Randonnée aux monts Groulx : « Il faut connaître ses limites » – David Héroux

Par Sylvain Turcotte 2:57 PM - 9 septembre 2020
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Les monts Groulx, un grand terrain de jeu pour la randonnée où il peut être périlleux s’y aventurer. Photo courtoisie David Héroux

Les randonnées en montagne peuvent sembler banales, mais David Héroux rappelle aux gens qu’ils doivent être conscients des risques. Sur la Côte-Nord, les monts Groulx, longeant la 389 entre Baie-Comeau et Fermont, sont forts populaires.

« Les monts Groulx sont très risqués. C’est la ligue majeure du Québec. Ça prend de l’expérience et de l’intelligence.  Il ne faut pas penser que c’est une ballade dans le parc de la randonnée en montagne. Les conditions peuvent changer et il est possible de tomber en hypothermie. Il faut donc être conscient des risques, les comprendre et connaître ses limites comme individu. La plus belle qualité d’une personne d’aventure, c’est accepter l’échec », soutient-il.


Pour vous dire à quel point une randonnée aux monts Groulx peut être toute une aventure, voici le récit (intégral) de la journée du 26 août de quatre randonneurs qui ont dû être secourus, récit que l’un d’eux, Samuel Rivet, a publié sur le groupe Facebook Amis des Monts Groulx. Vous aurez en conclusion du récit quelques précautions à prendre.

D’ailleurs, deux jours plus tard, deux autres personnes ont également eu besoin de secours. 

Jour 4: Sauvetage en montagne aux monts Groulx le 26 août 2020, au nord du 51e parallèle.
5h30 le cadran sonne. Le vent et la pluie soufflent fort dehors. Valérie sort de la tente et me dit qu’il y a de la neige.
– De la neige un 26 août?
– Bon, ce n’est pas grave, ça va sûrement partir avec la chaleur de la journée.
Étant donné ces conditions. J’avertis Sarah et Félix que nous mangerons des noix et des barres tendres au déjeuner au lieu de notre gruau matinal.
Après ce petit déjeuner bien croquant, j’enfile ma dernière paire pantalon sec (l’autre était trempé de la veille), en me disant que dans 6h on sera à la fin du sentier et au véhicule.
6h45, moi et Valérie on fait les derniers préparatifs avant de ranger la tente. On enfile des sacs de pain autour de nos bas pour qu’ils restent secs dans nos bottes en Gore-Tex détremper. Ensuite, on enfile ces dernières et on met les guêtres par-dessus. En une minute top chrono, la tente est rangée dans nos sacs à dos. Sarah et Félix, on fait de même avec la leur.
Il est 7h00 quand nous partons. Il tombe un mélange de pluie neige. Félix m’avertit que lui et Sarah portent leur dernier bas sec (ils n’avaient pas des bottes en Gore-Tex) et qu’il faudra essayer de marcher sur des terrains secs.
On est aux monts Groulx, c’est quasiment impossible, car le sol est recouvert en entièreté d’une mousse épaisse gorgée d’eau comme une éponge, 70% du terrain praticable est de la tourbière et le 30% restant des buissons tout mouillés.
Je regarde la direction à prendre sur le GPS, on est à 900m d’altitude et nous devons rejoindre le début du sentier au sommet du massif Provencher à 1080m d’altitude qui se trouve à plus ou moins 800m de marche d’ici. Je prends soin de mentionner qu’on n’est pas sur le sentier.
Nous marchons dans des tourbières et les buissons vers le sommet Provencher, mais la météo commence à empirer. La pluie tombe de côté et vient nous mouiller le pantalon et transperce nos imperméables en Gore-Tex. La visibilité de 100m m’empêche de planifier la meilleure route pour attaquer les flancs escarpés du massif Provencher.
7h30, la pluie-neige s’est transformée en neige-pluie et il a déjà 10cm de neige au sol.
– De la neige en août?
Nous avançons à tâtons avec le vent qui nous fouette le visage.
Sarah dit qu’elle ne sent plus ses pieds.
Félix m’avertit qu’ils ne peuvent plus continuer comme ça.
Moi et Val nous nous consultons du regard. On leur donne des sacs de plastique pour leur pied. Le sac agit un peu comme un bas en néoprène, mais en moins efficace.
