Chronique : Le prince qui était un crapaud

Par Johannie Gaudreault 3:00 PM - 20 avril 2021
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Photo : iStock

Quand l’amour cogne à notre porte, on ne se doute pas du courant qu’il prendra. Le prince charmant peut vite se transformer en crapaud, sous le regard de nos proches. L’amour rend aveugle, dit-on. En 10 semaines, il n’a pas seulement emporté la vue de dix Québécoises, mais il a aussi volé leur vie.

Ce type de relation toxique est incompréhensible pour certains. « Mais, pourquoi elles ne quittent pas leur homme violent? »

Le cercle vicieux de la violence conjugale, il faut le vivre pour savoir en parler. Comme je préfère l’écriture, j’utilise ma plume pour agir et sensibiliser face à cet enjeu de société.

Flashback

Ce soir-là, on pouvait entendre une mouche voler. Les larmes coulaient sur mes joues, les pensées tournoyaient dans ma tête, j’avais l’impression que j’allais mourir.

C’était ma première crise d’angoisse, c’était le point culminant de ta violence.

Seule dans mon lit, la tête sous les couvertures, ma poitrine voulait sortir de mon corps. Tu es dans la cuisine. Tu cherches dans mon ordinateur des preuves de ma soi-disant infidélité.

Tu as cherché toute la nuit. La nuit la plus longue de ma vie, celle où je n’ai fait qu’espérer que ta jalousie compulsive ne me tue pas, coincée entre la peur de fuir et l’envie de retrouver mon souffle.

Je ne l’ai pas subie en vain. Cette nuit-là, tout l’amour que j’avais pour toi a quitté mon cœur. Après trois mois de violence psychologique, de hauts et de bas, les cloches ont sonné.

Ce serait la dernière fois que j’endurerais tes crises, si je m’en sortais vivante.

Le lendemain, tu es parti au travail sans dire un mot. J’ai fait mes valises en remerciant le ciel que tu n’aies pas perdu les pédales, que tu n’aies pas voulu te débarrasser de moi, qui portait ton enfant.

La vie m’a donné une chance de nous protéger et je l’ai saisie.

J’ai trouvé le courage de partir, parce que j’étais bien entourée, parce que j’ai vu la violence dans tes yeux et je ne pouvais imaginer perdre le précieux petit être qui vivait en moi.

Personne ne l’avait vu venir… on le cachait bien notre cercle vicieux.

Je n’ai pas encore révélé à mes proches tout ce que j’ai vécu, ce serait trop douloureux pour eux de savoir qu’ils n’ont rien vu.

Les dix femmes qui ont perdu la vie avaient peut-être déjà vécu des nuits semblables à celle-ci. Mais elles n’étaient pas en mesure de s’en sortir.

Elles n’avaient pas les mêmes ressources ou elles ont attendu une fois de trop que les beaux jours reviennent. Mais c’était leur dernière descente aux enfers.

Pourquoi j’y ai survécu, mais pas elles? Je ne saurai jamais la réponse, elles ont perdu leur voix à jamais.

Mais moi, même si j’ai perdu beaucoup durant cette relation signée amour-haine, j’ai encore ma plume.

Si elle peut me permettre de sensibiliser, de mettre des mots sur un problème sociétaire, et prouver qu’on peut se reconstruire, je ne peux m’en priver.

Soyons solidaires! Si vous avez des doutes, si vous apercevez qu’un infime comportement violent, que ce soit psychologiquement ou physiquement, dites-vous qu’à la maison, c’est amplifié à puissance mille.

Parfois, ce ne sont que quelques mots qui peuvent faire toute la différence.

« Ma fille, je m’en viens te chercher ». Ces mots, je ne les oublierai jamais papa.

Besoin d’aide?

SOS violence conjugale
1-800-363-9010
sosviolenceconjugale.ca

Signes de la violence conjugale

Voici quelques signes de la violence conjugale :

  • Il la rabaisse.
  • Il parle tout le temps et domine la conversation.
  • Il la surveille tout le temps, même au travail.
  • Il essaie de prétendre qu’il est la victime et il agit comme s’il était déprimé.
  • Il essaie de l’empêcher de vous voir.
  • Il agit comme si elle lui appartenait.
  • Il ment pour bien paraître ou exagère ses qualités.
  • Il agit comme s’il était supérieur aux autres membres de sa famille et plus important qu’eux.
  • Elle s’excuse ou trouve des excuses à son comportement, ou elle devient agressive ou se met en colère.
  • Elle semble mal à l’aise de s’exprimer en sa présence.
  • Elle semble être malade plus souvent et s’absente du travail.
  • Elle essaie de masquer ses blessures.
  • Elle trouve des excuses à la dernière minute pour ne pas vous rencontrer ou elle essaie de vous éviter lorsqu’elle vous rencontre dans la rue.
  • Elle semble triste, seule, repliée sur elle- même et craintive.
  • Elle consomme des drogues ou de l’alcool pour faire face à la situation.

Source : https://voirlaviolence.ca/

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