Celui qui prend plaisir à corriger les autres

Par Éditions Nordiques 16 novembre 2011
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Il est celui qui donne des punitions aux joueurs qui font de la rudesse, qui ne respectent pas le thème ou qui retardent le jeu. Il reçoit aussi des gougounes du public, lorsqu’il est sévère ou qu’il se trompe. Mais ce n’est pas grave, il souligne que ça ne fait «même pas mal». Ancien joueur d’improvisation lui-même, Jean-François Albert a décidé d’enfiler le chandail rayé pour la Ligue d’Improvisation de Sept-Îles (LIS). Discussion avec le boss de la patinoire.

Le pro du gazou punitif a goûté très jeune à l’improvisation. Alors qu’il voyait l’explosion de la Ligue Nationale d’Improvisation (LNI) à la télévision dans les années 80, dans sa polyvalente de Baie-Comeau, sa ville d’origine, il s’y initiait. Il a ensuite continué à jouer selon les thèmes et les catégories proposées au Cégep, puis dans les ligues semi-sérieuses que Sept-Îles a connues, comme à la Cage aux sports ou au Thompson.

Selon lui, il y a un «beau parallèle» entre ses débuts et aujourd’hui. «À cette époque, il y avait une effervescence. Aujourd’hui, il y en a une nouvelle, mais elle est plus structurée, il y a une meilleure culture de l’improvisation. À l’époque, c’était l’impro qui menait aux arts, comme le théâtre. Aujourd’hui, c’est le théâtre qui mène à l’impro. Les joueurs débarquent avec un meilleur bagage.»

Il considère d’ailleurs que la rapidité du jeu d’aujourd’hui étourdirait plusieurs pionniers du jeu. Sauf Robert Lepage, son joueur fétiche. «C’est LA référence. Il apporte un vécu, un sentiment et une vision rapidement. Il crée instantanément. Je mettrais ma main au feu qu’il suivrait et qu’il évoluerait dans la LNI d’aujourd’hui.»

L'arbitre Jean=François Albert en action

L'arbitre Jean=François Albert en action

De l’autre côté de la patinoire
Dans la tête de Jean-François Albert, c’était certain qu’il n’allait pas jouer dans la LIS, même s’il en est un des fondateurs. La grande nervosité qui entoure une joute ne l’intéressait plus. «Je suis plus à l’aise comme arbitre.» Ce saut de l’autre côté lui a fait voir le jeu autrement. «Comme joueur, je voyais le joueur devant moi. Comme arbitre, je vois le jeu, tout ce qui est apporté, l’univers, je décortique mieux.»

Le plus dur pour le zébré, c’est le dosage des punitions. «Parfois, c’est très évident qu’il y a une punition. Sauf qu’une pénalité, ça peut changer le ton, le rythme, la partie et même l’issu de la rencontre. Il faut voir l’arbitrage comme faisant partie de la mise en scène, ça fait partie du jeu lui-même = et ça, il faut que les joueurs le comprennent. Il y a des parties avec 0 punition, d’autres avec 12, mais je m’adapte à la partie, dans une certaine mesure.»

Donc, si les punitions font partie du spectacle, l’arbitre joue donc un jeu. Donc Jean-François Albert n’est pas réellement bête: il joue un personnage! «En dedans de nous, on a tous des journées où on ne veut pas se faire piler sur les pieds. Je pige dans ces journées-là, confie l’arbitre, suivi d’un rire. Le personnage est toujours en évolution. Il risque de devenir de plus en plus bête.» À l’image du roi des arbitres, Yvan Ponton – bien que Jean-François cite en exemple Morel Thériault, de Port-Cartier, qu’il qualifie de baveux naturel.

Et la LIS, elle?
Étant un des cofondateurs de la LIS et ayant l’une des meilleures positions pour voir évoluer la ligue, que pense-t-il de l’actuelle deuxième saison? «La saison 1, c’était essai et apprentissage. La saison 2, c’est encore l’apprentissage, mais aussi l’évolution et la maturité. Il y a une meilleure structure, on sait plus où on va avec la ligue. Il y a beaucoup d’ajouts au spectacle aussi.»

Même s’il les corrigent avec plaisir, il souligne à plusieurs reprises la qualité de jeu des improvisateurs. «Je suis très surpris par les recrues, agréablement surpris. Ils ont une belle attitude, ils ont de l’ouverture et ils embarquent complètement.» Il a tellement foi en ses joueurs qu’il croit que dans un futur pas si lointain, la LIS rayonnera au niveau culturel, dans les autres tournois d’improvisation et qu’elle-même organisera son propre tournoi.

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