On continu la marche, Sarah est prise de sanglot et elle commence à frissonner.
7h45: Félix nous avertit que lui et Sarah ne sentent plus leurs pieds et qu’il faut monter la tente et appeler un hélicoptère. Valérie, moi et Félix montons la tente Ferrino de ce dernier dans une petite vallée à 1000m d’altitude. On a posé la tente derrière un tas de sapin pour nous protéger du vent. Sarah nous regarde faire, elle est en crise, elle pleure en gros sanglot et ses lèvres commencent à devenir bleues. Elle est au deuxième stade de l’hypothermie! On gonfle son matelas de sol, elle et Félix rentrent dans la tente. De l’extérieur, je dicte à Félix quoi faire (mes cours de premiers soins ont étés un peu utile cette journée).
– Enlève ses vêtements, enroule-la dans la couverture de survie avant de la mettre dans son sac de couchage.
8h00 à l’extérieur dans la tempête, moi et Valérie nous essayons de contacter les secours. Après 5min nous commençons à comprendre le fonctionnement du téléphone Iridium. Enfin, nous réussissons à établir le contact avec la SQ de Baie-Comeau. J’explique au policier notre situation :
– On est aux monts Groulx
– Il neige et une personne souffre d’hypothermie.
– Nous voulons être évacués
La tâche est ardue à cause de la météo, le signal est coupé au 30 secondes et chaque fois que je rappelle le téléphone me signal que j’ai 15min d’appel gratuit avec mon forfait.
Je me fais répondre:
– Écouter monsieur vous êtes au nord du 51e parallèle, c’est le Grand Nord! Une évacuation à ces latitudes est très compliquée et onéreuse.
– L’hélico de sauvetage le plus proche est à Baie-Comeau. Réchauffer la personne, nous allons voir que nous pouvons faire de notre bord. Quelle est votre position?
Je regarde le GPS.
– On est au 51°29’43.1″ nord, 68°08’23.0″ ouest, dans une vallée à 1008m d’altitude.
Le policier pense que notre situation est gérable et que nous pouvons nous sortir nous-mêmes de ce merdier. Je suis un peu de son avis, mais Félix lui veut l’hélico à tout prix. Finalement, le policier nous dit d’attendre, de nous réchauffer sous la tente et de rappeler ensuite.
Le téléphone coupe…
Soudain au pire moment que cela pouvait arriver, la nature m’appelle. Je suis pris de panique. J’ai besoin, non il faut, non il faut absolument que je répondre à son appel. Je lance le téléphone Iridium à Val et je cours vers les buissons comme un lâche. Je fais ce que j’ai à faire et libérer de ce fardeau, les idées commencent à devenir plus claires, mais je commence à frissonner intensément. En fait, j’ai l’esprit plus limpide que jamais. Je cours rejoindre Valérie avec un plan précis dans la tête.
En deux minutes, ma tente eurêka est monté et on commence à étendre nos matelas et nos sacs de couchage un peu humides (ils étaient quand même protégés avec un dry bag bien fermé). Les vêtements que je porte, sont tous trempent et je grelotte comme je n’ai jamais grelotté. Comme linge sec il me reste deux paires de bas et un chandail de mérinos. Je suis dans mon sac de couchage, mais je grelotte encore. Il faut absolument que j’allume mon réchaud à essence. Je regarde dans ma veste, il y a des allumettes imperméables, mais le papier sablé sur la boîte est tout trempé. Impossible dans allumer une et j’en casse une dizaine! Changement de stratégie, pendant 10 minutes, j’essaie de sécher la boîte sur mon corps. Dans l’autre tente, Félix et Sarah ont réussi à se réchauffer, mais nous on grelotte. Finalement et avec grand soulagement, je craque une allumette et mon réchaud s’allume dans un Roaaar! Cela me permet de faire bouillir de l’eau. Cette eau une fois chaude et dans nos gourdes nous servira de bouillotte. Je colle la gourde sur moi la chaleur de cette dernière est brûlante, mais elle soulage énormément et fait disparaitre mes frissons.
