Le capelan, buffet des animaux du Saint-Laurent

Par Mathieu Morasse 24 mai 2018
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Photo : V. Provost – Comité ZIP Côte-Nord

Le capelan est un poisson central dans l’écosystème du Saint-Laurent. Il sert de nourriture à de nombreuses espèces d’oiseaux, de poissons et de mammifères marins, mais il demeure encore relativement méconnu et difficile à étudier.

Le capelan vit dans l’océan Arctique et dans les eaux nordiques des océans Atlantique et Pacifique, dont l’estuaire et le golfe du Saint-Laurent.

C’est un petit poisson très important dans la chaîne alimentaire. Selon Pêches et Océans Canada, le capelan est la principale proie de l’écosystème du nord du golfe du Saint-Laurent et représenterait environ 50 % de l’ensemble de la matière consommée dans l’écosystème. Il est notamment mangé par la morue, le sébaste, les cétacés, les phoques, le flétan et certaines espèces d’oiseaux.

Selon une étude scientifique de 2008 effectuée au large de Terre-Neuve, le capelan se déplace dans la colonne d’eau pour suivre le zooplancton dont il se nourrit. Il remonte près de la surface pendant la nuit et redescend entre 60 et 180 mètres pendant le jour. Les plus gros spécimens peuvent descendre encore plus creux.

«Le capelan n’est pas une espèce en péril, mais c’est une espèce qui est particulièrement importante dans la chaîne alimentaire. Donc s’il y en a moins, c’est un paquet d’autres espèces ensuite sur lesquelles ça a des répercussions», explique Félix Gagnon, chargé de projet au Comité Zone d’Intervention Prioritaire (ZIP) Côte-Nord du Golfe.

Il vit rarement plus de 5 ans. L’adulte mesure de 13 à 20 centimètres et pèse 40-45 grammes. Il est vert foncé sur le dessus, argenté sur les côtés et blanc argenté sur le ventre. Son corps élancé rappelle celui de l’éperlan, avec une haute nageoire dorsale.

Pêcher le capelan

Le capelan est pêché en quantités relativement modérées dans l’estuaire et le golfe du Saint-Laurent. Les prises du secteur se font surtout sur la côte ouest de Terre-Neuve. Il se retrouve aussi régulièrement dans les filets des pêcheurs de crevettes. Ceux-ci vont parfois jusqu’à éviter certains secteurs pour diminuer sa capture secondaire. Il est aussi pêché sur les plages lorsqu’il roule.

«J’encourage les gens à aller à la pêche du capelan. C’est un poisson qui est pas mal abondant, les quantités de capelan recueillies par la pêche familiale récréative sont minimes. C’est une activité traditionnelle d’ici. Moi, j’encourage tout à fait les gens à aller le pêcher durant la fraie», lance Félix Gagnon.

Poissons mystérieux

Selon Pêches et Océans Canada (MPO), le capelan se retrouve aujourd’hui régulièrement dans les filets des pêcheurs du sud du golfe du Saint-Laurent, alors qu’il y était presque absent avant 1990. Les raisons du déplacement des populations de capelan ne sont pas connues. Le MPO conclut aussi que les stocks du golfe sont stables, voire à la hausse, avec de grandes variations annuelles.

«Le capelan du golfe du Saint-Laurent est relativement méconnu. C’est une espèce qui est difficile à étudier parce qu’on ne peut pas vraiment suivre l’individu, c’est un très petit poisson. C’est un poisson qui a un très court cycle de vie. Souvent, ils vont mourir vers 3-4 ans, après leur première reproduction. Il y a encore beaucoup d’inconnues sur la question», mentionne Félix Gagnon.

Peut-on prédire la fraie ?

Le capelan se rapproche des côtes à l’approche de la fraie pour se reproduire. Les femelles pondent des œufs sur une plage de sable ou de petit gravier que les mâles couvrent ensuite de leur sperme. On dit alors que le capelan «roule». Le phénomène dure généralement de 2 à 4 jours par frayère.

Le capelan fraie aussi quelques jours plus tard sur des plages sous-marines de sable ou de galets situées entre 18 et 33 mètres de profondeur. Certaines populations de capelan ne fraient que sous l’eau.

La période de fraie varie chaque année. Les endroits exacts peuvent aussi changer. Il est difficile de prédire à quel moment le capelan va rouler. Une étude terre-neuvienne réalisée en 1995 s’est penchée sur plusieurs facteurs pour tenter de résoudre la question.

Les chercheurs n’ont trouvé aucune variable ou combinaison de facteurs qui permettrait de prédire la fraie chaque année. Leur conclusion est que la fraie est plus probable lorsque trois facteurs sont réunis : de petites vagues de moins de 20 cm sur la plage, une mer calme avec seulement de petites rides, ainsi que la présence de nombreux bancs de capelans de centaines ou de milliers d’individus à proximité de la plage.

 

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