accepté de nous raconter pourquoi elles ne retournent pas.

Depuis le 28 août, les services sont réduits à la pouponnière, faute de personnel. Mais où sont les travailleurs et travailleuses de la santé qui permettaient jadis le fonctionnement normal du centre?

Plusieurs infirmières sont en congé sans solde. C’est le cas de Krystel Blais. Elle était au centre depuis la fin de ses études, en 2015. La maman de deux enfants, enceinte de son troisième, n’en pouvait plus de rentrer à la maison quand ses petits dormaient. Le temps supplémentaire, obligatoire ou non, est venu à bout de son énergie, malgré la grande passion qu’elle voue à son travail et l’amour qu’elle a pour ses collègues.

« À un moment donné, on doit peser le pour et le contre et choisir ses priorités. En ce moment, ma
priorité, c’est ma famille et ma santé mentale », a-t-elle confié au Journal.

Ça lui est déjà arrivé de faire six 16 heures de travail en ligne et de se faire annoncer au bout du marathon qu’il fallait encore continuer. Qu’elle avait été « codé » pour le TSO (temps supplémentaire obligatoire).

Cette possibilité du TSO qui plane sur la tête de chaque travailleuse entraîne un stress quotidien sur elles et sur la gestion de leurs obligations familiales.

« On ne sait pas si à 4h notre chiffre va être terminé ou s’il va falloir se revirer de bord et essayer de trouver quelqu’un qui va aller chercher les enfants à la garderie ou à l’école, parce qu’on ne sera pas capable de sortir du travail avant minuit », a-t-elle illustré.

De plus, le 16 heures de travail est un vrai feu roulant. Souvent, il n’y pas de dîner, pas de pause.

« Tu travailles 16 heures en ligne, tu arrives chez vous, tu es brûlée », a décrit Mme Blais. 

Ce discours, d’autres travailleuses du centre interrogées l’ont aussi rapporté au Journal.

Sécurité

Des infirmières en provenance d’agences viennent régulièrement en renfort. Mme Blais croit que leur apport est essentiel. Cependant, si certaines travaillent avec le CISSS depuis plusieurs années et sont habituées avec le département, ce n’est pas nécessairement le cas de toutes celles qui sont envoyées.

Il arrive parfois que les infirmières proviennent de l’extérieur et qu’elles ne soient pas pleinement habituées avec le centre mère-enfant de Sept-Îles. Leur efficacité ne peut alors pas être aussi optimale.

« Ce n’est pas tant sécuritaire de travailler quand tu es une équipe de quatre, composée de deux nouvelles, d’une infirmière d’une agence et de toi. Tu te dis: ok, on travaille de nuit ensemble, j’espère qu’il n’y aura pas de gros cas et que tout va bien aller », a dit Mme Blais. «Quand tu te dis ça au début de ton chiffre, ce n’est pas le fun. »

Devant ce contexte de travail qui devenait de plus en plus lourd à porter, que Mme Blais qualifie même de « malsain », elle a choisi de tenter sa chance dans un autre emploi en soin.

Elle exerce depuis peu au Centre Uauitshitun, sur la communauté innue. Son horaire est fixe, de 8h à 16h45.

« Je ne pense pas retourner », a-t-elle dit, en songeant à cet emploi qu’elle aimait tant, au centre mère-enfant.

La suite du dossier : Le Centre mère-enfant de Sept-Îles privé de la moitié de son personnel et Pas de garderies, pas de pouponnière

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