Nous sommes sauvés pour l’instant…
9h00 Dehors, les flocons dansent au rythme endiablé du vent pour venir se poser sur la toundra mouillée. Dans la tente moi et Val on est en train de somnoler dans nos sacs de couchage. Félix et Sarah font de même dans leur tente. La tempête fait rage dehors, la visibilité a diminué à 50m et il a 20cm de neige mouillés. J’essaie de me convaincre que les conditions vont s’améliorer dans l’après-midi.
10h00 après une sieste je rappelle la SQ. Le téléphone Iridium m’indique que j’ai dépassé les 15 min gratuites et que je dois appelé mon fournisseur.
– Quoi?
Nous sommes abasourdis, nous avons juste un téléphone iridium. Nous essayons une multitude de combinaisons de touche, mais rien à faire ça ne marche pas!
– Sommes-nous sans moyen de secours maintenant?
J’angoisse on devrait attendre que les conditions s’améliorent si on veut sortir de la montagne.
-Vont-elles s’améliorer?
11h: Miracle! Le téléphone sonne, je décroche (le téléphone reçoit les appels, mais n’est plus capable d’en envoyer). Un policier différent du précédent me dit :
-Bonjour, ici le sergent Patrick Lowe est ce que vous aller bien?
-Oui, oui, on va bien
À ces mots, Valérie m’arrache le téléphone des mains. Elle juge que mon appel de tantôt a été peu efficace. Elle lui décrit la situation:
– Il y a 20 cm de neige au sol, c’est impossible de monter une pente sans glissé
– Nos vêtements sont trempés et ne nous tiennent plus au chaud.
– On n’est pas capable de faire 300m sans tomber en hypothermie. On est immobilisé
-Nous voulons une navette (un transport par hélicoptère sans être nécessairement un sauvetage).
Le téléphone coupe.
Le sergent rappelle, il nous dit qu’il va faire des démarcher. Il nous dit de rappeler dans 30 min.
Le téléphone coupe.
– Merde! Nous n’avons pas eu le temps de spécifier au sergent de la SQ que nous pouvions seulement recevoir des appels.
Je me pose la question. Va-t-il rappeler?
12h00 le téléphone sonne! Valérie prend l’appel. Elle mentionne tout de suite notre problème technique au sergent. Le téléphone coupe. Le sergent Lowe rappelle pour dire :
-Il y a un hélicoptère civil stationné à 10km de là. Il va essayer de décoller pour venir vous chercher. À quelle hauteur sont les nuages?
Nous l’estimons à 100m, ce qui est très bas, car un hélicoptère vole à vue.
Rien n’est garanti, nous dit le sergent, la météo est vraiment pourrie pour qu’un hélicoptère puisse voler.
Le téléphone coupe.
13h00 le sergent Lowe nous rappel pour dire que l’hélicoptère va décoller et que nous devons signaler notre présence.
Je sors de la tente avec mon matelas de sol rouge. J’attends comme un piquet fouetté et mouillé par la pluie et la neige. 10 min plus tard, le froid est devenu insupportable et je suis trempé à l’os. Je demande à Valérie de prendre le relais. 10 min plus tard, on commence à entendre des bruits d’hélico. Est-ce que ce serait notre délivrance?
13h30 on aperçois enfin l’hélico! Elle est au sommet de la montagne à 100m devant nous! On est euphorique!
– On est sauvé!
Sarah et Félix rangent leur tente et leur sac de couchage avec empressement. Pendant que moi et Val on court dans la neige vers l’hélico en faisant des signaux avec nos bras. Cependant, il y a un problème, l’hélico ne regarde pas dans notre direction.
L’hélico ne nous a jamais vues! Nous la regardons repartir dans la tempête, j’ai l’impression d’être seul au monde.
On est sorti avec nos derniers vêtements secs en pensant que l’hélico allait nous récupérer. La situation est très mauvaise, nous n’avons plus de vêtement sec pour nous réchauffer.
Dans la vie, on est toujours dans la merde, c’est juste l’épaisseur qui change, là on en avait jusqu’au nez.
On rentre les quatre dans la tente eurêka. On s’assit en indien et je mets le réchaud au centre de la tente, j’essaie de l’allumer avec les allumettes, mais le papier sablé est rendu totalement pourri à cause de l’eau. Comment rester au chaud? On commence à grelotter.
