Mine d’uranium : La Santé publique constate le manque de données disponibles

Par Fanny Lévesque 5 mai 2014
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Lancée dans la foulée de la levée de boucliers contre le projet de Terra Ventures à Sept-Îles, l’étude réalisée par l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ) sur les mines d’uranium vient d’être dévoilée. L’important rapport de 375 pages met notamment en lumière le manque de données disponibles sur les impacts des activités uranifères sur la santé humaine et les effets sociaux et psychosociaux.

En 2008, l’annonce d’un projet d’exploration uranifère, non loin du noyau urbain de Sept-Îles, avait soulevé les passions dans la région. La gronde populaire et la menace d’un groupe de plusieurs médecins de démissionner si le projet allait de l’avant avaient défrayé la manchette. En pleine crise, le directeur national de la santé publique s’était déplacé à Sept-Îles en décembre 2009, où il avait proposé la création d’un groupe de travail intersectoriel sur l’uranium.

C’est ce groupe de travail, présidé par le directeur régional de la santé publique de l’époque, Raynald Cloutier, qui a commandé l’étude à l’INSPQ rendue publique le 25 avril. «Nous y constatons des conclusions très intéressantes», a fait valoir le Dr Cloutier en entrevue au Journal. «D’ailleurs, le groupe de travail arrive pas mal aux mêmes constats que l’Institut», a-t-il ajouté. D’ici trois semaines, le comité rendra à son tour son rapport sur l’ensemble de ces travaux.

Raynald Cloutier rappelle que l’objectif de la démarche n’a jamais été de produire une étude qui se voulait rassurante ou non. «C’était pour avoir une étude informative (…) basée sur le respect des Nord-Côtiers. Ils ont le droit à une information équitable et cohérente», a ajouté le président, qui est d’avis que le document deviendra un «incontournable», entre autres pour les travaux à venir du BAPE générique sur l’uranium.

Conclusions
L’INSPQ dénote à plusieurs reprises dans son rapport de nombreux manques d’information dans le domaine. L’Institut soulève entre autres la rareté des données concernant le bruit de fond régional avant l’exploitation d’une mine d’uranium. «La connaissance de ce bruit de fond est essentielle pour le suivi de la santé des populations vivant dans le voisinage», peut-on lire dans le document.

Les conclusions sont également sévères quant aux effets sociaux et psychosociaux engendrés par les activités minières uranifères. «Les mines uranifères paraissent directement associées à une altération du climat social et à une perte de confiance des citoyens envers les autorités.» Le rapport indique aussi que les mines d’uranium entraînent spécifiquement de l’anxiété en lien avec la radioactivité et ses effets (réels et anticipés). «L’uranium c’est plus épeurant que de la poussière d’acier par exemple», indique M. Cloutier.

À propos des risques sur la santé humaine, le résultat des analyses des études, dont les conclusions étaient «plus limitées», ne permettent pas d’affirmer que le fait de résider à proximité d’une mine d’uranium entraîne des problèmes, mais d’autres recherches sont nécessaires, selon l’Institut.

Le comité de travail espère qu’avec les conclusions de l’INSPQ les autorités s’intéresseront davantage à ce qui se fait actuellement dans les mines d’uranium dans le monde. «Il va falloir étudier ce qui existe déjà de façon plus précise», explique-t-il pour que la société puisse faire des choix éclairés.

Québec meilleure mine réagit
La Coalition pour que le Québec ait meilleure mine a également réagi à la publication de l’étude de l’INSPQ qui vient, selon l’organisme, confirmer «de nombreux risques et impacts de la filière uranifère pour la santé, l’environnement et les populations» en plus de soulever «de nombreuses lacunes dans les connaissances.»

«L’étude de la Santé publique n’est pas du tout rassurante et confirme plusieurs des préoccupations et des appréhensions des citoyens, de groupes de médecins et des collectivités face aux impacts des mines d’uranium, premier maillon de la chaîne du nucléaire», a affirmé le porte-parole de la coalition, Ugo Lapointe, qui invite le gouvernement de Philippe Couillard à maintenir le moratoire sur les mines d’uranium au Québec, tant «qu’il n’y aura pas eu une évaluation de l’ensemble des risques et dangers de cette filière» et que les communautés n’auront pas été consultées.

Le BAPE générique lancé par le ministre de l’Environnement de l’époque, Yves-François Blanchet, doit avoir lieu pendant une année, soit du 20 mai 2014 au 20 mai 2015. L’exercice doit permettre de mieux connaître les risques associés aux activités minières uranifères.

(Photo: archives – Le Nord-Côtier)

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