Dossier Oreilles dégourdies: Dur dur de présenter des artistes émergents en région éloignée

Par Éditions Nordiques 3 avril 2012
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Il y a environ un mois, pour des raisons économiques, les trois partenaires des Oreilles dégourdies (Salle Jean-Marc-Dion, Cégep de Sept-Îles et Radio-Canada) ont décidé d’annuler le spectacle de SoCalled prévue le 21 avril prochain. Soyons honnêtes, cette série consacrée à la musique émergente ne fait pas souvent ses frais. Est-ce plus dur à Sept-Îles qu’à Gaspé de présenter ce type d’artiste? Le Nord-Côtier a enquêté.

Nées il y a trois ans d’un partenariat entre la Salle Jean-Marc-Dion et Radio-Canada (le Cégep de Sept-Îles est arrivé à la deuxième année), les Oreilles dégourdies sont débarquées avec cette volonté de présenter une programmation éclectique et de présenter certains artistes plus en marge, explique David Laferrière, ancien directeur général de la Salle Jean-Marc-Dion et l’un des pères de cette série qui présente environ cinq spectacles par saison.

Certains spectacles ont été un succès, comme Misteur Valaire, Radio Radio, Voïvod ou Karkwa. D’autres ont connu des assistances plus frileuses, comme Antoine Gratton, Guillaume Arsenault, Jordan Officer ou récemment Leif Vollebekk. «J’ai souvent été déçu du volume, admet celui qui dirigeait la Salle jusqu’à l’automne dernier. Mais je crois encore au potentiel de cette série. Si le public n’est pas nombreux, il est de qualité.»

Selon David Laferrière, le défi est de faire sortir ceux qui aiment cette musique et de convaincre ceux qui ne connaissent pas ça d’oser l’essayer. «Et je n’ai pas réussi», lâche-t-il, insistant pour prendre une partie du blâme. Pourtant, produire des artistes émergents ou indépendants (prenez votre terme préféré) semble un défi de taille en région, encore plus en région éloignée.

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«Ça va bien, dans la mesure qu’on réussit à produire des spectacles», résume Danielle Gosselin, la responsable de la programmation du Cabaret de la dernière chance, un bar et salle de spectacle de Rouyn-Noranda. Mathématiquement, Danielle et son équipe peuvent être fières. Ils produisent environ 90 spectacles par année. Le chiffre grimpe à 200 si on inclut les différentes formes d’évènements culturels. Mais là aussi, le public n’est pas toujours au rendez-vous, malgré la popularité de Rouyn-Noranda dans le cœur des artistes. Selon Danielle, si le public n’a pas entendu parler de l’artiste dans un média, il se garde une petite gêne et ne se déplace pas.

Le public est peut-être moins nombreux en chiffre absolu, soutient Josée Roussy, directrice générale de CD Spectacles, diffuseur de Gaspé, mais si on regarde en pourcentage, les régions n’ont pas à rougir. «Au pro rata, c’est énorme», insiste-t-elle. Elle estime qu’environ 30% de la population de Gaspé se déplace à l’un de ses 45 spectacles, alors qu’à Montréal, on parle d’environ 15%. Toutefois, 15% de 3 millions demeure plus gros que le tiers de 15 000. Et, surtout, ce pourcentage ne se déplace tous les soirs, mais bien sûr toute une année.

Mais ces chiffres cachent certaines nuances. Oui, il y a un public, certains spectacles sont complets quelques heures après la mise en vente. La question demeure: est-ce possible de produire des artistes émergents en région éloignée?

Voir aussi, dans le Dossier Oreilles dégourdies:
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Photo: Karkwa, lors de leur passage aux Oreilles dégourdies

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