Par chance, Félix avait des allumettes Storm Proof dans son sac à l’extérieur. La boîte était pourrie, mais il y avait un petit papier sablé à l’intérieur de la boîte. J’en craque une et j’allume le réchaud. Rooaar! Sarah dit:
– Éteins l’allumette!
L’allumette ne veut pas s’éteindre, c’est comme une petite fusée de détresse. Une fumée se repend dans la tente et nous asphyxie. On ouvre les portes de la tente une bourrasque s’engouffre et on peut respirer, mais le réchaud s’éteint.
-Tabarnack!
Prise deux, j’essuie mes mains mouillées sur mon corps. Avec toutes les précautions du monde, je prends une petite allumette que je gratte sur le papier sablé(il m’en reste pas beaucoup). Crack! L’allumette s’enflamme et je réussis à allumer le réchaud. Nous sommes sauvés pour l’instant. J’enlève mes vêtements mouillés et on commence à ce réchauffé tant bien que mal.
14h00 le téléphone sonne. C’est le sergent Lowe.
-L’hélicoptère ne vous a pas vue, le pilote va attendre une fenêtre météo avant de faire un autre vol. Je regarde ce que je peux faire d’autre.
Le téléphone coupe.
Depuis ce matin la tempête a juste évolué de pire en pire.
On attend dans la tente assis en indien sur les matelas de sol autour du réchaud. Il fait froid, mais personne ne grelotte. J’ai enlevé mon pantalon mouillé qui empêchait la chaleur du réchaud d’irradier sur mes jambes.
14h30 le téléphone sonne! Le sergent nous appelle :
– Le pilote d’hélico privé ne veut plus voler, la météo est trop mauvaise même pour la SQ.
-J’ai appelé l’armée Canadienne et la base de Bagotville n’a pas d’hélico pour voler dans ses conditions.
Le téléphone coupe, silence dans la tente, j’ai le souffle coupé.
20 secondes plus tard, le sergent rappelle,
– L’armée a un hélico et une équipe de sauvetage disponible à Halifax, il devrait décoller sous peu. Vous êtes à 2h30 de vol d’Halifax.
Le téléphone coupe.
Dans la tente, la pression baisse d’un cran. On se demande qu’est ce que les hélicos d’Halifax ont de plus que celle de Bagotville.
15h00 le téléphone sonne. C’est le sergent Lowe
-Un Cormorant va partir d’Halifax et il sera là à 18h00.
Le téléphone coupe
– On se demande c’est quoi un Cormorant. Il n’avait pas dit un hélico au début? Mmm ça vas couter très chère.
Il me reste 1 litre et un quart d’essence pour le réchaud, on devrait être correct. Pour le reste de l’après-midi.
17h00 le sergent appel.
-Est-ce que vous allez bien? L’hélico de l’armée arrivera à 19h30, ils ont été retardés à cause de la météo.
-Pouvez-vous me reconfirmer la position GPS?
Le téléphone coupe.
Le sergent rappelle.
Valérie lui confirme notre position :
– 51°29’43.1″ nord, 68°08’23.0″ ouest.
Le sergent Lowe nous indique qu’il va rappeler dans 30 minutes. Il raccroche.
Dans la tente on essaie de faire passer le temps, on jase, on mange des noix, on compare notre situation au film Everest. Nous aussi, la montagne nous tient prisonniers.
Je pense que cette montagne porte mal son nom, Paul Provencher était un homme sympathique et chaleureux tout le contraire de cette montagne.
De temps en temps on aère la tente et on secoue la toile pour enlever la neige.
17h30 le téléphone sonne. Valérie décroche. C’est le sergent Lowe qui appelle pour prendre de nos nouvelles. Il annonce ceci:
– Un hélicoptère de la sûreté est parti de Montréal en renfort.
-Un repas chaud, des lits et une sécheuse vous attende à la station Uapishka.
-Je vous rappelle à 7h.
Le téléphone coupe.
Dans la tente on rêve au lit chaud qui nous attend à la station à 10 km de là. Le moral est bon on a le sourire aux lèvres, on raconte des blagues, on rit.
Il faut comprendre que même si notre situation était stable dans la tente, on ne pouvait pas nous déplacer dehors sans tomber en hypothermie.
19h00 le sergent appel.
-L’hélico aura un léger retard.
– Quand elle sera là, signaler votre présence avec vos frontales.
-Ça sera notre dernière communication avant que l’armée vous sorte de là.
Le sergent raccroche
On est heureux, mais nous n’avons aucune idée de ce qui va suivre. Les heures suivantes ont été longues et angoissantes.
20h00 la nuit est tombée et le vent secoue la tente comme un morceau de chiffon. Le léger retard est comprenable, on créer deux murs coupe-vent avec les matelas de sol, car le vent transperce la tente. Notre moral est encore bon.
20h30 bon c’est excusable comme retard, mais je me demande si on ne va pas passer la nuit ici. Je pèse la bouteille de carburant avec ma main et elle est légère trop légère je doute avoir assez d’essence pour passer la nuit. Je diminue le réchaud à son minimum. Que va-t-il se passer sans essence? Je ne veux pas trop y penser.
21h00 l’attente est angoissante, je défile les options dans ma tête, on a deux sacs de couchage secs, mais on est 4. Si on dort à tour de rôle? Il y a deux couvertures de survie. Je doute pouvoir dormir là dedans. Faire un feu dehors? Non tout est trempé.
21h30 on somnole tout en étant assis en indien. Je ne veux pas m’endormir, j’ai le sommeil profond je pourrais manqué l’hélico et il faut surveiller le réchaud.
On se demande que fait l’hélico de l’armée.
-Est-ce qu’elle est incapable de voler?
-Est ce qu’elle cherche dans le mauvais secteur?
-Est-ce qu’elle a rebroussé chemin?
-Pourquoi le sergent n’appelle pas?
On se sent seul.
21h45 je me dit qu’a 22 heures, on ressort les sleepings. Je vais m’écrouler de fatigue.
21h52 le téléphone sonne! Le sergent Lowe appelle! La pression diminue. Il nous avertit que l’hélico a fait une première recherche, mais qu’elle ne nous a pas vues.
-L’hélico va tenter une autre recherche.
– Une ambulance et des agents de la SQ vous attendent à la station Uapishka.
21h55 on entend les rotors! Pas le temps de niaiser je ne lasse pas mes chaussures. On sort dehors, il fait noir comme dans un four. On envoie des signaux avec nos frontales. On voit de la lumière à 300m de nous, mais elle ne bouge pas. J’ai peur que l’hélico cherche dans la mauvaise zone, manque d’essence puis reparte.
La pluie me fouette le visage et me trempe jusqu’à l’os malgré mon imperméable. J’avance en trébuchant vers la lumière, je suis crispé par le stress.
Je suis resté peut-être 5min dehors à faire des signaux et ces minutes m’ont semblé comme des heures.
Soudain je vois des bandes réfléchissantes qui avancent à 30m devant moi. Les secours enfin! Deux soldats dans leurs combinaisons de survie orange arrivent devant moi. Ils arrivent devant moi. Un me lance amicalement:
-Hey buddy you are lucky that we found you. We are almost out of fuel.
Je leur réponds avec la gorge serrer par l’émotion.
-Thank you so much guys.
On vas vers la tente ramasser nos affaires et aller chercher Sarah qui était restée dedans. Je commence à défaire ma tente. Je me fais rapidement dire.
-There is no time for your tent! Grab your backpack and hurry hup the helicopter is going to leave soon with or without us and I don’t want to sleep here tonight!
Je mets mon sac et je coince deux matelas de sol sous mon bras.
J’abandonne ma tente.
Avec tristesse je me retourne pour lui donner un dernier regard. Elle m’a accompagné dans tellement d’aventure. On s’éloigne alors qu’elle reste là à se faire secouer dans tout les sens par le vent et la neige.
On commence la course vers l’hélico. Un des militaires ouvre la marche alors que l’autre la ferme. Ils ne semblent pas du tout gêner par la végétation. Tourbières, buissons, arbustes. Leurs bottes de géant semblent tout écraser sur leur passage.
On commence à apercevoir deux hélicos. En fait, c’était un Cormorant CH-149 un très gros hélico comparable à la taille d’un bus.
On arrive à 50 mètres de l’hélico. On se fait dire de suivre de très près le militaire afin d’éviter le rotor. Le vent que dégage le Cormorant est intense, c’est comme avancer en ayant un joueur de rugby qui vous pousse vers l’arrière. Sarah est incapable d’avancer à cause de ce vent, un militaire l’a pris par le bras pour la transporté jusque dans l’hélico.
J’embarque par la rampe arrière de l’hélico. Ma botte résonne sur le sol d’aluminium de l’hélico. Sauver! On dépose nos sacs dans un pagne et je m’assiste sur une banquette. Je suis secoué de frisson, mais sauf. L’équipage s’affaire rapidement à nous attacher et à faire les dernières vérifications avant le décollage. Finalement, le Cormorant du 413 escadron décolle de la montagne infernale en poussant un rugissement assourdissant.
À l’intérieur on se fait dire ça :
-We are short on fuel. We can’t land again without refuelling, so we are going to Sept-Îles. We will be there in 40 minutes.
Les militaires nous couvre de couvertures chaudes et de bouillotte. On est bien soigné, on nous donne de l’eau, de la nourriture et des masques N-95. Ah! J’avais quasiment oublié la pandémie.
Durant ce vol on apprend que nous avons été chanceux dans notre malchance.
Durant leur premier vol, ils n’ont pu nous repérer à cause de la couverture nuageuse trop basse (on était trop haut en altitude). Ils ont pue nous repérer lors du deuxième vol, car la couverture nuageuse a monté, mais on était à la limite des nuages. On apprend aussi que la météo allait empirer dans les jours suivants.
11h00 le Cormorant atterrit à Sept-Îles des ambulanciers et la Sûreté du Québec nous prennent en charge. Ils nous posent des questions, on leur répond. Certains de leur commentaire me font rire.
-Wow! 4 jours à marcher dans la brousse vous êtes vraiment des crinqué.
-Une tempête de neige en août?! Vous avez bien faites d’appeler.
-C’est plate votre situation, mais quand on ne fait rien il n’arrive rien.
12h00 je reste dans l’ambulance, Valérie Sarah et Félix embarquent avec les policiers qui nous reconduisent à l’hôtel(c’était sur leur chemin). Durant leurs tours d’auto de police, ils se font poser la question suivante.
-Est-ce que c’est la première fois que vous embarquez dans une auto de police?
– Oui
-Bonne Réponse!!
On arrive tout tremper et pouilleux à la réception de l’hôtel. En dégoutant sur la moquette et avec le regard d’un naufragé désespéré, je demande au réceptionniste:
– Monsieur on vient d’être secouru par hélicoptère et on veut juste une chambre. On as une carte.
-Euh… Oui, nous avons une chambre disponible.
12h30 après une bonne douche chaude je m’écrase dans un lit sec!
Notes :
– Toujours se garder une réserve de vêtement sec même si la fin du sentier est proche.
– Attendre lorsque la météo est merdique.
– Toujours apporter un téléphone satellite, ça sauve la vie et les sauveteurs peuvent vous conseiller quoi faire. Vérifier qu’il fonctionne bien, la seule raison pourquoi nous avons été secourus est dû au fait que la SQ à rappeler.
– Avoir un moyen de faire du feu, même lorsque trempé. Des allumettes imperméables ne serve à rien si leur boîte est trempée et ces boîtes prennent l’humidité rapidement.
– Avoir de l’essence supplémentaire pour les urgences.
– S’assurer que les personnes qui vous accompagne en rando sont bien équipé.
– Ne pas dépendre des secouristes, ils se sont pris à trois fois pour venir nous chercher, je n’ose pas imaginer ce qui serait arrivé de nous, s’ils ne nous avaient pas trouvé.
– Avoir une couverture de survie chacun, si quelqu’un tombe en hypothermie, il y as un grand risque que les autres l’attrape aussi en essayant d’aider la victime.

Valérie Grenon (Montréal), Samuel Rivet (Montréal), Sarah Poirier (Sherbrooke) et Félix Racine-Brassard (Sherbrooke), les quatre personnes qui ont dû être secourus aux monts Groulx le 26 août dernier.

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